Les plus grands représentants de ce style musical au succès mondial, venu tout droit du Nigeria, le pays le plus peuplé du continent, dominent la toute nouvelle catégorie récompensant la «meilleure performance musicale africaine».
Sur les cinq titres nominés, quatre sont interprétés par des superstars de l’Afrobeats.
La présence d’Asake, Burna Boy, Davido et Ayra Starr à cette grand-messe de l’industrie musicale témoigne de l’influence croissante du soft power du Nigeria, via la musique mais aussi le cinéma et la mode, selon des responsables de ces secteurs interrogés par l’AFP.
«Nous sommes au sommet en ce moment. Notre travail pour que le Nigeria impacte l’industrie musicale a commencé depuis des décennies», déclare à l’AFP Titilope Adesanya, directrice des opérations de la branche Afrique du label américain Empire.
Avec plus de 223 millions d’heures d’écoute et 7,1 milliards de streams sur Spotify en 2023, l’Afrobeats est l’un des genres musicaux les plus en vogue au monde, selon les chiffres publiés sur le site de la plateforme d’écoute.
Depuis quelques années les grands noms de l’Afrobeats dont Burna Boy, Davido, WizKid, Tems et Rema, remplissent les plus grandes salles de concert au monde et collaborent avec des superstars mondiales comme Ed Sheeran, Beyonce, Selena Gomez et Justin Bieber.
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«La musique africaine est dominante depuis des années. Vous me demandez si nous aurions dû être reconnus avant? Certainement. Les choses prennent du temps», a confié Davido à France 24 lors d’une interview à propos des Grammys cette semaine avant de se produire dans le stade bondé Accor-Arena à Paris.
Il est en lice avec son morceau «Unavailable» dont la chanteuse Rihanna a affirmé en décembre qu’il était son «titre de l’année 2023».
L’artiste nigériane Ayra Starr espère remporter son premier Grammy avec son célèbre titre «Rush».
De son côté, la superstar Burna Boy, qui a déjà remporté le Grammy du meilleur album «musique du monde» en 2021, est nominé dans quatre catégories et chantera en live pendant la cérémonie.
Les Nigérians Asake et Olamide sont également dans la course avec leur chanson «Ampiano», faisant référence au style de musique house sud-africain.
«Cela ne peut être qu’une bénédiction pour l’Afrique dans son ensemble», dit à l’AFP Motolani Alake, coordinateur musical chez Virgin Music Afrique.
En 2021, Wizkid, autre géant de l’Afrobeats, a reçu le Grammy du meilleur vidéo-clip pour sa participation au titre de Beyoncé, «Brown Skin Girl».
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En 2023, la chanteuse Tems est devenue la première artiste nigériane à remporter un Grammy Award pour avoir co-écrit «Lift Me Up» de Rihanna pour le film «Black Panther: Wakanda Forever».
Le rôle de la diaspora
L’Afrobeats, qui mélange des rythmes traditionnels africains et pop contemporains, trouve ses racines au Nigeria dans les années 1970 sous l’influence de l’artiste Fela Kuti, père-fondateur de l’Afrobeat (sans «s»).
«L’Afrobeats contemporain existe depuis environ 20 ans grâce à des artistes nigérians comme D’Banj et le groupe P-Square. Le genre est aujourd’hui porté par toute une génération d’artistes nigérians», indique à l’AFP, Olivier Laouchez, patron du groupe de la chaîne musicale Trace.
Le Nigeria, avec une population de 200 millions d’habitants, jouit d’une importante diaspora qui joue un rôle indéniable dans l’essor de la musique nigériane.
Au-delà de sa consommation musicale, sa présence à des postes clés au Royaume-Uni et aux Etats-Unis a permis aux artistes nigérians d’accéder aux marchés internationaux, explique Abuchi Ugwu, PDG du label Chocolate City Music.
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Avec le temps, les stars de l’Afrobeats sont devenues des ambassadeurs de la mode nigériane, grâce à leurs nombreuses apparitions publiques et leurs clips visionnés des milliards de fois sur YouTube.
Outre la musique et la mode, le cinéma nigérian constitue aussi un outil d’influence majeur. Son industrie, Nollywood, est le deuxième producteur de films au monde après celle de l’Inde, Bollywood.
Aujourd’hui les plus grandes plateformes de streaming comme Netflix et Amazon Prime video ont pleinement incorporé les films à succès nigérians à leurs contenus.
Obi Asika, directeur général du Conseil national des arts et de la culture, espère que le succès du soft power du Nigeria se poursuivra et s’étendra à d’autres secteurs comme celui des jeux vidéo.
«Une chose dont nous disposerons, c’est une réserve inépuisable de talents», déclare M. Asika. «Au cours des cinq prochaines années, j’espère voir davantage de connexions avec le grand public.»
Verdict attendu dimanche soir, où les Nigérians seront peut-être adoubés, «Sittin’ on Top of The World» comme dans le titre-phare du dernier album de Burna Boy.