Gabon: Jean Ping s’accroche "à des promesses" qu’on lui aurait faites

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Le 30/09/2016 à 11h34, mis à jour le 30/09/2016 à 16h45

Hier, jeudi 29 septembre, Jean Ping a enfin lâché le mot. On lui aurait fait des "promesses" s'il acceptait d'aller devant la Cour constitutionnelle. A présent, il exige que ces promesses soient tenues. Mais, il y a cette question: quelles sont ces promesses: intervention militaire ou sanctions?

Quand on pense que c’est fini, ils en remettent une couche. Le feuilleton gabonais se poursuit donc avec les dernières déclarations de Jean Ping. "Avez-vous été dupe, en acceptant de faire recours devant la Cour constitutionnelle", lui demande le journaliste de Radio France internationale dans une interview qu’il a accordée hier jeudi et diffusée ce matin du vendredi 30 septembre 2016. "Dupe ? Non !, lui répond Jean Ping, avant d’ajouter, ils nous ont demandé d’aller devant la Cour constitutionnelle, maintenant ils n’ont qu’à assumer les conséquences. Ils n’ont qu’à tenir leurs promesses".

Une intervention militaire française est peu probable?

Cette déclaration pose quelques questions. Est-ce que Jean Ping obéirait aux ordres de certaines puissances occidentales qui lui auraient dicté un code de conduite ? Il y avait un doute, mais pour beaucoup d’observateurs cette déclaration, qui a peut-être échappée à Ping, confirme bien l’ingérence étrangère dans l’élection présidentielle gabonaise.

L’autre question posée est "quelles sont les promesses en question" ? Pourrait-il s’agir d’une intervention armée, une sorte de coup d’Etat mené par la France, comme cela a pu être le cas en Côte d’Ivoire? Depuis le début du contentieux électoral, cette hypothèse est revenue plusieurs fois, notamment au moment du déploiement de la Légion étrangère vers la Côte d’Ivoire. Cependant, pour Paris, il s’agissait d’une simple mesure de prudence pour pouvoir évacuer les 10.000 à 15.000 Français vivant au Gabon. Si tel est réellement le cas, il reste la panoplie de sanctions contre les biens détenus dans les pays occidentaux par les dignitaires gabonais actuellement au pouvoir, à commencer par la dynastie Bongo. Mais il y a aussi, la fameuse Cour pénale internationale (CPI) que l’on sait très motivée quand il s’agit de poursuivre des dirigeants africains.

Saisie de l'immense fortune des Bongo

D’abord, pour ce qui est des sanctions, la famille Bongo possède une fortune colossale. L’année dernière, un document diffusé par le site d’information Mediapart faisait état d’une valeur globale estimée à 300 milliards de Fcfa, soit quelque 460 millions d’euros, dont l’essentiel se trouve au Gabon. Donc protégée tant qu’Ali Bongo reste au pouvoir.

Cependant, en France, il y a une bonne partie de cette fortune. Toujours selon Mediapart, les droits de successions payés dans l’Hexagone se monteraient à quelque 20 millions d’euros, soit 13 milliards de Fcfa. Cela donne bien une idée sur la base imposable et donc la vraie fortune détenue en France. Il s’agit au moins du triple de cet impôt, soit quelque 60 millions d’euros, près de 40 milliards de Fcfa. De même, un compte à Monaco avait laissé apparaître une somme de 30 millions d’euros, soit 20 autres milliards de Fcfa. Même la fortune détenue dans les paradis fiscaux échapperait à d’éventuelles représailles de la France et de ses alliés. La saisie des biens du clan Bongo en Europe et aux Etats-Unis serait un coup dur pour Ali Bongo. Car faut-il le rappeler, les frères et sœur détiennent villas et voitures de luxe, en grand nombre, à Paris et sur la Côte d’Azur.

La Cour pénale internationale: pourquoi pas?

Il reste également la menace de la Cour pénale internationale. Fatou Bensouda, procureure près la CPI, a d’ores et déjà annoncé hier jeudi 29 septembre, l’ouverture d’un examen préliminaire sur la crise post-électorale. Selon elle, il s’agit de déterminer "si les critères imposés pour l'ouverture d'une enquête sont réunis". Le gouvernement gabonais lui a demandé, le 21 septembre, "de bien vouloir ouvrir sans délai une enquête", faisant part de "faits relevant de l'incitation à commettre le crime de génocide" et de "crimes contre l'humanité" qu'il attribue aux militants favorables à Jean Ping. Mais, du côté de l’opposition également on avait menacé de saisir Fatou Bensouda. La demande du gouvernement gabonais pourrait également se retourner contre les responsables gabonais.

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 30/09/2016 à 11h34, mis à jour le 30/09/2016 à 16h45