Afrique: Top 5 des pays africains qui narguent la crise économique

Addis Abéba, capitale de l'Ethiopie.

Addis Abéba, capitale de l'Ethiopie.. DR

Le 05/08/2016 à 10h28, mis à jour le 14/01/2017 à 23h31

La crise économique mondiale et la chute des cours du pétrole affectent durement la croissance du continent. Toutefois, certains pays africains, tous non producteurs de pétroles, affichent des taux de croissance élevés et des perspectives prometteuses.

La chute des cours des hydrocarbures a porté un rude coup aux pays exportateurs d'or noir africain dont nombreux dépendaient uniquement de cette ressources faute d’avoir diversifier leur économie. C’est le cas de l’Angola, du Gabon, de l’Algérie, etc.

Heureusement, à l’opposé, des pays non producteurs de pétrole ont pu tirer leur épingle d’une conjoncture économique mondiale difficile en réalisant des taux de croissance élevés au cours de ces dernières années et pour lesquels les institutions financières internationales, malgré les révisions à la baisse des taux de croissance prévoient de très bonnes perspectives.

Partant des données de la Banque mondiale, 5 pays affichent des taux de croissance élevés dont certains frôlent les deux chiffres : Ethiopie, Côte d’Ivoire, République démocratique du Congo, Rwanda et Tanzanie. Des pays qui ont en commun le fait d’être non producteurs de pétrole. Il s’agit globalement de pays avant tout agricoles.

1- Ethiopie: le champion de la croissance africaine

Le barrage de la Renaissance.

C’est incontestablement le champion de la croissance en Afrique au cours de ces dernières années. Entre 2011 et 2015, le pays a enregistré un taux de croissance annuel moyen de 10,08%, soit le plus élevé du continent. Et globalement, l’économie éthiopienne repose sur l’agriculture qui pèse plus des 2/5 du PIB et 80% des exportations du pays.

Toutefois, au cours de ces dernières années, ce second pays le plus peuplé du continent après le Nigéria, a diversifié son économie et investi dans les infrastructures : barrages de la renaissance, tramway d’Addis Abéba, centrale hydroélectrique, chemin de fer, routes, etc. Autant d’investissements qui ont amélioré l’environnement des affaires et attiré de plus en plus d’investisseurs dont les chinois, les indiens et d’autres occidentaux séduits par la taille du marché et la hausse du niveau de vie des populations.

Pour 2016, la croissance sera contrariée par le phénomène El Nino qui a affecté profondément le secteur agricole qui concentre 75% des emplois. Toutefois, le pays devrait reprendre son trend normal d’une croissance à deux chiffres rapidement grâce aux réformes mises en place par les autorités et à l’augmentation de la consommation des ménages. La croissance devrait se situer autour de 9% en 2017 et 2018.

2- Côte d’Ivoire: l’éléphant de nouveau locomotive de l’Afrique de l’ouest

Après la pluie, le beau temps. Après une évolution négative du PIB de l’ordre de -4,4% en 2011, à cause de plus d’une décennie d’instabilité politique, la Côte d’Ivoire s’est engagée dans une course pour retrouver sa place de locomotive des économies de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Du coup, grâce à la paix retrouvée, aux réformes et avec l’appui des bailleurs de fonds, le pays a renoué rapidement avec la croissance. Entre 2011 et 2015, la croissance moyenne annuelle du PIB était de l’ordre de 9,2%, talonnant de près celle de l’Ethiopie.

Outre les contributions grandissantes des filières agricoles (cacao, anacarde, café, banane, ananas, etc.), le pays a aussi beaucoup investi dans les infrastructures (routes, autoroutes, ports, ponts, barrages hydroélectriques, ferroviaire, etc.) et a fortement amélioré son environnement des affaires (guichet unique, fiscalité avantageuse, etc.) pour attirer des investisseurs étrangers.

Après le succès du Plan national de développement (PND) 2012-2015, le pays a lancé un nouveau PND 2016-2020 avec des investissements programmés d’un montant global de 30.000 milliards de FCFA, soit 50 milliards de dollars.

Outre les importants investissements prévus dans les infrastructures, l’accent est désormais mis sur la transformation des produits agricoles locaux afin de booster l’industrie et la création des emplois.

Grâce à ce second plan, le pays compte maintenir son rythme de croissance et aller vers l’émergence. La Banque mondiale table sur un taux de croissance annuel moyen de 8,1% l’an sur la période 2016-2018.

3- République démocratique du Congo: les mines

Le pays a enregistré entre 2011 et 2015 une croissance annuelle moyenne d’environ 8%. La croissance est tirée par les industries extractives (or, cuivre, cobalt, diamant, étain, bauxite, fer, etc.), les transports, les télécommunications et les industries manufacturières (agro-industrie, textile, chimie, montage, etc.).

