Tourisme au Maroc et en Tunisie: arrivées et recettes boostées par les vacances d’été

Le 19/10/2024 à 15h31

Le Maroc et la Tunisie se hissent au Top 3 des destinations touristiques africaines. Depuis le début de l’année, et dans le prolongement de celle qui l’a précédée, les performances du secteur sont bonnes. Durant la période estivale, des records d’arrivées de touristes ont été enregistrés particulièrement au Maroc où, contrairement à la Tunisie, les recettes ont également été élevées.

La reprise du secteur touristique se confirme cette année après les records de 2023. Désormais, les données d’avant la pandémie du Covid-19 sont dépassées, aussi bien au Maroc qu’en Tunisie, à fin septembre, comparativement à la même période de 2019, année de référence du secteur touristique mondial.

Une chose est presque sure, après les records des arrivées de touristes enregistrés en 2023, l’année 2024 aussi sera couronnée de records, grâce aux performances exceptionnelles de la période estivale. Des records qui s’expliquent surtout par le retour important, l’été venu, des membres des diasporas des deux pays que par l’attrait des touristes étrangers.

Outre les produits touristiques diversifiés offerts par les deux pays -balnéaire, culturel, loisirs, shopping, sportif…), les campagnes de promotion auprès des pays émetteurs et l’augmentation des connexions aériennes ont contribué de façon conséquente à l’augmentation des visiteurs durant un été exceptionnel au Maroc.

Arrivées et recettes au Maroc: l’été des records

Au terme des neuf premiers mois de 2024, le Maroc a accueilli 13,1 millions de visiteurs, un volume en hausse de plus de 2 millions par rapport à la même période de l’année dernière, selon les données du ministère du Tourisme, grâce particulièrement aux bons résultats de la période estivale. En effet, rien que durant les mois de juillet, d’août et de septembre, le Maroc a accueilli 5,5 millions de touristes (2,6 millions en juillet, 1,8 million en août et 1,3 million en septembre).

À noter que la fréquentation des établissements d’hébergement classés a été moins vigoureuse avec une hausse de seulement 7% en termes de nuitées enregistrées durant la période allant de début janvier à fin août 2024 pour un cumul de 18,7 millions de nuitées. Cette croissance peu marquée peut s’expliquer par le fait que de nombreux Marocains résidents à l’étranger ne fréquentent pas les hôtels lorsqu’ils sont en vacances dans leur pays.

Parallèlement, à fin août 2024, le cumul des recettes touristique s’est établi à 76,4 milliards de dirhams, en hausse de 7% par rapport à la même période de l’année dernière. À ce titre, il faut noter qu’un nouveau record de 17 milliards de dirhams (soit 1,72 milliard de dollars) a été enregistré uniquement durant le mois d’août 2024, avec une hausse de 20% par rapport à août 2023.

Pour avoir une idée de l’importance des recettes engrangées durant le mois d’août dernier, il faut savoir qu’elles représentent plus que la totalité des recettes cumulées du secteur touristique tunisien durant la période allant du 1er janvier au 10 septembre 2024 (5,1 milliards de dinars, soit 1,65 milliard de dollars). Cela signifie que le modèle de tourisme haut de gamme adopté par le Maroc s’est avéré payant.

«Ces chiffres prouvent l’efficacité de notre feuille de route. Nous aspirons à maintenir cette dynamique en diversifiant et enrichissant nos expériences locales. Cette approche permettra de prolonger et mieux valoriser le séjour de nos visiteurs», s’est réjouit Fatim-Zahra Ammor, ministre du Tourisme, de l’Artisanat et de l’Économie Sociale et Solidaire.

Ces performances touristiques sont le résultat de plusieurs facteurs: vision stratégique, diversité de l’offre (culturelle, balnéaire, sportive, nautique, loisir, dunes et désert…), investissements dans les infrastructures hôtelières et aéroportuaires, promotions à l’international auprès des Tours opérateurs et lors des salon dédiés au tourisme.

La stabilité politique et sociale, la sécurité, la proximité géographique avec les grands marchés émetteurs et la bonne connectivité des aéroports du Royaume sont également autant de facteurs qui renforcent son positionnement en tant que destination touristique de premier plan en Afrique et dans le monde arabe. Le Maroc ambitionne d’atteindre 26 millions de touristes d’ici 2026.

