Si Simone Gbagbo a échappé à l'extradition à la Cour pénale internationale (CPI), elle sera tout de même jugée en Côte d'Ivoire pour "crimes contre l'humanité". "La Cour a délibéré conformément à la loi et a décidé le rejet de la rétractation formulée par Mme Simone Gbagbo contre la décision du 17 mars 2016", a déclaré le juge, lors d'une audience publique."Je suis fortement déçu (...) la Cour suprême a rendu une décision politique" a réagi Me Rodrigue Dadjé, un des avocats de Mme Gbagbo."La conséquence est que Mme Gbagbo va être jugée aux assises pour crime de sang, probablement début mai", a-t-il poursuivi.
Le 27 janvier, la Chambre d'accusation avait renvoyé Simone Gbagbo, 66 ans, devant les assises pour "crimes contre l'humanité". Elle s'était alors pourvue en cassation. Mais le 17 mars, la Cour de cassation avait rejeté ce pourvoi, arguant que son mémoire avait été déposé "tardivement".Affirmant avoir déposé ce mémoire dans les temps, Me Dadjé avait contesté cette décision. Simone Gbagbo, épouse de l'ancien président Laurent Gbagbo - actuellement jugé à la Haye par la Cour pénale internationale (CPI) -, a été condamnée en mars 2015 à 20 ans de prison, notamment pour "attentat contre l'autorité de l'Etat", lors de la crise postélectorale de 2010-2011. Elle est actuellement incarcérée à Abidjan.Considérée comme une protagoniste majeure de la crise, l'ancienne "Dame de fer", à la personnalité très controversée, est également poursuivie pour "crimes contre l'humanité" par la CPI.Mais Abidjan refuse son transfèrement à La Haye malgré plusieurs requêtes de la Cour, affirmant être en mesure d'assurer à l'ex-Première dame une justice exemplaire sur le sol ivoirien."Les infractions pour lesquelles elle est poursuivie à Abidjan sont les mêmes que celles de la CPI. Or le principe de la CPI est ceci : ou vous jugez la personne, ou vous nous la remettez", avait expliqué un magistrat ivoirien ayant requis l'anonymat.Le président ivoirien Alassane Ouattara a affirmé début février qu'il "n'enverrait plus d'Ivoiriens" à la CPI, estimant que son pays avait désormais une "justice opérationnelle".La crise postélectorale est née du refus de Laurent Gbagbo de reconnaître la victoire d'Alassane Ouattara à la présidentielle de novembre 2010. Les violences avaient fait plus de 3.000 morts en cinq mois.
Si les deux camps se sont montrés coupables d'exactions pendant la crise de 2010-2011, aucun responsable pro-Ouattara n'a à ce jour été inquiété, ce qui nourrit les accusations par l'opposition de "justice des vainqueurs".