Mais, tandis que les forces fédérales considèrent le repli des Tigréens comme une preuve de leurs déconvenues militaires, un cessez-le-feu reste hypothétique.
Voici un résumé de la situation actuelle et des défis qui vont maintenant se poser.
Pourquoi les rebelles se sont-ils retirés?
Officiellement, le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) s'est retiré des régions voisines de l'Amhara et de l'Afar, où il avait progressé ces derniers mois, afin d'«ouvrir la porte» à l'aide humanitaire et à une cessation des hostilités.
Jusqu'ici, le TPLF qualifiait d'«absolument pas envisageable» un retrait de ces deux régions, réclamé par le gouvernement comme préalable à des négociations pour mettre fin à ce conflit démarré en novembre 2020.
«Aucune armée ne se replie par sa propre volonté. Les forces tigréennes ont été contraintes de le faire et le gouvernement fédéral et ses alliés le savent», analyse pour l'AFP Awet Weldemichael, spécialiste de la Corne de l'Afrique à l'université canadienne de Queen's.
Comment expliquer les succès militaires du gouvernement?
La bataille des airs a toujours été à l'avantage de l'armée fédérale, même lorsque le TPLF semblait prendre la main sur le conflit et affirmait se trouver à environ 200 km de la capitale Addis Abeba.
Contrairement aux rebelles, l'armée dispose d'avions de combats et de drones armés, qui ont bombardé le Tigré ces derniers mois. L'Ethiopie a notamment signé en août un accord de coopération militaire avec la Turquie.
«Le large déploiement de drones tueurs par Addis Abeba a été crucial pour handicaper les opérations mécanisées et la mobilité des véhicules tigréens», poursuit Awet.
Il ajoute que les troupes érythréennes, qui se battent aux côtés de l'armée depuis le début du conflit, pourraient aussi avoir joué un rôle clé dans la contre-offensive en aidant à «repousser physiquement» les rebelles, au sol.
La guerre se termine-t-elle?
Pas vraiment. Le gouvernement a annoncé vendredi que ses troupes n'avanceraient pas à l'intérieur du Tigré mais a ajouté que cette position pourrait changer si la «souveraineté territoriale» du pays était menacée. Il n'a pas non plus déclaré de cessez-le-feu.
Si elle se confirme, cette trêve de facto dans les combats pourrait calmer la situation mais les observateurs restent prudents avant d'envisager une fin prochaine du conflit.
«Le Premier ministre n'a pas fait de concession quand ses forces perdaient du terrain, pourquoi le ferait-il maintenant?», questionne Awet.
Quels sont les potentiels défis à venir?
Au sein d'une coalition qu'il dominait, le TPLF a régné pendant près de 30 ans d'une main de fer sur l'Ethiopie, jusqu'à l'arrivée au pouvoir de Abiy en 2018. Il a également mené la guerre sanglante face à l'Erythrée entre 1998 et 2000.
Le conflit en cours a exacerbé les rivalités ethniques. La tension entre les Tigréens et les Amhara - deuxième plus grand groupe du pays, allié des troupes fédérales - est particulièrement vive.
«Les Amhara sont très réticents à voir une réhabilitation du TPLF», pointe William Davison, analyste senior à l'International Crisis Group.
Le Tigré occidental, une zone revendiquée par les Tigréens et les Amhara mais occupée par ces derniers depuis le début de la guerre, devrait représenter un des principaux points d'achoppement en cas de négociations, ajoute-t-il.
Le TPLF a d'ores et déjà demandé au Conseil de sécurité de l'ONU le retrait des forces amhara et des troupes érythréennes du Tigré occidental.
«L'Erythrée et les Amhara voient tous le TPLF comme une menace existentielle», poursuit Davison.
Que peut faire la communauté internationale?
Malgré les embuches, une pause dans les combats peut constituer une opportunité de dialogue, face à une guerre qui a tué des milliers de personnes et créé une profonde crise humanitaire.
«C'est un moment opportun pour exercer une pression diplomatique», ajoute Davison.
Mais, ajoute-t-il, «il faudrait des efforts diplomatiques concertés pour encourager (les belligérants) à conclure un accord de cessation des hostilités et à ouvrir des négociations».
De plus, les efforts internationaux de médiation ont de grandes chances d'échouer s'ils n'impliquent pas l'Erythrée et son leader Issaias Afeworki, affirme Awet.
«Etant donné le rôle d'Issaias dans ce conflit et son influence sur Abiy, le refus de la communauté internationale d'impliquer de manière soutenable et constructive l'Erythrée reste un talon d'Achille majeur» des efforts diplomatiques.