Mauritanie: les marchés de légumes de Nouakchott impactés par les tensions sur les prix au Maroc

Le 10/02/2023 à 15h54

VidéoLa plus grande quantité de légumes consommée en Mauritanie est importée du Maroc. Mais des informations rapportées par des grossistes marocains à Nouakchott font état de restriction des exportations de légumes, une décision qui serait motivée par une année de sécheresse suivie par la vague de froid que connaissent plusieurs régions du royaume, réduisant ainsi l’offre marocaine.

La tension sur le marché des légumes qui prévaut actuellement au Maroc impacte directement les consommateurs ouest-africains, notamment en Mauritanie, au Sénégal et au Mali. Ces pays sont approvisionnés, dans des proportions importantes, en légumes (carottes, tomates, oignons, choux, pommes de terre...) et certains fruits (oranges, mandarines...) à partir du Maroc.

Or, après deux années de sécheresse, la production agricole marocaine a été durement affectée. La culture de certains produits agricoles exigeants en eau a été réduite au profit d’autres spéculations nécessitant moins d’eau. A ce stress hydrique sont venus se greffer la vague de froid qui sévit actuellement au Maroc et l’envolée des prix de certains intrants (engrais, carburants...), dans le sillage de la flambée des prix mondiaux, a aussi impacté sur la production agricole.

Conséquence, une forte tension sur le marché marocain de produits agricoles où les prix de nombreux légumes ont flambé au cours de ces dernières semaines.

Une situation qui commence à se faire sentir en Afrique de l’ouest, notamment en Mauritanie, au Sénégal et au Mali, au moment où certains importateurs de ces pays font état de restriction aux importations de certaine légumes en provenance du Maroc dont l’oignon, la tomate...

Un tour au «marché marocain de Nouakchott», la capitale mauritanienne permet de jauger la situation de tension sur l’offre de légumes marocaines et les risques d’une envolée des prix à la veille du mois de ramadan.

Pour Sallah Eddine, grossiste marocain opérant à Nouakchott et membre d’un important réseau approvisionnant l’Afrique de l’ouest, plaide en faveur de la poursuite des exportations de légumes du royaume vers la Mauritanie et les autres pays de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

Pour étayer ses assertions Sallah Eddine évoque l’importance des revenus tirés de cette activités, mais aussi et surtout, la place qu’occupent ces produits dans l’équilibre alimentaire et la stabilité sociale des peuples frères vivant dans les pays de destination.

Pour ces raisons, le grossiste marocain en appelle aux autorités de son pays pour la levée de cette restriction, qui ne dit pas son nom, ce qui permettrait la poursuite des relations d’affaires qu’il a développée avec ses clients mauritaniens. «Il nous arrive d’écouler nos marchandises à crédit. Si ces relations sont suspendues, nous risquons de ne pas récupérer notre dû» dit-il.

Dans le même sens, Bel Id Ammy, également grossiste marocain exerçant dans le même marché, reconnait à mots couverts un début de tension sur le marché des légumes, avec certains produits qui commencent à manquer entrainant une hausse du prix des pommes de terre et de l’oignon.

Ce négociant relativise le début de la crise sur le marché de Nouakchott et replace ces difficultés dans un contexte économique mondial trouble avec des conséquences sur tous les secteurs d’activités.

Cette hausse des prix se fait ressentir sur le couffin de Saïda Hassan, une ménagère rencontrée dans le même marché aux fruits et légumes. Un panier qu’elle a du mal à remplir: «le prix de la pomme de terre est passé de 400-500 ouguiyas (près de 13 dirhams) à 700 ouguiyas (20 dirhams), le kilo. Pareil pour le chou dont le kilo a grimpé à 300 ouguiyas au lieu de 200. Les prix sont trop élevés et nous ne voyons pas encore ne serait-ce que des prémices de baisse».


Par Amadou Seck (Nouakchott, correspondance)
Le 10/02/2023 à 15h54