Cette croissance devrait s’améliorer pour se situer autour de 9% entre 2016 et 2018. Toutefois, ces prévisions s’avèrent aujourd’hui optimistes. Outre les baisses des cours de certains minerais, l’instabilité politique risque de perturber cette croissance. De même, l’insécurité dans certaines régions empêchent ce vaste et très riche pays d’exploiter largement son potentiel naturel. De même, l’absence d’infrastructures de base et le faible taux d’électrification, atténuent le potentiel de développement du pays.

Pour assurer une croissance dynamique et durable, ce pays, l’un des plu vaste et des plus peuplés du continent devra diminuer sa dépendance vis-à-vis du secteur minier et exploiter son immense potentiel agricole.

4- Rwanda: le modèle de bonne gouvernance

Si longtemps le Rwanda était devenu synonyme de génocide, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Le pays est désormais cité come exemple dans de nombreux domaines, notamment en matière de bonne gouvernance et de la qualité de son environnement des affaires.

Ainsi, le World economic forum, dans son édition 2014-2015, avait classé le Rwanda au 7e rang mondial (sur 144) des pays les mieux gérés, devant la Suisse (9e) et le Luxembourg (10e) et ce grâce au gaspillage très bas des ressources publiques.

Outre la bonne gouvernance, l’accent est mis également sur les nouvelles technologies de l’information qui touchent, directement ou indirectement, presque tous les aspects de la vie quotidienne (santé, éducation, services bancaires, etc.).

Le pays a entrepris de nombreuses réformes structurantes qui ont permis au pays de réaliser de bonnes performances économiques au cours de ces dernières années. Ainsi, entre 2011 et 2015, le taux de croissance annuel moyen s’est situé autour de 7,2%. Et la Banque mondiale prévoit une consolidation de cette croissance avec une hausse de 7,6% par an entre 2016 et 2018.

Ne disposant pas de ressources naturelles (pétrole, gaz et mines), le pays compte sur son agriculture qui pèse 33% du PIB et surtout sur les nouvelles technologies. Aujourd’hui, le secteur des services pèse 50% du PIB rwandais.

5- Tanzanie: un potentiel important non encore exploité

Le pays a affiché une croissance de l’ordre de 7% sur la période 2011-2015. Celle-ci est surtout tirée par les investissements publics dans les infrastructures.

L’économie tanzanienne repose essentiellement sur l’agriculture (coton, café, etc.) et les services (tourisme, télécommunications, finance, etc.) qui pèsent presque les 2/5 du PIB, presque autant que l’agriculture (43%). L’or constitue l’une des principales ressources exportées du pays.

Le pays peut doper davantage son économie en investissant dans le secteur agricole qui emploie plus de 75% de la population active qui souffre d’une productivité faible. Le pays dispose pourtant d’un potentiel agricole énorme. Le pays peut aussi compter sur un sous-sol riche et très faiblement exploité ou non exploité (fer, nickel, or, diamants, charbon, uranium, phosphates, etc.), du gaz, des hydrocarbures, etc.

Le pays peut aussi dans l’avenir compter sur les importantes découvertes de gisement de gaz naturel. Ainsi, la Banque mondiale table sur une croissance annuelle du PIB de l’ordre de 7,1% entre 2016 et 2018.

Toutefois, si le pays souhaite passer un cap au niveau de son développement, il doit surtout investir dans les infrastructures et l’énergie et améliorer l’accès de sa population à l’électricité. Le pays affiche un des taux d’électrification les plus faibles du continent.

A ces 5 pays, il faut ajouter le Mozambique qui affiche aussi une croissance de l’ordre de 7% avec toutefois un certain ralentissement en 2015 et 2016, grâce notamment aux ressources naturelles (charbon notamment) et aux découvertes du gaz. La croissance pourrait s’accélérer avec les découvertes de gaz dont les réserves annoncées devraient positionner le pays au 4e rang mondial derrière la Russie, l’Iran et le Qatar. Cette manne pourrait reconfigurer la trajectoire de développement du pays dans les années à venir, à condition que la bonne gouvernance suive.

Par ailleurs, pour un certain nombre de ces pays, ces croissances sont aussi l’effet d’un attrapage. C’est le cas notamment de la Côte d’Ivoire qui sort d’une longue période d’instabilité politique ayant affecté son économie. Pour d’autres, ces croissances fortes s’expliquent aussi par les niveaux de développement économique très bas qui permettent ce genre de sauts quantitatifs avec quelques changements structurels et une meilleure gouvernance. Il n’en demeure pas moins que dans tous les cas, ces performances sont à saluer.

Reste à relever le défi d'une meilleure répartition des richesses créées. Tout un autre programme.

Par Moussa Diop
Le 05/08/2016 à 10h28, mis à jour le 14/01/2017 à 23h31