Afrique du Sud: décès de Winnie Mandela, l'ex-épouse de Nelson Mandela

Winnie Mandela.

Winnie Mandela.. DR

Le 02/04/2018 à 14h29, mis à jour le 02/04/2018 à 17h47

Winnie Mandela, ex-épouse de l'ancien président sud-africain Nelson Mandela, est morte à l'âge de 81 ans, a annoncé ce lundi son entourage.

Winnie Mandela, l'ex-épouse du premier président sud-africain noir Nelson Mandela et héroïne de la lutte contre l'apartheid, est décédée lundi à l'âge de 81 ans des suites "d'une longue maladie", suscitant une pluie d'hommages pour une "mère de la nation" au parcours toutefois controversé.

Le couple qu'elle a formé avec Nelson Mandela pendant plus de trente ans personnifiait le combat acharné contre le régime raciste.

Leur photo, main dans la main, à la sortie de prison de Nelson Mandela en 1990 après vingt-sept ans derrière les barreaux, symbolisait aussi leur victoire face à l'apartheid, qui a été officiellement aboli en 1994.

Mais la réputation de celle que le peuple sud-africain appelait affectueusement "Winnie" a été ternie par plusieurs dérapages politiques et des affaires de corruption.

"C'est avec une grande tristesse que nous informons le public que Mme Winnie Madikizela Mandela est décédée à l'hôpital Milpark de Johannesburg lundi 2 avril", a annoncé son porte-parole, Victor Dlamini. "Elle est décédée des suites d'une longue maladie, pour laquelle elle a été hospitalisée à plusieurs reprises depuis le début de l'année. Elle est partie en paix en tout début d'après-midi lundi, entourée de sa famille".

Le président sud-africain Cyril Ramaphosa, patron du Congrès national africain (ANC), fer de lance de lutte antiapartheid, a salué à la télévision la mémoire de celle qui incarnait la "voix du défi et de la résistance".

Le prix Nobel de la paix Desmond Tutu a rendu hommage à un "symbole majeur" du combat contre le régime ségrégationniste. Winnie "a refusé de céder face à l'incarcération de son mari, le harcèlement perpétuel de sa famille par les forces de sécurité (...). Son attitude de défi m'a profondément inspiré, ainsi que des générations de militants", a déclaré l'ex-archevêque anglican.

Pasionaria

"Tous les Sud-Africains sont redevables à Mama Winnie", a réagi la Fondation Nelson Mandela. "Elle va nous manquer."

L'opposition a aussi salué le décès d'une "combattante de la liberté". "C'est un jour de tristesse", a estimé Mmusi Mainane, le leader de l'Alliance démocratique (DA).

Dans le townhip de Soweto, où Winnie vivait toujours, des dizaines d'habitants se sont pressés lundi devant son domicile. "C'est un grand choc", a témoigné à l'AFP un voisin, But Makganemele. "Tout au long de sa vie, elle a fait partie de l'avant-garde du combat contre l'oppression."

C'est en 1958 que la flamboyante jeune femme au caractère trempé épouse Nelson Mandela. Mais, très vite, le couple est séparé par les activités politiques du mari, condamné en 1964 à la prison à perpétuité.

Pendant ses 27 années de prison, Winnie résiste aux persécutions incessantes du régime raciste et devient l'égérie de la lutte anti-apartheid. Elle ne plie pas devant les astreintes à domicile, les attaques à la bombe, les détentions.

"Les années de prison m'ont endurcie (...) Il n'y a plus rien qui ne me fasse peur", affirmait-elle dans une interview en 1987.

Les lois imposant la ségrégation entre les Noirs et les Blancs sont finalement abolies en 1991.

En 1994, c'est la consécration pour Nelson Mandela et son épouse. Lui devient le premier président noir d'Afrique du Sud, elle entre dans le gouvernement.

"Mal tourné"

Les années de détention ont pourtant porté un coup fatal à leur union. Les frasques de Winnie, son discours violent et les accusations de meurtre portées contre ses gardes du corps l'éloignent de son époux. Le couple se déchire et leur divorce est prononcé en 1996.

Dans son discours le plus controversé, en 1986, Winnie avait appelé à "libérer ce pays avec des allumettes", une référence au supplice du "collier" enflammé autour du cou des "traîtres".

En 1998, la Commission vérité et réconciliation (TRC) l'avait déclarée "coupable politiquement et moralement des énormes violations des droits de l'Homme" commises par sa garde rapprochée.

"Quelque chose a terriblement mal tourné", avait déploré il y a quelques années à son sujet Desmond Tutu.

A sa mort en 2013, Nelson Mandela, entre-temps remarié avec Graça Machel, ne lui a rien légué. Winnie, très amère, avait saisi la justice, qui l'avait déboutée.

L'une de ses dernières apparitions publiques remonte à la conférence de l'ANC en décembre à Johannesburg, où elle avait été saluée par des applaudissements nourris.

Connue pour ne pas mâcher ses mots, elle avait récemment dénoncé les échecs du gouvernement de l'ANC.

"La réconciliation n'a été qu'une façade", avait-elle asséné. "Je vis à Soweto, un township créé par le régime d'apartheid pour parquer les Noirs. Un quart de siècle après l'abolition de l'apartheid, il n'y a toujours pas un seul Blanc à Soweto (...) Où est le changement ?"

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 02/04/2018 à 14h29, mis à jour le 02/04/2018 à 17h47