La Banque mondiale appelle à une réforme du système financier ivoirien

Pierre Laporte, Directeur des opérations de la Banque mondiale pour la Côte d'Ivoire. . DR

Le 15/07/2016 à 16h42

Les Ivoiriens sont méfiants à l’égard de leur système financier. Bien qu’en pleine expansion, celui-ci reste «à la traine» comparé à celui d’autres pays de la sous-région, note la Banque mondiale dans un rapport publié ce 14 juillet. L'institution appelle à des corrections.

Un service financier plus performant et inclusif, voilà le levier sur lequel doit jouer la Côte d’Ivoire pour maintenir la dynamique d’une «croissance durable» selon la Banque mondiale. Dans un rapport dédié à l’économie ivoirienne publié ce 14 juillet, l’institution soutient qu’il s’agit de la voie qui «facilitera l’essor des entreprises tout en améliorant les conditions de vie de la population ivoirienne».Certes l’arrivée de nouvelles banques régionales, du phénomène de mobile money et d’établissements de microfinance a entraîné une envolée des crédits bancaires et un meilleur taux de bancarisation. Néanmoins, «le système financier est à la traîne en comparaison avec celui des autres pays à revenus intermédiaires en Afrique, ou à celui de pays comme le Sénégal ou le Togo», énonce la Banque mondiale.En cause, une certaine méfiance des Ivoiriens à l’égard du système financier. Seul un épargnant ivoirien sur huit choisit de placer ses économies dans une banque ou un établissement financier, note le document. «Les Ivoiriens hésitent encore à placer leurs économies dans les établissements financiers. Les pauvres préfèrent garder leur argent sous leurs matelas ou dans des épargnes communautaires (tontines). Les personnes les plus aisées investissent directement dans l'immobilier ou possèdent des comptes à l'étranger», explique Jaques Morisset, économiste en chef à la Banque mondiale et auteur du rapport.Or, même si l’économie «devrait conserver un rythme de croissance autour de 8 % dans les prochaines années», l’un des défis majeurs sera de «mettre en place un système financier performant et inclusif» afin de «mieux répartir les fruits de la croissance», avance Pierre Laporte, le représentant de la Banque mondiale.Comment changer alors la situation dans ces conditions ? Sur la question, trois pistes de solutions sont proposées. Rapprocher la clientèle des institutions financières, y compris les établissements de microcrédits, via la diversification des réseaux de distribution et des instruments financiers adaptés tels que le crédit-bail et l’affacturage. Ensuite mettre en place des instruments collectifs d'information visant à mieux cerner la qualité des demandeurs de crédits pour réduire les risques. Et enfin, «les compagnies de téléphonie mobile pourraient octroyer des crédits et les établissements de microfinance pourraient être autorisés à émettre des cartes bancaires de débit et de crédit».L’ensemble de ces mesures doivent toutefois se faire à la lumière «d’un cadre régulateur du marché financier pouvant de surcroît s’adapter aux innovations futures» avec «une surveillance» renforcée, suggère l’institution.La Côte d’Ivoire a enregistré ces cinq dernières années en moyenne 9% de croissance, et les projections tablent sur un rythme oscillant entre 8 et 9% d’ici 2020. Mais cette embellie est souvent critiquée en ce qu’elle n’est pas «inclusive», c’est-à-dire qu’elle profite peu aux populations, d’où la célèbre formule «on ne mange pas la croissance». Reste à espérer que la réforme du système financiers aide le pays à hâter le pas vers l’émergence tant attendue. 

Par Georges Moihet (Abidjan, correspondance)
Le 15/07/2016 à 16h42