Covid-19: quand la France prédit l’apocalypse en Afrique et se prépare à lâcher ses dirigeants

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Le 03/04/2020 à 13h59, mis à jour le 04/04/2020 à 13h00

La crise planétaire du Covid-19 pourrait mettre en faillite les économies de pays du continent. En France, le Quai d’Orsay met l'accent sur ceux qui devront être les nouveaux interlocuteurs de Paris sur le continent, en lieu et place des leaders politiques.

La France, l’un des pays les plus touchés par la crise sanitaire du coronavirus avec plus de 90.700 cas confirmés et plus de 4.500 décès, ne prédit rien de bon pour l’Afrique.

Selon une note diplomatique d'experts français du Centre d’Analyse, de Prévision et de stratégie (CAPS) qui relèvent du Quai d'Orsay, intitulée «“L’effet pangolin“: la tempête qui vient en Afrique?», publiée par Ecofin, agence d'informations spécialisées dans la gestion publique et l'économie africaine, cette crise du coronavirus pourrait être «la crise de trop» pour l’Afrique.

Selon ces experts, dont le centre se trouve sous la tutelle du ministère français de l'Europe et des affaires étrangères, les conséquences liées à la crise sanitaire du Covid-19 pourraient déstabiliser durablement, voire mettre à bas, des régimes fragiles du continent africain, et pourraient entraîner l’effondrement de plusieurs Etats, particulièrement ceux du Sahel et d’Afrique centrale, ou, en plus clair, ceux ayant fait partie dans le passé des colonies françaises en Afrique.

«L’onde de choc à venir du Covid-19 en Afrique pourrait être le coup de trop porté aux appareils d’Etat. Le taux de médicalisation est quasi-nul et les systèmes de santé nationaux peuvent être considérés comme saturés d’office», soulignent ces experts du Quai d’Orsay.

Toutefois, les conséquences liées au Covid-19 sur les économies africaines ne semblent pas concerner ces experts français, qui se focalisent sur le fait que «le Covid-19 se présente sous forme d’un chronogramme politique qui va amplifier les facteurs de crise des sociétés et des Etats».

Selon eux, cette crise «pourrait être le dernier étage du procès populaire contre l’Etat, qui n’avait déjà pas su répondre aux crises économiques, politiques et sécuritaires» antérieures. 

Comme les Programmes d’ajustement structurels (PAS) des années 80 qui ont emporté de nombreux dirigeants africains, le Covid-19 va déclencher des crises politiques qui pourraient prendre plusieurs formes, dont un nombre élevé de décès, notamment dans les anciennes colonies françaises fragilisées, le décès de personnalités politique issues du pouvoir ou des rangs de l'opposition, une situation qui cristalliserait la contestation, la contamination par le virus d’un président qui se trouverait être âgé, ce qui pourrait déstabiliser le système politique du pays qu'il dirige, et pousser vers une transition incertaine,...

De plus, le confinement des habitants dont les revenus sont tirés des activités informelles va saper l’équilibre social de certains pays, alors que les pays pétroliers d'Afrique centrale pourraient assister au départ de majors de l'extraction pétrolière, comme Total, et précipiter à l’effondrement des régimes.

Partant, des tensions pourraient apparaître dans les grandes agglomérations urbaines de ces pays, lesquelles seront amplifiées par les réseaux sociaux et par les effets des mesures de confinement sur la population.

En conséquence, tous ces facteurs risquent de «cristalliser l’ultime perte de crédit des dirigeants».

Face à cette situation, les experts français soulignent que les élites politiques africaines actuelles seront discréditées par les effets de la pandémie et devront faire face à la furie des populations et ils expliquent qu’«il convient de trouver d’autres interlocuteurs africains pour affronter cette crise aux conséquences politiques».

Toujours selon les experts du Quai d’Orsay, anticiper et avertir d'un possible discrédit des actuelles autorités politiques signifie accompagner en urgence l’émergence d’autres formes d’autorités africaines crédibles, pour s'adresser aux peuples afin d’affronter les responsabilités de la crise politique qui risque de «naître du choc provoqué par le Covid-19 en Afrique».

Plus grave encore, ces experts désignent clairement ceux qui devront être leurs futurs interlocuteurs, et les premiers remparts avec lesquels il faudrait dialoguer sont les autorités religieuses (Eglises et certaines confréries musulmanes) qui peuvent canaliser les «émotions populaires».

Ensuite, la diaspora vivant en Europe serait un relais entre la France et le continent. Puis, des artistes à la popularité reconnue, ainsi que des entrepreneurs et des hommes et femmes d'affaires néo-libéraux, qui se positionnent comme des philanthropes.

Une question se pose: quels rôles ces futurs interlocuteurs pourraient jouer dans ces Etats, alors en faillite?

Cette note émanant d'un cercle de réflexion agréé par Quai d'Orsay, ainsi que les propos proférés par un médecin et un chercheur français sur la chaîne française d'informations en continu LCI, appelant à des essais de vaccins sur les habitants d'Afrique sont là deux faits qui n’augurent rien de bon pour le continent, de la part de l’ancienne puissance coloniale, en perte de vitesse en Afrique devant l'appétit de la Chine, et, dans une moindre mesure, de la Turquie. 

Par Moussa Diop
Le 03/04/2020 à 13h59, mis à jour le 04/04/2020 à 13h00