- Hauts plateaux excentrés -
Le Tigré est l'une des dix régions administratives de l'Ethiopie, divisée selon un système dit de "fédéralisme ethnique".
La majorité de la population est composée de Tigréens, une minorité ethnique de quelque 6 millions de personnes, soit moins de 6% des 110 millions d'Ethiopiens.
Caractérisée par un paysage accidenté de hauts plateaux montagneux et de basses plaines, la région est située à l'extrême Nord de l'Ethiopie, à plus de 600 km d'Addis Abeba, la capitale fédérale.
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Elle jouxte, au nord, l'Erythrée, le frère ennemi dont la population est également en partie composée de Tigréens, qui parle la même langue, le tigrinya.
Sa capitale, Mekele, est située dans l'est du Tigré et comptait avant le début du conflit environ 500.000 habitants, soit moins de 10% de la population.
- Joyau culturel -
Le Tigré a joué un rôle majeur dans l'histoire, notamment religieuse, de l'Ethiopie et son patrimoine en fait aujourd'hui un haut-lieu de destination touristique du pays.
Classée au Patrimoine mondial de l'Unesco, la ville d'Aksoum était le cœur de l'Ethiopie antique, dont le puissant royaume du même nom (Ier-IXe siècles) fut christianisé par l'Eglise égyptienne au IVe siècle.
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La ville abrite notamment une obélisque haute de 24 mètres et datant de l'ère pré-chrétienne, probablement du 5e siècle avant Jésus-Christ.
Aksoum est également un lieu sacré pour les chrétiens éthiopiens orthodoxes, majoritaires, car l'empereur Menelik 1er, considéré comme le fils du roi Salomon et de la reine de Saba, y aurait selon la croyance rapporté de Jérusalem la célèbre Arche d'alliance, un coffre contenant les tables de la Loi.
Selon ce culte, l'arche y est encore aujourd'hui conservée - strictement à l'abri des regards - dans l'église Sainte-Marie-de-Sion d'Aksoum, le lieu le plus sacré de la religion éthiopienne.
Le Tigré compte également des dizaines d'églises séculaires creusées à même la roche, au sommet d'éperons rocheux parfois spectaculaires, ainsi que la mosquée Al-Nejashi, un lieu de pèlerinage pour les musulmans.
- Un centre économique -
Le Tigré est une région agricole produisant plusieurs cultures importantes comme le sésame (destiné à l'export), mais elle abrite aussi des industries d'échelle nationale.
La région s'illustre notamment dans le secteur du bâtiment, qui connaît une forte croissance dans le pays, avec les groupes Sur Construction, l'un des leaders, et Messebo Cement, n°1 du ciment.
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On peut également citer les entreprises Almeda Textiles, l'une des plus grandes usines textiles du pays, Ezana Mining, un important producteur d'or, ou encore Mesfin Industrial Engineering, qui entre autres activités assemblait il y a quelques années des voitures Peugeot en Ethiopie.
Ces cinq groupes tigréens font partie d'un ensemble de 38 entreprises dont les comptes bancaires ont été bloqués depuis la mi-novembre. Le procureur général d'Ethiopie les accuse d'être liées au Front de libération du Peuple du Tigré (TPLF), qui dirige la région.
- Pouvoir politique et militaire -
A travers le TPLF, le Tigré a dominé les structures politiques et sécuritaires de l'Ethiopie entre 1991 - date à laquelle il fait chuter le régime militaro-marxiste du Derg - et 2018 - l'arrivée du Premier ministre Abiy Ahmed au pouvoir.
A partir de cette date, ses dirigeants ont progressivement été écartés des responsabilités à Addis Abeba et sont passés de fait dans l'opposition, réduisant son influence politique.
Mais le TPLF domine toujours les instances régionales, qui disposeraient de forces armées allant jusqu'à 200.000 hommes (forces paramilitaires et miliciens), selon l'International Crisis Group (ICG), qui a interrogé des sources tigréennes.
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La Constitution éthiopienne donne aux régions la charge d'organiser leur sécurité mais cette dynamique a pris une tournure "exceptionnelle" au Tigré ces dernières années, note William Davison, de l'ICG.
Le TPLF reste influent au sein de l'appareil sécuritaire et militaire fédéral, où il compte encore des alliés, pas seulement tigréens, souligne de son côté le chercheur Roland Marchal.