La crise multidimensionnelle que traverse la Tunisie risque de s’aggraver dans les semaines et mois à venir. Et le fiasco des dernières législatives, avec un taux de participation dépassant à peine 10%, ne va pas améliorer les relations avec les bailleurs de fonds occidentaux alors que l’examen de son dossier au niveau du Fonds monétaire international (FMI) est remis aux calendes grecques.
Cette situation inquiète Moody’s. L’agence de notation américaine a annoncé que le retard occasionné par la déprogrammation de l’examen final du dossier de prêt de 1,9 milliard de dollars par le Conseil d’administration du FMI va se traduire par une dégradation de la note souveraine de la Tunisie. Sous examen en vue d’une dégradation, celle-ci est actuellement de Caa1, soit une des notes les plus mauvaises pouvant être accordées à une obligation ou à un débiteur de la part de l’agence de notation.
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L’inquiétude de Moody’s s’explique par le fait que cette déprogrammation va aggraver la situation financière de la Tunisie en accentuant les risques de liquidités de plus en plus élevés. En effet, sans cette manne du FMI, il sera difficile pour la Tunisie d’attirer de nouveaux fonds supplémentaires de la part des partenaires multilatéraux et bilatéraux.
Sans ces avoirs extérieurs, la Tunisie aura du mal à boucler son budget 2022, notamment du fait des tombées importantes de dette de fin décembre 2022. De même, sans cet accord, il sera difficile pour le pays de sortir sur le marché de la dette privée. Il faudra donc puiser dans les réserves en devises pour rembourser la dette et éviter le défaut de paiement. C’est dire qu’en cas de retard dans les négociations prochaines avec le FMI, la crise financière que traverse le pays risque d’être intenable.
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Les réserves en devises de la Tunisie se situent actuellement autour de 6,4 milliards de dollars, soit 20 milliards de dinars tunisiens, n’assurant qu’à peine 3 mois d’importation de biens et services. Et le trend baissier de ses avoirs extérieurs devrait s’accélérer dans les semaines à venir. Il faut dire qu’hormis les transferts de la diaspora tunisienne qui continuent de croître, les ressorts leviers de l’apport en devises sont en panne. Il s’agit du tourisme qui n’arrive pas à retrouver son niveau d’avant Covid-19, les prêts extérieurs en quasi-arrêt depuis, les exportations en panne… A l’opposé, la facture des importations et le service de la dette continuent de grever fortement le budget de l’Etat.
Les autorités tunisiennes ne semblent pas avoir pris l’ampleur de la crise que traverse le pays, à moins qu’elles ne soient dépassées par la situation. D’ailleurs, signe que quelque chose ne tourne pas rond, c’est ce mercredi 21 décembre que le gouvernement tunisien a examiné et adopté le projet de décret-loi sur la Loi de finances 2023. Or, ce document devrait figurer en bonne place parmi ceux que le Conseil d’administration du FMI devrait examiner pour valider l’octroi du prêt de 1,9 milliard de dollars.