Le journaliste Idriss Lissom, en service au Quotidien de l’Economie, a été violenté par des gendarmes et jeté en cellule lundi 27 août 2018. Son tort: avoir filmé une scène de racket des conducteurs de mototaxis au poste de contrôle de Boumnyebel, sur l’axe routier Yaoundé-Douala.
«Je suis arrivé au niveau du péage sur une moto. Les gendarmes ont demandé au moto-taximan qui me transportait de leur donner de l’argent pour pouvoir passer. Mais ce dernier n’en avait pas, car j’étais son premier client de la journée. Nous avons passé 25 à 30 minutes sur place à négocier pour qu’on le laisse passer», raconte le journaliste, joint au téléphone depuis Douala, dans la métropole économique où il venait de passer quelques examens médicaux suite à sa mésaventure.
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Pendant son immobilisation, Idriss Lissom observe une scène étrange: des «bendskineurs» -nom courant donné aux conducteur de mototaxi- sont contraints de donner chacun une somme de 500 francs CFA aux gendarmes pour avoir le droit de passer le poste de contrôle, défendu notamment par une herse de sécurité.
Il s’agit là visiblement d’un mécanisme d’arnaque mis sur pied par ces hommes en tenue pour extorquer de l’argent à ces propriétaires d’engin à deux roues dont la plupart, des jeunes notamment, ne disposent pas d’un permis de conduire. Face à cette pratique de corruption à ciel ouvert, le journaliste entreprend de filmer la scène avec son téléphone portable. Mal lui en a pris. Son geste ne va pas échapper à l’un des gendarmes, notamment celui en civil chargé de déployer la herse.
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«L’homme en civil m’a cravaté en me demandant pourquoi je le filmais. Il a été rejoint par un gendarme et tous deux ont commencé à me rouer de coups. Ils ont arraché mon téléphone de force», raconte le journaliste dont les doigts meurtris portent encore les stigmates de la violence subie. Il sera par la suite jeté en cellule.
Pendant sa «garde à vue», les gendarmes essaient de l’obliger à déverrouiller son téléphone portable, sans doute dans le but d’effacer toute «preuve» de leur forfait. En vain. «Je leur ai dit que je ne pourrai déverrouiller mon téléphone qu’en présence de mon avocat», affirme le journaliste. Il sera libéré près de trois heures plus tard, grâce à l’intervention du Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC). «J’ai eu le temps d’alerter ma rédaction avant qu’ils ne m’amènent au poste de commandement. Ma rédaction a, à son tour, alerté le syndicat qui a multiplié les appels pour qu’on me libère», confie Idriss Lissom. Son téléphone ne lui a cependant pas été rendu. Le journaliste entend intenter une action en justice, car «il ne faut pas laisser de telles pratiques prospérer», soutient-il.