Rapport social mondial 2024 : 8 pays africains parmi les 22 plus fortes hausses de chômage

Chômeurs en Afrique du Sud.

Chômeurs en Afrique du Sud.

Le 24/10/2024 à 16h01

La fragilisation des marchés de l’emploi africain illustre les conséquences socio-économiques dévastatrices des crises mondiales récentes. Selon un rapport récent de l’ONU, 22 pays, dont 8 africains, affichent une forte hausse de leur taux de chômage entre 2018 et 2023.

Le département des affaires économiques et sociales du secrétariat des Nations unies alerte sur les conséquences sociales majeures des chocs récents, et leurs effets sur le chômage, la pauvreté et l’exacerbation des inégalités. Selon le rapport «World Social Report 2024» des Nations unies, 22 pays à travers le monde ont connu une hausse d’au moins un point de pourcentage de taux de chômage total entre 2018 et 2023. Parmi eux, 8 pays africains sont particulièrement touchés par cette dégradation de la situation de l’emploi.

Le Rwanda et l’Afrique du Sud affichent la plus forte dégradation de leur marché de l’emploi, avec une progression fulgurante de 4,2 points entre 2018 et 2023. Une telle flambée en si peu de temps souligne la vulnérabilité de ces économies face aux chocs successifs survenus sur cette période.

Le Botswana suit de près avec une envolée de 4 points, portant un coup rude à ce pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure. Le Soudan (+3,5 points) et le Zimbabwe (+2,3 points), deux nations à faible revenu, ont également vu des pans entiers de leur population rejoindre les rangs des sans-emploi.

La Tunisie, pays de la rive sud de la Méditerranée, n’est pas en reste avec une hausse de 2,3 points de son taux de chômage. Au cœur de l’Afrique subsaharienne, le Mali (+1,6 point) et le Kenya (+1,3 point) sont également impactés par cette dégradation généralisée des marchés du travail.

Cette concentration de pays africains parmi ceux affichant les plus fortes progressions du chômage mondial témoigne des défis particuliers auxquels le continent fait face pour préserver ses acquis sociaux et économiques dans un environnement internationalement perturbé.

World Social Report 2024 Launch

Amid intersecting global challenges, protecting the most vulnerable is imperative to leaving no one behind and reaching the #GlobalGoals. ➡️ Learn more about the #WorldSocialReport 2024 launching THIS WEEK on #PovertyDay, 17 October: https://www.un.org/development/desa/dpad/publication/world-social-report-2024/

Publiée par United Nations Department of Economic and Social Affairs (DESA) sur Lundi 14 octobre 2024

Les fragilités structurelles de nombre d’économies africaines, la dépendance aux exportations de matières premières, l’exposition aux aléas climatiques ainsi que les conflits dans certaines régions ont vraisemblablement accentué la vulnérabilité de l’emploi lors des crises récentes.

Cette hausse du chômage illustre les conséquences socio-économiques dévastatrices des crises récentes pour le continent africain. «Les reprises divergentes de l’emploi ont été une caractéristique notable de la récente série de crises: les marchés du travail se sont redressés plus rapidement que prévu dans les pays développés, mais les déficits ont persisté dans les pays en développement», explique le rapport.

Au-delà de l’Afrique, d’autres régions sont également impactées comme l’Asie (Afghanistan +4.2; Sri Lanka +2,3 ; Bhoutan +2,7 ; Myanmar +2,2), le Moyen-Orient (Iraq +2,1 ; Liban +1,0), l’Amérique latine (Panama +2,4 ; Honduras +1,2) et l’Europe (Roumanie +1,4 ; Suède +1,4 ; Estonie +1,3). Cette dégradation généralisée reflète l’interconnexion des crises mondiales récentes.

Principales causes de cette situation

Le rapport souligne également les effets dévastateurs de la pandémie de Covid-19, des conflits comme la guerre en Ukraine, ainsi que des catastrophes liées au changement climatique. Ces chocs ont entraîné des ralentissements économiques majeurs, perturbant les chaînes d’approvisionnement et l’activité productive.

L’augmentation de l’inflation mondiale et la hausse des taux d’intérêt ont également plombé la reprise. «Des facteurs de risque imprévus, tels que l’inflation et les taux d’intérêt «plus élevés pour longtemps» dans les économies développées, ont détérioré les perspectives dans le monde entier, en particulier pour les pauvres et les personnes vulnérables», souligne Li Junhua, sous-secrétaire général aux affaires économiques et sociales des Nations unies.

De plus, la contraction des espaces budgétaires et la crise de la dette ont entravé les investissements publics et les mesures de relance dans de nombreux pays en développement.

Impacts socio-économiques inquiétants

Au-delà des statistiques, cette situation menace les progrès en matière de développement social et de réduction de la pauvreté. La perte de revenus et l’insécurité alimentaire accrue font peser de lourdes menaces, en particulier sur les populations les plus vulnérables.

Le manque d’opportunités d’emploi, notamment pour les jeunes, peut alimenter les tensions sociales et favoriser l’instabilité politique. Les déficits de financement mettent aussi à mal les systèmes de protection sociale et les services essentiels comme l’éducation et la santé.

Réponses politiques insuffisantes

Si certains pays ont tenté de déployer des filets de protection sociale d’urgence, ces initiatives restent largement insuffisantes selon le rapport, qui estime que «seulement 47% de la population mondiale a accès à au moins une prestation de protection sociale». Ce qui signifie que plus de 4 milliards de personnes sont toujours dépourvues de toute protection sociale.

De plus, les contraintes budgétaires freinent les efforts de relance de l’emploi dans de nombreux pays africains.

Augmentation en points de pourcentage du taux de chômage total entre 2018 et 2023 :

PaysAugmentation (en %)Groupe de revenus
Rwanda4,2Pays à revenu faible
Afrique du Sud4,2Pays à revenu moyen supérieur
Botswana4Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure
Soudan3,5Pays à revenu faible
Zimbabwe2,3Pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure
Tunisie2,3Pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure
Mali1,6Pays à revenu faible
Kenya1,3Pays à revenu moyen inférieur

Source : Département des affaires économiques et sociales du secrétariat des Nations unies.

Par Modeste Kouamé
Le 24/10/2024 à 16h01