Quelque 3.000 participants, dont plus d'un millier de jeunes du continent, sont attendus vendredi à Montpellier (sud) pour cette rencontre entre sociétés civiles africaine, française et de la diaspora, sur des sujets économiques, culturels et politiques, organisés en tables rondes.
Quatre ans après le discours de Ouagadougou du président français Emmanuel Macron, il s'agit "d'écouter la parole de la jeunesse africaine" et de "sortir des formules et réseaux obsolètes", souligne l'Elysée, en vantant le format "inédit" de l'événement. Sont en effet exclus les chefs d'Etat, pour la première fois dans l'histoire des sommets Afrique/France, ces grand-messes qui ponctuent depuis 1973 la relation tourmentée entre le continent et l'ex-puissance coloniale.
Le président français, lui, sera bien présent et dialoguera en session plénière vendredi après-midi avec des jeunes de douze pays africains, dont le Mali, la Côte d'Ivoire, la République démocratique du Congo, la Tunisie, l'Afrique du Sud, le Kenya... Ce panel a été sélectionné à l'issue des dialogues menés pendant des mois à travers le continent par l'intellectuel camerounais Achille Mbembe, chargé de préparer le sommet.
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Interventions militaires françaises, souveraineté, gouvernance, démocratie, "les sujets qui fâchent seront sur la table", assure l'Elysée, en reconnaissant que "le contexte politique actuel rend la discussion particulièrement sensible".
Au Sahel, où elle intervient militairement depuis 2013 contre les groupes terroristes, la France voit son influence contestée, notamment par la Russie, et Paris est à couteaux tirés avec le Mali depuis plusieurs mois. En Afrique du Nord, la relation toujours passionnelle avec l'Algérie est de nouveau secouée après des propos du président Macron jugés "insultants" et des réductions annoncées de visas.
Avancées symboliques, statu quo politique
Le soutien de Paris à des régimes autocratiques devrait aussi être abordé par les jeunes participants, que la présidence française dit considérer comme les nouveaux "acteurs du changement" en Afrique.
L'Elysée promet des "propositions concrètes", basées sur un rapport remis par Achille Mbembe au président Macron.
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Pour le philosophe canadien d'origine guinéenne Amadou Sadjo Barry, "depuis le discours de Ouagadougou, les lignes ont bougé sur le plan symbolique, il y a eu des gestes importants" comme la restitution de biens pillés au Bénin, l'annonce de la fin du franc CFA, la reconnaissance des "responsabilités accablantes" de la France dans le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994...
"Mais au plan de la politique étrangère, on ne peut pas parler de grandes mutations", ajoute-t-il, en rappelant notamment comment Emmanuel Macron a immédiatement avalisé la prise de pouvoir du fils Deby au Tchad en avril dernier.
Au-delà des grandes questions diplomatiques et politiques, des préoccupations quotidiennes devraient également être abordées, comme la difficulté d'obtenir des visas, sujet récurrent au sein de la jeunesse africaine. "Moi, j'aurais envie de dire aux autorités françaises: +vous savez, venir chez vous, c'est un choix que l'on paye cher, à tous points de vue+", raconte à l'AFP Marc, un Ivoirien étudiant en journalisme à Lannion, en Bretagne, qui a "galéré" plusieurs mois pour obtenir un visa et a investi toutes ses économies pour venir en France.
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"Il y a de bonnes intentions au sommet de Montpellier, mais il y a aussi toute une population invisible qu'on n'a pas invitée, les migrants", déplore pour sa part Anzoumane Sissoko, défenseur des sans-papiers et élu parisien. "Ce sont eux les vrais acteurs du développement, grâce à l'aide qu'ils apportent à leur famille en Afrique", estime cet ancien sans-papiers malien, aujourd'hui naturalisé français, qui voudrait "jeter des ponts entre la diaspora née en France et la jeunesse née en Afrique qui se jette en Méditerranée pour venir ici".
Si le format inédit de Montpellier permettra peut-être de dépoussiérer la relation franco-africaine, il n'en reste pas moins, pour le philosophe Barry, "une défaite symbolique pour l'Afrique elle-même". "Pourquoi est-ce encore en France que se discute l'avenir humain, politique, économique du continent africain? Pourquoi les gouvernements africains n'écoutent-ils pas eux-mêmes les préoccupations de leurs populations?", lance-t-il.