Le développement et la réduction de la dépendance de l’Afrique du reste du monde passent par l’industrialisation. Celle-ci va permettre l’exploitation des ressources naturelles abondantes du continent, générer des emplois pour une jeunesse nombreuse et contribuer au développement des marchés intérieurs. Ainsi, selon la Banque africaine de développement (BAD), «toutes les stratégies de développement de l’Afrique -depuis les Objectifs de développement durable jusqu’au Plan d’action pour le développement industriel accéléré de l’Afrique (2011) de l’Union africaine, en passant par l’Agenda 2063- identifient l’essor industriel comme la pierre angulaire de la croissance inclusive, de la création d’emplois décents et de la réalisation. De nombreux autres objectifs de développement».
Malheureusement, et en dépit des déclarations d’intention, la transformation industrielle accuse un retard considérable au niveau du continent. D’ailleurs, selon la BAD, «la part de l’Afrique dans la production manufacturière mondiale a baissé au cours des dernières décennies, tombant en deçà de 2% du niveau mondial». Et c’est pour contribuer à corriger ce retard que l’institution panafricaine a inscrit l’industrialisation du continent parmi ses 5 axes prioritaires.
C’est dans ce cadre que s’inscrit le rapport intitulé «Indice de l’industrialisation en Afrique» initié par la Banque africaine de développement (BAD), en collaboration avec l’Union africaine (UA) et l’Organisation des nations unies pour le développement industriel (Onudi) évaluant le degré d’industrialisation des pays africains.
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Le rapport a passé en revue 52 pays africains durant la période 2010-2019, sur les 54 que compte le continent (la Somalie et le Soudan du Sud étant exclus faute de données).
Selon le rapport, «la plupart des pays africains progressent, quoique lentement, dans leur développement industriel», ajoutant que «quelques pays ont déjà acquis des capacités de production sophistiquées».
Pour établir son classement, la BAD s’est basée sur trois indicateurs : «Performances (production industrielle, exportations…), «Déterminants directs» (capital, main d’œuvre…) et «Déterminants indirects» (environnement des affaires, stabilité macroéconomique, solidité des institutions, infrastructures…).
Et pour établir son classement, la BAD attribue une note à chacun des pays évalués sur une échelle allant de 0 (mauvaise) à 1 (bonne).
Il ressort de ce classement que le quintile supérieur du classement de l’indice de l’industrialisation de l’Afrique (IIA) est composé de l’Afrique du Sud avec un score de 0,8404, suivi du Maroc (0,8327), de l’Egypte (0,7877), de la Tunisie (0,7714), de Maurice (0,6685), d’Eswatini (0,0,6423), du Sénégal (0,6147), du Nigeria (0,6046), du Kenya (0,6029) et de la Namibie (0,6014).
Top 10 de l’Indice de l’industrialisation de l’Afrique
Rang | Pays | Score/1 |
---|---|---|
1er | Afrique du Sud | 0,8404 |
2e | Maroc | 0,8327 |
3e | Egypte | 0,7877 |
4e | Tunisie | 0,7714 |
5e | Maurice | 0,6685 |
6e | Eswatini | 0,6423 |
7e | Sénégal | 0,6147 |
8e | Nigeria | 0,6046 |
9e | Kenya | 0,6029 |
10e | Namibie | 0,6014 |
Source: BAD
«Le Maroc est l’une des économies manufacturières les plus solides d’Afrique, enregistrant une amélioration constante pour toutes les dimensions de l’Indice depuis 2010. Le gouvernement a accordé la priorité au développement industriel, notamment dans le secteur automobile et, entre 2015 et 2018, il a porté sa part dans la valeur ajoutée manufacturière totale de l’Afrique de 1,7 % à 7,6%. Le Maroc exporte du matériel de distribution électrique, des véhicules à moteur, des engrais et des vêtements pour femmes vers les marchés mondiaux tels que l’Europe, les États-Unis et le Brésil», souligne la BAD.
La BAD ajoute que «la forte performance à l’exportation a permis au pays de devenir le deuxième exportateur de biens manufacturés sur le continent, après l’Afrique du Sud. Le Maroc réalise désormais 21,2% de ses exportations d’articles manufacturiers en Afrique, devançant nettement ses concurrents directs comme la Tunisie et l’Egypte».
Par ailleurs, selon l’institution panafricaine, «les progrès les plus importants ont été enregistrés au Bénin, en Ethiopie, en Erythrée, au Gabon, en Guinée, en Mauritanie, au Mozambique, au Sénégal et aux Seychelles, qui ont tous gagné au moins cinq places au cours de la période 2010-2019»
A noter qu’avec un score de 0,5978, l’Algérie ne figure pas dans le Top 10 des pays africains les plus industrialisés. Le pays a fait reposer toute son économie sur les hydrocarbures qui pèsent 95% de ses recettes d’exportation et plus de 45% de ses ressources budgétaires.
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L’absence de l’Algérie dans ce Top 10, alors qu’elle occupe la 4e place en termes de PIB du continent, prouve à quel point le pays est dépendant de la rente pétrolière. Et malgré les effets d’annonce du président Abdelmadjid Tebboune, la diversification économique annoncée tarde à se concrétiser. Et pour cause, les écueils structurels sont nombreux : faiblesse des infrastructures, climat des affaires non attractif, faible qualification des ressources humaines…
Globalement, au niveau du continent, la BAD souligne dans son rapport que certaines conditions sont à présent réunies pour un décollage industriel de l’Afrique. Entre autres facteurs favorables figurent : une stabilité et une meilleure gouvernance, une population jeune et une importante réserve de main d’œuvre, une destination attractive pour les investissements directs étrangers, une zone de libre échange intégrée (Zlecaf)… Selon la BAD, cette industrialisation va constituer un atout majeur pour ces pays qui pourront mieux jouer leur partition dans le cadre de la mise en place de la Zlecaf, un marché de plus de 1,3 milliard de consommateurs.