Ils sont plus de 2.000 chefs d’entreprises, investisseurs et décideurs politiques venus d’Afrique et du monde entier. Ils sont à Kigali pour le onzième sommet de l’Africa CEO Forum, qui se veut le plus grand rendez-vous international du secteur privé africain. Les enjeux sont de taille mais à lire le thème de cette année, il faut croire en l’avenir meilleur de l’Afrique pour s’asseoir aux côtés de ces gourous de l’entrepreneuriat, ou en être convaincu après avoir écouté quelques uns.
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Le premier décideur politique qui prend la parole, c’est bien sûr l’hôte, Paul Kagame, le président du Rwanda. Et quand il parle, on a vraiment envie de croire que l’Afrique peut prospérer malgré la misère dans laquelle une grande partie de sa population connaît. Tellement il y croit…
«Aujourd’hui, près de 20% de la population mondiale est africaine. D’ici 2050, ce sera 25%. Bientôt, la seule classe moyenne du monde qui continuera à se développer sera celle de l’Afrique. Au cours de ce siècle, l’Afrique sera de plus en plus l’un des moteurs économiques du monde. Mais pour devenir vraiment prospères, nous devons faire évoluer nos mentalités et viser la qualité et la complexité dans nos chaînes de valeur. Nous ne pouvons pas rester un endroit où les gens viennent ramasser des pierres du sol, que d’autres transforment ensuite en produits de haute technologie et nous les revendent. Ce n’est pas durable. Le message est simple et clair. Cela demandera beaucoup de temps et d’efforts, bien sûr, mais l’Afrique peut le faire (...) Tout ce qui peut être fait n’importe où dans le monde peut également être fait ici en Afrique.»
Des secteurs comme la santé, l’agriculture, l’énergie, l’éducation, et aujourd’hui, l’intelligence artificielle, cette nouvelle technologie qui change déjà tout sur son passage. L’Afrique a-t-elle vraiment les moyens de faire face à cette vague de changement alors qu’elle peine même à décoller dans plusieurs domaines? Makhtar Diop, directeur général et vice-président exécutif de l’IFC, International Finance Corporation, ou Société Financière Internationale, groupe de la banque mondiale, y croit malgré une multitude de défis.
«Au cours des cinq dernières années, nous avons été confrontés à des crises dans lesquelles les pays africains ont souffert du manque d’engrais, du manque de blé et ont été largement tributaires du reste du monde, et les fluctuations du marché mondial ont affecté la situation macroéconomique des pays. L’Afrique a des terres arables, elle a de l’eau et des habitants. Alors, pourquoi le continent ne pourrait-il pas produire des denrées alimentaires à un niveau qui nous permette de protéger notre situation macroéconomique, mais aussi d’améliorer le bien-être des populations? C’est quelque chose qui me tient très à cœur et je pense que c’est à notre portée.»
L’économiste croit que si certains pays ont pu avancer sur certains domaines importants, le reste du continent peut aussi le faire. Il a cité en exemple le Rwanda qui investit massivement dans le domaine de la santé, avec la construction de l’usine de fabrication de vaccins à ARN messager, le premier sur le continent. Ou encore le Nigéria et le Maroc dans le secteur des engrais, des projets phares dans lesquels la Société Financière Internationale a pu apporter des financements pour accompagner des États et le secteur privé. Selon lui (Makhtar Diop), il n’est plus question de dire que l’Afrique peut faire mais que l’Afrique est en train de faire.
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«Nous ne pouvons pas passer une autre décennie à parler de la faim et de l’insécurité alimentaire sur le continent. Il y a dix ans, nous avions ce slogan l’Afrique peut, aujourd’hui, nous ne pouvons pas répéter ce slogan. Celui d’aujourd’hui devrait plutôt être l’Afrique es». Pour signifier que l’Afrique est en train de créer des emplois pour ses jeunes, qu’elle se construit une croissance résiliente, qu’elle encourage un secteur privé robuste sans obstacles bureaucratiques, qu’elle nourrit une population en meilleure santé avec une durée de vie plus longue et qu’elle veille à ce que les femmes aient les mêmes droits et les mêmes possibilités de s’engager dans des activités productives.»
Le dernier speaker qu’on aimerait vous présenter s’appelle Tawfik Hammoud. Ce natif de l’Afrique est Chief Client Officer et Industry Practices Chair du Boston Consulting Group, BCG. Il siège au comité exécutif mondial du cabinet et est également membre du comité opérationnel du BCG. Lui aussi croit fermement que l’Afrique aura bientôt sa place à la table des puissances mondiales. «Permettez-moi de vous ramener mille jours en arrière. Peut-être le millier de jours le plus important depuis la Seconde Guerre mondiale. Il y a mille jours, la pandémie mondiale de covid-19 avait atteint son apogée. Les économies américaine et chinoise ne se découplaient pas, personne n’avait entendu parler du ChatGPT, l’inflation était faible, les taux d’intérêt étaient bas en Occident, les nations souveraines ne s’envahissaient pas les unes les autres en Europe et la perspective d’un accord de paix global au Moyen-Orient était bien réelle. C’était il y a mille jours et le monde a bien changé. C’est ce que nous appelons la grande remise à zéro. Cela rend le monde incroyablement compliqué à gérer pour les chefs d’entreprise et les dirigeants que vous êtes. Et pourtant, la plupart des défis mondiaux trouveront leurs solutions ici, en Afrique.»
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En cinq points, cet expert international explique clairement comment l’Afrique est la solution aux défis du monde moderne. De la géopolitique à la population jeune et croissante de l’Afrique en passant par l’intelligence artificielle, l’Afrique est aujourd’hui le continent le mieux adapté à porter le développement mondial et ainsi devenir une puissance globale.
D’une multitude d’entreprises africaines et internationales représentées à Kigali, le Maroc est représenté par OCP Africa, l’Université Mohammed VI Poltytechnique, Royal Air Maroc, et l’agence marocaine de développement des investissements et des exportations, Amdie entre autres. C’est la deuxième fois que Kigali accueille l’Africa CEO Forum, le rendez-vous qui rassemble une partie de celles et ceux qui dessinent aujourd’hui le visage de l’Afrique de demain.