La saga judiciaire que se livrent l’Etat angolais et Isabel dos Santos, fille de l’ancien président angolais José Eduardo dos Santos, décédé en juillet 2022, et ancienne présidente du groupe pétrolier Sonangol, pourrait connaître un nouveau rebondissement au niveau de la Haute cour de Londres où les deux parties se livrent une bataille acharnée dont l’issue risque d’être fatale à celle qui était considérée, jusqu’à récemment, comme étant la femme la femme la plus riche d’Afrique.
Et pour cause, cette nouvelle bataille juridique porte sur le gel portant sur des actifs évalués à 580 millions de livres sterlings, soit 736 millions de dollars, selon Reuters. C’est dire que l’enjeu de cette bataille est énorme pour la milliardaire qui pourrait perdre une importante partie de sa fortune.
Pour l’Etat angolais, il s’agit d’une fortune amassée dans des conditions douteuses et par la corruption durant les 38 ans de règne sans partage de son père sur l’Angola. Une période durant laquelle Isabel dos Santos a dirigé de nombreuses entreprises publiques dont l’opérateur telecom angolais Unitel, la compagnie nationale pétrolière Sonangol,…
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D’ailleurs, parmi les accusations portées à l’encontre d’Isabel dos Santos dans ce procès de Londres figure un prêt que l’opérateur telecom angolais Unitel avait consenti à la société néerlandaise Unitel International Holdings (UIH) qu’elle a contrôlé, en 2012-2013, lorsqu’elle dirigeait l’entreprise publique angolaise. Et quelque 300 millions de livres sterlings de ce prêt n’ont pas été remboursés, selon Unitel.
Isabel dos Santos rejette catégoriquement les accusations du gouvernement angolais arguant qu’elle est victime d’une «campagne d’oppression» de la part de l’Etat angolais. Il s’agirait, selon elle, ni plus ni moins que d’une vendetta politique initiée par le successeur de son père, João Lourenço, arrivé au pouvoir en 2017.
Et elle justifie l’incapacité de Unitel International Holdings à rembourser ses dettes auprès de l’opérateur angolais par le gel d’une partie de ses avoirs.
Un argument que réfute l’avocat de Unitel qui a estimé que l’accumulation des richesses d’Isabel dos Santos, était une «histoire classique de kleptocratie et de corruption».
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Isabel dos Santos est accusée d’avoir détourné, avec d’autres complices, plus d’un milliard de dollars des comptes de Sonagol (l’entreprise pétrolière angolaise) qu’elle dirigeait et de ceux d’Endiama (entreprise de diamant).
En 2020, le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) a accusé Isabel dos Santos d’avoir détourné d’importantes sommes des caisses du pays.
Pour rappel, Isabel dos Santos disposait d’une colossale fortune en Angola et au Portugal. Elle avait pris des participations dans divers secteurs dont les banques, les télécommunications… Les biens d’Isabel en Angola et au Portugal ont été gelés.
Et les autorités angolaises tentent de faire autant dans d’autres pays. En juin dernier, la justice néerlandaise avait reconnu Isabel dos Santos coupable d’avoir détourné plus de 50 millions d’euros de la compagnie pétrolière Sonangol.
A cause du gel de ses avoirs, la fortune de la première milliardaire d’Afrique ne cesse de fondre. En 2020, Forbes estimait sa fortune, évaluée en janvier 2020, à 2,1 milliards de dollars.
Après le gel de nombreux actifs, sa fortune a fortement chuté et certains organismes ont préféré la retirer de leurs classements des personnes les plus fortunées du monde. Et au cas où elle perdrait son procès à la Haute cour de Londres, sa fortune subira un rude coup.
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A noter que la fille ainée de l’ancien président angolais fait l’objet d’un mandat d’arrêt international lancé par l’Angola. Elle s’est alors réfugiée aux Emirats arabes unis, à Dubaï plus précisément, où elle bénéficie de la l’absence d’accord d’extradition entre Dubaï et l’Angola.
Rappelons que sous l’ancien régime de José Eduardo dos Santos, selon les calculs du Service national de recouvrement des avoirs angolais, 150 milliards de dollars ont été transférés à l’étranger entre 2001 et 2017. Ces fonds ont été détournés par les membres de la famille Dos Santos, d’anciens responsables gouvernementaux et d’ex-dirigeants de sociétés d’État. Sur ce montant, 16 milliards de dollars ont été récupérés, à fin février 2023, des négociations pour recouvrer des montants beaucoup plus importants sont en cours.
Outre Isabel dos Santos, Jose Filomeno dos Santos, fils de l’ancien président, a été condamné en 2020 à cinq ans de prison pour avoir détourné jusqu’à 1,5 milliard de dollars alors qu’il était à la tête du Fonds souverain angolais en charge d’investir une partie des revenus du pétrole.