Alors que le Ghana traverse l’une des pires crises économiques de son histoire avec une inflation à 26,4% en novembre, l’exploitation minière illégale, connue localement sous le nom de «galamsey», pose un problème majeur pour la culture du cacao, l’un des piliers de l’économie nationale aux côtés de l’or et du pétrole.
«Au cours des cinq dernières années, nous avons connu de graves destructions dans les exploitations de cacao en raison des activités des mineurs illégaux», a déclaré à l’AFP Michael Kwarteng, directeur chargé des activités de lutte contre l’exploitation minière illégale à l’office ghanéen du cacao (COCOBOD).
«Cela a atteint une proportion alarmante», insiste-t-il.
Face à la crise économique, un nombre croissant de producteurs revendent leurs terres à des mineurs illégaux, comme Rita Abena Koranteng, 45 ans, cultivatrice de cacao à Suhum, dans la région orientale du Ghana, qui a cédé deux de ses terrains à son oncle pour qu’il en exploite le sous-sol.
«Chaque mois, il me verse 500 dollars et je suis heureuse, car je n’aurais jamais pu gagner autant d’argent avec mon activité de cacaocultrice», explique-t-elle.
«Je sais que certains de mes collègues producteurs de cacao de la région occidentale et d’autres endroits sont passés à la plantation d’hévéas parce que le cacao ne leur rapporte pas assez», soutient-elle.
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Le gouvernement, qui achète l’intégralité de la production du pays avant de la revendre à des sociétés privées, a consenti cette année une augmentation de 63% du prix payé aux producteurs, mais cela ne suffit pas à les dissuader de vendre leurs terres à des fins d’exploitation minière non déclarée. Actuellement, il achète la tonne de cacao à 1.822 dollars (1.670 euros) aux producteurs.
«Jusqu’à présent, les terres perdues à cause de l’exploitation minière illégale représentent 2% de la surface totale de culture du cacao au Ghana. Nous ne pouvons plus permettre que cela continue», s’inquiète Michael Kwarteng.
Selon le COCOBOD, le Ghana a récolté 1 million de tonnes de cacao entre 2020 et 2021. Mais ce chiffre tombe à 750.000 tonnes pour la récolte de 2022-2023 et sa prévision pour 2023-2024 oscille entre 650.000 et 700.000 tonnes en raison de l’impact des activités illicites.
«Bombe à retardement»
Outre la perte de terres agricoles, les activités minières contribuent également à la pollution des cours d’eau et nappes phréatiques en raison de l’utilisation de produits chimiques pour l’extraction.
Obed Owusu-Addai, chargé de campagne à EcoCare Ghana, une organisation qui milite pour le bien être des agriculteurs, estime que le gouvernement doit encore améliorer les prix et le niveau de vie des agriculteurs.
«Nous sommes assis sur une bombe à retardement en tant que pays», s’alarme-t-il.
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«Si ce problème n’est pas résolu immédiatement, nous finirons par perdre la plupart de nos terres au profit de l’exploitation minière illégale», ajoute-t-il.
Benjamin Tei Larweh, directeur adjoint de la communication au COCOBOD, indique que l’organisation a commencé à offrir des récompenses en espèces aux personnes qui signalent de l’exploitation minière illégale sur les terres cacaoyères, mais aussi la contrebande de fèves, un autre problème pour le secteur.
«En 2022, le Ghana a perdu environ 150.000 tonnes métriques de fèves de cacao en raison de la contrebande avec nos voisins, ce qui représente un revenu colossal de 600 millions de dollars qui s’est envolé», précise-t-il.
Autre défi pour la filière: le changement climatique, qui a aussi un fort impact sur la culture de cacao.
Six grandes régions du Ghana cultivent la précieuse fève: les régions de l’Est, d’Ashanti, de Brong Ahafo, du Centre, de la Volta et de l’Ouest.
Mais en raison de la fluctuation des précipitations et de la baisse de la fertilité des sols, la production s’est déplacée vers l’ouest. La région occidentale est aujourd’hui le principal producteur de cacao du Ghana, avec 43% du total.