Les planteurs de café et de cacao peuvent pousser un ouf de soulagement. Le gouvernement a fixé à 1.800 francs CFA le kilogramme de cacao (soit 2,70 euros) contre 1.000 F la campagne précédente, un montant record dans l’histoire des cours du cacao du premier producteur mondial de cette fève. «Le gouvernement a décidé d’une hausse de 20%», a déclaré Adjoumani Kouassi, ministre de l’Agriculture lors des Journées du cacao et du café qui se sont achevées fin septembre dernier.
Pour connaître l’avis des premiers concernés par cette nouvelle tarification, Le360 Afrique s’est rendu au village de Abié, dans la région de la Mé au sud-est de la Côte d’Ivoire à environ une centaine de kilomètres d’Abidjan. Dans ce village, plusieurs paysans possèdent au moins une portion de plantation de cacaoyers, leur source de revenus. Kolari Kossi, producteur et acheteur de cacao, se réjouit de ce nouveau prix. «C’est une bouffée d’oxygène pour nous les planteurs.»
Depuis plusieurs années, les producteurs subissent de plein fouet les fluctuations du marché international et les défis propres au pays. «Le passage de 1.000 à 1.800 FCFA nous redonne espoir, mais ne suffit pas à dissiper toutes les inquiétudes. Nos routes sont en mauvais état, souvent impraticables et donc difficile pour acheminer les productions au village», décrie-t-il.
En avril 2024, le prix d’achat pour la récolte intermédiaire, qui durait jusqu’à septembre, avait été fixé à 1.500 francs CFA soit 2,20 euros, un montant déjà historique. En 2023, le prix était de 1.000 francs CFA soit 1,50 euro le kilo.
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Si cette hausse est saluée par tous, d’autres estiment par contre qu’il faut aller encore plus loin. Plusieurs producteurs, interrogés dans la région de la Mé, plaident pour un prix au kilo de 2.000 FCFA, voire plus. Pour eux, cette somme permettrait de mieux faire face aux nombreuses charges auxquelles ils sont confrontés et auxquelles il faut ajouter les conditions climatiques défavorables.
Une baisse de la production mondiale de cacao, due en Côte d’Ivoire et au Ghana au dérèglement du climat, affectant les récoltes. «On s’attendait à 2.000 francs (3 euros) ou 2.500 francs (3,5 euros)», déplore Béda Richard, producteur car «aujourd’hui, la vie est chère, les produits de traitement coûtent cher et à cela vient s’ajouter le changement climatique qui affecte beaucoup nos cacaoyers qui meurent en nombre au fil des ans». Et à Kouamé Marius, également planteur de renchérir, «on est satisfait, mais c’est une satisfaction mitigée», affirme-t-il.
Les difficultés logistiques restent un point sensible. Les routes, souvent dans un état déplorable, rendent difficile l’accès aux plantations et le transport des récoltes vers les centres de collecte (coopératives). Par ailleurs, les effets du changement climatique ajoutent une couche supplémentaire de complexité. La baisse de la productivité et la destruction progressive des cacaoyers sont autant de défis auxquels les producteurs doivent faire face.
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Les planteurs estiment que le gouvernement doit accentuer son soutien pour permettre à la filière de rester compétitive à l’international. Si l’augmentation du prix est un pas dans la bonne direction, la demande pour un prix à 2.000 FCFA, 2.500 francs (3,5 euros) est un appel à une réforme plus profonde.
Les producteurs espèrent que cette hausse se traduise par une meilleure prise en compte de leurs besoins en termes d’infrastructures, de subventions pour les intrants agricoles et de protection contre les aléas climatiques.
Notons que les producteurs de cacao et de café, détenteurs de la carte de producteurs, bénéficieront de la gratuité de la couverture maladie universelle (CMU), subventionnée par le Conseil café-cacao, organisme chargé de réguler ces deux secteurs.
Le nouveau prix du cacao de 1.800 FCFA redonne sans aucun doute le sourire à de nombreux planteurs ivoiriens. Cependant, ces derniers lancent un appel aux autorités pour qu’elles prennent en considération les défis persistants auxquels ils sont confrontés.
Le cacao ivoirien représente 45% de la production mondiale (soit plus de 2 millions de tonnes) et participe à hauteur de 14% du PIB. En Côte d’Ivoire, le cacao génère environ un million d’emplois et fait vivre 5 millions de personnes pour une population de 30 millions d’habitants.