Avec ces données, le Maroc est en passe de battre son record de l’année dernière et devrait ravir la première place de destination touristique à l’Égypte avec, peut-être, un record de touristes accueillis jamais enregistré par un pays du continent.

D’ailleurs, la ministre Fatim-Zahra Ammor table sur la poursuite de cette dynamique pour le reste de l’année et projette des arrivées entre 15,5 et 16 millions de visiteurs au titre de 2024, et dépasser ainsi l’objectif initial de 15,5 millions de visiteurs prévus par la feuille de route du secteur au titre de l’année en cours. Pour rappel, le Maroc a accueilli 14,5 millions de visiteurs en 2023, un record historique, dont 51% de Marocains résidents à l’étranger (MRE).

Tunisie: tourisme de masse, recettes minimes

La Tunisie a accueilli 6,61 millions de touristes à fin août 2024, contre 6,23 millions durant les huit premiers mois de 2023, affichant une progression de 6,1%, selon les dernières données disponibles. Les arrivées durant la période estivale restent modérées. Cela peut s’expliquer par la période électorale et les tensions actuelles au Moyen-Orient.

Facilement accessible, grâce à ses tarifs attractifs, notamment avec les formules «all inclusive» et sa bonne connectivité avec le marché européen, son principal marché émetteur, la Tunisie bénéficie surtout d’un tourisme régional. En effet, l’Algérie et la Libye sont les deux principaux pourvoyeurs de touristes du pays. Ainsi, sur la période du 1er janvier au 20 août 2024, la Tunisie a accueilli environ 2 millions de touristes algériens, un volume en hausse de 15,4%. L’année dernière, 3,2 millions de touristes algériens avaient visité le pays.

Contrairement au Maroc, le tourisme tunisien est largement dominé par le balnéaire, malgré les énormes potentialités dans les domaines culturel, saharien, nautique… Ainsi, on note une très forte fréquentation des stations de Sousse, Hammamet… L’ile paradisiaque de Djerba aussi a connu une augmentation du nombre d’arrivées de touristes aussi bien étrangers que locaux, notamment durant les vacances d’été.

Ce choix de tourisme de masse, s’il se traduit par des arrivées importantes grâce notamment à la formule «all inclusive», n’en demeure pas moins peu générateur de recettes. C’est une formule qui bénéficie aux Tours opérateurs et à leur compagnies charters pas aux opérateurs touristiques et à l’État tunisien. Pour preuve, durant la période du 1er janvier à fin septembre 2024, le pays n’a engrangé que 5,6 milliards de dinars de recettes touristiques, selon les données de la Banque centrale de Tunisie. Si ce volume est en progression de 7,2% par rapport à la même période de l’année précédente, il reste néanmoins négligeable par rapport au nombre de touristes accueillis.

Ainsi, en rapportant les recettes au nombre de visiteurs accueillis entre le 1er janvier et fin août 2024, selon les données disponibles (4,87 milliards de dinars/6,23 millions de visiteurs), on se retrouve avec une recette de 732 dinars dépensés par touriste, soit une moyenne de 229 dollars. À titre de comparaison, pour la même période, la dépense moyenne des touristes ayant visité le Maroc (76,4 milliards de dirhams/11,8 millions de touristes) s’établit à 6.474 dirhams, soit 656 dollars. Autrement dit, un touriste dépense en moyenne trois fois plus au Maroc qu’en Tunisie.

Pour le reste de l’année, après la haute saison estivale, les autorités et les professionnels du secteur attendent le retour des Tunisiens résidents à l’étrangers au cours de la basse saison pour booster davantage les arrivées avant le rush de fin d’année.

Ainsi, après avoir enregistré 9,3 millions de visiteurs en 2023, l’Office nationale du tourisme tunisien (ONTT) table sur un record de plus de 10 millions de touristes au terme de l’année en cours (le précédent record étant enregistré en 2019 avec 9,5 millions de visiteurs).

Reste qu’il urge pour les autorités tunisiennes de trouver une solution à la difficile équation entre un afflux important de touristes et des recettes qui ne sont pas à la hauteur. Cette solution passera par l’abandon de la politique du tourisme de masse et du tout balnéaire en exploitant les autres filons de l’offre tunisienne dont le culturel et le tourisme saharien en s’extirpant graduellement de l’emprise des Tours opérateurs.


Par Moussa Diop
Le 19/10/2024 à 15h31