Nations unies: ces 4 pays africains qui ne font plus partie des États les moins avancés

Le Botswana, le Cap-Vert, la Guinée équatoriale, Sao Tomé-et-Principe sont les 4 pays africains ayant réussi jusqu’à présent à se hisser en dehors de la catégorie onusienne des pays les moins avancés.

Le 21/12/2024 à 11h22

Seulement huit pays, dont quatre africains, ont réussi jusqu’à présent à se hisser en dehors de la catégorie onusienne des pays les moins avancés. D’autres comme le Rwanda, l’Ouganda et la Tanzanie pourraient les rejoindre dès 2027.

Du nouveau chez les pays africains ayant réussi à quitter le groupe des pays les moins avancés (PMA). Sao Tomé-et-Principe vient de franchir une étape historique en devenant le 8ème pays à sortir de la catégorie des pays les moins avancés (PMA) établie par l’ONU. À l’échelle africaine, il s’agit du 4ème pays. Après le Botswana en décembre 1994, le Cap-Vert en décembre 2007 et la Guinée équatoriale en juin 2017, Sao Tomé-et-Principe, petite nation insulaire d’Afrique centrale, rejoint les rangs d’une poignée d’États ayant réussi à émerger de ce statut réservé aux économies les plus vulnérables.

Qu’est-ce qu’un PMA? Il s’agit d’une classification onusienne englobant les pays confrontés à des défis structurels majeurs au développement en raison de leur faible revenu par habitant, de leurs ressources humaines limitées et de leur forte vulnérabilité économique et environnementale. En 2024, 45 pays dont 33 africains figurent sur cette liste.

Pour Sao Tomé-et-Principe, cette «graduation» récompense des progrès économiques, sociaux et humains notables. Entre 2020 et 2022, son revenu national brut par habitant a dépassé les 2.271 dollars, bien au-delà du seuil de sortie fixé à 1.306 dollars. Son indice de «capital humain», mesurant l’éducation et la santé, a bondi à 91,4 contre un seuil requis de 66.

«Cette avancée est un témoignage des accomplissements économiques du pays, mais son développement futur n’est pas sans défis», nuance toutefois la CNUCED, agence de l’ONU chargée du commerce et du développement. Pour cause, l’archipel demeure tributaire de ses exportations de cacao et vulnérable à la dette et aux chocs climatiques.

Fin de l’aide concessionnelle

Au-delà du symbole fort, cette «graduation» implique en effet de lourdes responsabilités. L’ancien PMA pourrait voir son accès à certains mécanismes internationaux d’aide, comme les préférences commerciales ou le financement concessionnel, se réduire. «Le pays a donc besoin d’une approche stratégique pour gérer efficacement cette transition et en atténuer les impacts négatifs sur son économie», prévient la CNUCED, qui compte d’ailleurs poursuivre son assistance technique. Un défi que les trois autres pays africains «diplômés» ont également dû relever: le Botswana, le Cap-Vert, et la Guinée équatoriale. Le Bhoutan, le Vanuatu, les îles Samoa et les Maldives font aussi partie de ce club fermé. Mais eux ne sont pas africains.

Les trois critères de sortie

Pour y accéder, la procédure onusienne est rigoureuse et s’appuie sur trois critères clés évalués tous les trois ans: le revenu national brut par habitant, l’indice de capital humain (santé, éducation) et l’indice de vulnérabilité économique et environnementale. Un pays doit franchir au moins deux de ces trois seuils de «graduation» pendant deux cycles consécutifs pour être éligible, à moins d’avoir un revenu par habitant plus de trois fois supérieur à la limite haute.

Concrètement, la sortie du groupe des PMA a constitué un immense défi de diversification pour ces économies jusque-là très dépendantes d’un nombre restreint de produits de base. Ainsi, les exportations pétrolières représentaient plus de 90% des ventes extérieures de la Guinée équatoriale avant son reclassement en 2017.

« Cela devient plus urgent aujourd’hui car cette forte dépendance rend le pays très vulnérable aux chocs liés aux prix du pétrole dont les réserves devraient être épuisées d’ici quelques décennies », soulignait récemment la CNUCED, appelant à une « modernisation majeure du secteur agricole et une diversification des activités rurales ».

L’amélioration du capital humain (santé, éducation) a également été un objectif central, avec des progrès notables comme l’illustre la chute de 43% du taux de mortalité infantile en Guinée équatoriale durant les années 2000. Dernière priorité : le renforcement de la résilience de ces économies très exposées aux cocs exogènes.

Le Rwanda, l’Ouganda et la Tanzanie susceptibles de sortir du statut de PMA en 2027

Autant d’enseignements précieux pour les prochains pays africains sur la rampe de lancement. Lors de l’examen triennal de 2024, le Rwanda, l’Ouganda et la Tanzanie sont apparus comme de sérieux candidats à une prochaine sortie du statut de pays les moins avancés (PMA). Ces trois nations d’Afrique de l’Est ont en effet franchi pour la première fois les seuils requis pour deux des trois critères de « graduation » définis par l’ONU. A l’instar de ces trois pays africains, le Bangladesh, le Laos et le Népal sont aussi pressentis pour 2026, ainsi que les Iles Salomon en 2027.

Concrètement, ils ont satisfait à la fois aux exigences de l’indice de capital humain, mesurant les progrès en matière d’éducation et de santé, ainsi qu’à celles de l’indice de vulnérabilité économique et environnementale. Seul le critère relatif au revenu national brut par habitant n’a pas encore été atteint. S’ils parviennent à confirmer ces avancées lors de l’évaluation de 2027, en remplissant à nouveau au moins deux des trois critères durant deux cycles d’affilée comme l’exige la procédure onusienne, le Rwanda, l’Ouganda et la Tanzanie pourraient alors être recommandés pour une sortie officielle de la catégorie des PMA.

Une perspective à la fois prometteuse et Source de défis de taille pour ces économies Est-africaines. D’un côté, franchir ce cap symboliserait une reconnaissance de leurs avancées économiques et sociales, avec les potentiels gains d’attractivité pour les investisseurs étrangers.

Mais d’un autre côté, comme l’ont expérimenté leurs prédécesseurs, ce changement de statut pourrait aussi réduire leur accès à certains mécanismes d’aide au développement réservés aux PMA, à l’instar des préférences commerciales ou du financement concessionnel.

Un enjeu de taille pour ces trois pays enclavés, encore très dépendants des exportations de quelques matières premières agricoles comme le café, le thé ou le coton. Leur principale priorité restera donc de poursuivre leurs efforts de diversification économique, tout en renforçant la résilience de leurs infrastructures face aux risques climatiques et environnementaux.

La CNUCED et d’autres institutions onusiennes se tiennent prêtes à les accompagner dans cette transition délicate, comme ce fut le cas pour les huit «diplômés» actuels. L’expérience respective de ces derniers, avec ses succès mais aussi ses écueils, offrira des enseignements précieux pour préparer au mieux cette nouvelle étape cruciale du développement durable en Afrique.

Les 4 pays africains qui ne font plus partie des États les moins avancés

PaysDate de déclassement
BotswanaDécembre 1994
Cap-VertDécembre 2007
Guinée équatorialeJuin 2017
Sao Tomé-et-PrincipeDécembre 2024

Source : ONU; CNUCED.

Par Modeste Kouamé
Le 21/12/2024 à 11h22