Sur les cinq dernières années, une tendance à la hausse des IDE des pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) est observée dans un certain nombre de pays africains. En phase avec ce constat, les relations économiques et commerciales entre l’Afrique et les pays du Golfe (Émirats arabes unis, Arabie saoudite, Qatar, Oman, Koweït et Bahreïn) connaissent un essor remarquable.
Selon un Flashnote publié ce mois de décembre 2024 par Afreximbank intitulé «Rising Gulf Investments in Africa: Unlocking Opportunities and Navigating Challenges», en 2023, les cinq principaux pays africains exportateurs vers les pays du Conseil de Coopération du Golfe (CCG) représentent une part très significative des exportations totales du continent à destination de cette région. Ensemble, l’Égypte, l’Afrique du Sud, le Soudan, l’Érythrée et le Botswana concentrent près de 60% de la valeur totale des biens exportés d’Afrique vers les pays du Golfe cette année-là.
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L’Égypte arrive en tête avec 21,4% des exportations, soit une valeur de 14,8 milliards de dollars. Cette performance s’explique par les importants volumes de produits pétroliers et gaziers qu’elle expédie vers les marchés du Golfe. L’Afrique du Sud suit avec 12% des expéditions (8,3 milliards de dollars), tirées principalement par les ventes de minerais, de produits agroalimentaires et de véhicules.
Le Soudan, riche en ressources naturelles, pèse pour 11,6% (8 milliards de dollars), ses exportations étant dominées par l’or, le coton et les produits agricoles. L’Érythrée représente 9,5% (6,6 milliards de dollars), profitant de ses exportations minières, notamment de métaux précieux et de sel. Enfin, le Botswana complète ce top 5 avec 5,6% (3,9 milliards de dollars), grâce à la vente de diamants, de viandes et de produits agroalimentaires.
La prédominance de ces pays réside donc dans la complémentarité entre les ressources naturelles et produits de base africains d’un côté, et les besoins de consommation et d’approvisionnement en matières premières des économies prospères du Golfe de l’autre. Connaître ces principaux exportateurs revêt un intérêt stratégique dans le contexte actuel où «l’Afrique attire des intérêts commerciaux et d’investissements significatifs des puissances mondiales cherchant à accéder à ses ressources naturelles abondantes.»
Ressources naturelles et produits agricoles
La nature de ces exportations est principalement liée aux ressources naturelles et produits alimentaires dont regorge le continent africain. «L’Égypte, l’Afrique du Sud et le Soudan exportent essentiellement des produits pétroliers, tandis que l’Érythrée et le Botswana misent sur les minerais et les produits agricoles», précise le rapport.
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Ces flux commerciaux ont connu une croissance fulgurante ces cinq dernières années, les exportations totales africaines vers le CCG passant d’environ 28 milliards de dollars en 2016 à près de 70 milliards de dollars en 2023. Cependant, des défis persistent comme «les contraintes logistiques, les procédures commerciales opaques et les normes techniques divergentes qui entravent une intégration économique plus poussée.»
Ce flashnote souligne l’importance stratégique pour l’Afrique de «tirer parti de ce partenariat afin d’attirer davantage d’investissements directs étrangers (IDE), d’améliorer la sécurité alimentaire et de développer les infrastructures, renforçant ainsi la résilience économique.»
L’autre constat qui ressort de l’analyse des exportations africaines vers le CCG est que, de 2016 à 2023, les Émirats arabes unis ont capté environ 85% de ces exportations, l’Arabie saoudite 12%, tandis que le Qatar, Oman, le Koweït et Bahreïn se partagent les 3% restants.
Les cinq principaux bénéficiaires des IDE
Concernant les IDE, en 2022, les cinq principaux bénéficiaires des investissements en provenance des pays du Golfe en Afrique étaient l’Égypte, l’Afrique du Sud, l’Éthiopie, le Sénégal et le Maroc. L’Égypte a attiré 25% des flux, soit plusieurs milliards de dollars, principalement dans les secteurs de l’énergie, des infrastructures et de l’immobilier. L’Afrique du Sud a capté 20% de ces investissements qui ont ciblé les mines, les services financiers et les télécommunications.
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L’Éthiopie (8%), pays en plein essor, a bénéficié des IDE du Golfe notamment pour développer ses infrastructures aéroportuaires, routières et agricoles. Le Sénégal (6%) et le Maroc (5%) ont également été destinataires de capitaux importants du CCG dans l’immobilier, le tourisme et les énergies renouvelables.
L’année qui a suivi, soit en 2023, les pays du Golfe ont renforcé leur présence avec 73 nouveaux projets d’investissement annoncés sur le continent africain, pour un montant total dépassant les 53 milliards de dollars. Ces projets plurisectoriels concernent autant les infrastructures énergétiques que les industries extractives, la logistique, l’agroalimentaire ou encore l’économie numérique et les nouvelles technologies. Sur les cinq dernières années, une tendance à la hausse des IDE du CCG est observée dans ces pays, quoique plus modérée en Afrique du Sud.
Cette accélération des IDE du Golfe en Afrique s’inscrit dans une stratégie de diversification économique des pétromonarchies qui cherchent à sécuriser leurs approvisionnements alimentaires et en matières premières, tout en ouvrant de nouveaux débouchés pour leurs capitaux.
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Ces IDE contribuent au développement économique par la création d’emplois, le transfert de technologies, l’augmentation des recettes fiscales et la diversification sectorielle. Quelques projets majeurs en 2023 comprennent la zone industrielle saoudienne en Égypte, l’extension du port de Ndayane au Sénégal par DP World, une entreprise basée à Dubaï spécialisée dans la gestion de ports et de terminaux, ou encore le pipeline d’exportation de gaz naturel liquéfié du consortium QatarEnergy-ExxonMobil en Éthiopie.
Parlant de l’extension du port de Ndayane au Sénégal, l’investisseur dubaïote vient d’annoncer l’arrivée du drague Willem Van Rubroeck à Ndayane. Ce qui marque le début des travaux maritimes pour le port de Ndayane, d’un montant de 1,2 milliard de dollars, un projet destiné à transformer le Sénégal en un important centre de commerce mondial.
Néanmoins, les défis pour les investisseurs du Golfe persistent, comme l’instabilité politique et réglementaire, les risques sécuritaires, la corruption, les infrastructures déficientes et le manque de main-d’œuvre qualifiée dans certains pays.
Les opportunités à saisir résident dans la demande croissante en infrastructures, en énergies renouvelables et en technologies agricoles, ainsi que les efforts d’intégration économique régionale comme la Zone de libre-échange continentale.
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À l’avenir, les relations économiques Afrique-CCG devraient se renforcer davantage. Les projections indiquent que le PIB africain connaîtra une croissance annuelle de 4 à 5% d’ici 2027, tandis que les pays du Golfe cherchent à diversifier leurs économies au-delà des hydrocarbures, conclut le rapport d’Afreximbank.
Principaux exportateurs africains vers le CCG en 2023
Pays | Part dans les exportations (en pourcentage) | Rang |
---|---|---|
Égypte | 21,4 | 1er |
Afrique du Sud | 12 | 2ème |
Soudan | 11,6 | 3ème |
Erythrée | 9,5 | 4ème |
Botswana | 5,6 | 5ème |
Angola | 5,3 | 6ème |
Zimbabwe | 4,9 | 7ème |
Libye | 3,4 | 8ème |
Ghana | 3,4 | 9ème |
Ethiopie | 2,8 | 10ème |
Source : Direction du commerce du FMI.