C'est un phénomène qui commence à inquiéter les Algériens. Au baccalauréat, les filles réussissent, alors que les garçons échouent lamentablement. En effet, cette année, souligne le quotidien algérien El Watan, si le taux de réussite est de 55,9%, le sexe faible est nettement le plus fort avec 65,3% des nouveaux bacheliers. Les garçons, eux, affichent un pourcentage de succès moitié moins important ou presque avec 34,7% seulement.
Il s'agit d'une tendance de fond qui montre que les jeunes Algériens ne croient plus aux études pour assurer leur avenir. En effet, d'année en année, les filles prennent le dessus sur les garçons pour ce diplôme qui ouvre la voie des études universitaires. En 2017, 65% des bacheliers étaient des bachelières, contre 35% pour les garçons. Le pic a été atteint en 2014, année ou les filles avaient franchi la barre des deux tiers avec 67,6%, contre moins de 32,4% pour leurs camarades de lycée masculins.
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Selon Fatma Oussedik, sociologue interrogée par le quotidien sur ce phénomène, les Algériens ne croient plus au savoir. Ils ne sont plus attirés que par le monde des affaires. "Moi, je voudrais d’abord souligner que c’est un indicateur sur le fait que le savoir se dévalorise dans la société, au bénéfice du monde des affaires", a-t-elle expliqué. Autrefois, "l’ascension sociale était fondée sur le savoir et sur l’école. Et la société adhérait à ces valeurs", poursuit-elle.
En somme, devant les détournements et la dilapidation des ressources publiques, les jeunes Algériens ont fini par comprendre que les études ne leur servaient à rien. Dans ce pays où l'ascenseur social est en panne, mieux vaut être fils de ministre ou de général pour réussir. Le fait est que les marchés publics sont systématiquement octroyés à des entreprises dirigées par ou appartenant à des personnes apparentées à des hauts placés dans l'administration ou des gradés de l'armée.
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L'analyse de Fatma Oussedik met à nu un phénomène connu de tous: on glorifie de l'argent d'où qu'il vienne. «Peu à peu, on a vu la nature même des rapports de force au niveau social tourner au bénéfice des gens d’argent, et même de l’argent venu de n’importe quelle façon. Et donc les garçons vont très vite vers des lieux où ils peuvent faire de l’argent», décrypte-t-elle. Son explication apporte un éclairage sur le récent scandale des 701 kg de cocaïne qui mêlerait la pègre et les officiers des forces de sécurité. Autant de choses qui donnent raison aux jeunes lycéens qui pensent que le Bac algérien ne sert à rien.