Sénégal. Echec de la rencontre de Dakar: les Francs-maçons français menacent

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Le 31/01/2018 à 18h33, mis à jour le 31/01/2018 à 18h34

Le Grand Orient de France a du mal à accepter l’annulation du sommet des Rencontres humaines et fraternelles d’Afrique et de Madagascar à Dakar. La plus grande loge maçonnique de France parle de «manœuvres liberticides» et profère des menaces contre le Sénégal.

L’annulation des 26e Rencontres humaines et fraternelles d’Afrique et de Madagascar, qui étaient prévues à Dakar les 2 et 3 février, est mal passée chez les Francs-maçons français. Dans un communiqué publié le 26 janvier dernier, le Grand Orient de France a manifesté son mécontentement sur la décision du Sénégal de ne pas abriter cette rencontre. Selon la plus grande loge maçonnique de France, cette décision relève de «manœuvres liberticides» initiées par des «forces obscurantistes».

«Nous nous ne céderons ni à l’intimidation, ni aux mensonges, ni aux menaces. Nous continuerons de porter en Afrique comme dans d’autres continents le message d’une franc-maçonnerie de progrès, libérée des dogmes, d’une franc-maçonnerie émancipatrice permettant l’avènement d’une humanité meilleure et plus éclairée», a indiqué le Grand Orient de France dans son communiqué.

Impuissante devant cette décision prise par le Sénégal après la pression de plusieurs associations, cette loge maçonnique française promet des représailles. «Face à ses manœuvres liberticides, le Grand Orient de France prendra sans tarder les initiatives qu’exige la gravité de la situation», a-t-il annoncé. Dans le même communiqué, il dénonce ce qu’il appelle «des forces obscurantistes dévoyant les principes même qui sont au cœur de toute démarche spirituelle et prétendant parler au nom de la majorité du peuple sénégalais, qui ont empêché la tenue de leur rencontre».

Toutefois, ce communiqué est mal perçu par la majorité des sénégalais qui sont très attachés à l’héritage culturel de leurs ancêtres et à leurs convictions religieuses. La plupart des Sénégalais partagent la vision de Mame Matar Gueye de l’ONG Jamra, aussi membre du Collectif «Non à la franc-maçonnerie». Selon ce dernier, «si cette puissante organisation a pu être contrariée au point de proférer des menaces, c’est la preuve que nous sommes sur la bonne voie et que nous devons redoubler d’ardeur dans ce combat».

Sur les réseaux sociaux, ces menaces ont été largement commentées. Pour Babacar Bâ, un Sénégalais vivant en France, cadre dans la finance, "le Sénégal est et restera toujours un pays profondément ancré dans les valeurs des religions monothéistes avec un profond attachement à nos confréries (tidjani et mouride, NDLR) qui sont des facteurs de stabilisation de notre pays". 

Pour sa part, l'activiste Seydina Oumar Bâ, il y a "panique à bord de la barque maçonnique". 

Rappelons que, dès l’annonce par les Francs-maçons de leur volonté de tenir leurs rencontres au Sénégal, un pays à 95% musulman, plusieurs associations s'étaient soulevées pour alerter l’opinion. En effet, regroupé dans le collectif «Non à la franc-maçonnerie», ces associations avaient émis un communiqué le 16 janvier dernier.Elles avaient qualifié les Francs-maçons de «congrégations occultes faisant insidieusement, sous prétexte de “protection des libertés”, la promotion de cette nouvelle forme d'infanticide qu'est l'avortement et l'apologie des unions contre-nature, comme les mariages homosexuels». Entre autres pratiques, les organisations islamiques avaient aussi parlé «d'agression de la société sénégalaise par une entreprise maléfique de débauchage de jeunes gens».

Selon Mame Matar Guèye, en voulant organiser leur sommet à Dakar, les francs-maçons avaient pour projet de bouleverser un ordre déjà établi au Sénégal.

«En versant dans l'athéisme et le libertinage, les textes fondateurs des Francs-maçons sont aux antipodes de nos valeurs, poursuit Mame Mactar Guèye. Nous sommes un pays de tolérance mais nous n'acceptons pas la présence d'organisations qui remettent en cause les acquis de Serigne Touba et El Hadj Malick Sy [fondateurs, respectivement, de la confrérie mouride et de la branche sénégalaise de la Tijaniya] ou sont susceptibles d'entraîner des troubles à l'ordre public», avait-il dénoncé.

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 31/01/2018 à 18h33, mis à jour le 31/01/2018 à 18h34