Avec les taux de croissance relativement élevés enregistrés par le continent au cours de ces 10 dernières années, les populations rurales ont envahi les villes à un rythme beaucoup plus rapide que les politiques d‘aménagement urbain. Selon l’ONU-Habitat, le taux d’urbanisation en Afrique croît de 4% par an.
Conséquence, aujourd’hui, environ 40% de la population africaine, soit 472 millions d’habitants, vivent dans les villes, contre 20 millions en 1950. Et le rythme d’urbanisation risque de s’accélérer. En 2030, le taux d’urbanisation devrait atteindre 52% avant d’atteindre 62% en 2050. En 2030, plus d’une quinzaine de villes africaines abriteront plus de 10 millions d’habitants et plus de 1,1 milliard d'Africains vivront dans les villes en 2050.
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Cette urbanisation galopante n’est pas sans poser des défis énormes: assainissement, approvisionnement en eau et en électricité, équipements de base (écoles, hôpitaux, police, etc.), chômage, violences, surpopulation des villes, développement de bidonvilles, pollution, etc. Tous les ingrédients de propagation de la pauvreté sont là, représentant autant de défis à relever par les pouvoirs publics et les élus des grandes villes.
Face à cette situation, «seule l’inclusion véritable est garante de la pérennité et la sécurité de notre continent», a souligné Mohamed El Kettani, PDG du groupe Attijariwafa bank, en marge de la 5e édition du Forum international Afrique développement durant lequel les questions de l’urbanisation et de l’inclusion sociale ont été débattues.
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Il ressort clairement des interventions que la croissance urbaine s’est décorrélée du développement économique en Afrique. Du coup, les villes africaines sont loin d’être des moteurs économiques et ne constituent pas des pôles de production. Le problème est que le processus de concentration de la population dans les villes n’a pas donné lieu à des investissements suffisants en infrastructures urbaines (routes, hôpitaux, écoles, etc.), en logements et en pôles industriels et commerciaux.
Du coup, dans de nombreuses villes africaines, le chômage et la pauvreté dominent et sont sources de tensions et d’insécurité croissante. Cette situation a entraîné le développement des bidonvilles dans lesquels vivent plus de 200 millions d’habitants en Afrique subsaharienne. A titre d’exemple, à Lagos, au Nigeria, l’une des plus importantes métropoles du continent avec le Caire, avec plus de 15 millions d’habitants actuellement, deux habitants sur trois logent dans des bidonvilles.
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Partant, selon les recommandations du Forum, il est urgent de repenser l’urbanisation au niveau du continent en mettant l’accent sur le développement durable. Il s'agit de concevoir des villes assurant l’égalité des chances pour tous, particulièrement en matière d’accès aux services de base.
Les importants défis de l’urbanisation peuvent devenir des opportunités pour le continent. L’Afrique a ainsi besoin de 4 millions de logements par an sur plusieurs années pour résorber le déficit de plus de 60% en habitations pour loger des citadins. Face à cette situation, plusieurs Etats se sont engagés dans des programmes de logements sociaux devant faciliter l’accès des populations à la propriété et lutter ainsi contre la prolifération des bidonvilles.
Pour cela, l’inclusion financière est nécessaire. Les banques marocaines, à leur tête Attijariwafa bank, accompagnent cette politique d’acquisition de logements sociaux grâce à des formules qui ont fait leurs preuves au Maroc et qu’elles ont exportées en Afrique subsaharienne où elles étaient inexistantes dans de nombreux pays.
Ces défis peuvent aussi pousser les Etats à adopter de nouveaux schémas d’urbanisation maîtrisée afin que la croissance urbaine soit corrélée au développement économique. C’est le cas au Sénégal où le gouvernement a pris l’initiative de désengorger la ville de Dakar avec la mise en place du pôle urbain de Diamniadio. Selon Abdou Karim Fofana, directeur général de l’AGPBE –Agence de gestion du patrimoine bâti de l’Etat-, la nouvelle ville de Diamniadio doit permettre d'éviter les mauvaises expériences connues par certains quartiers de l’extension de Dakar tels que Pikine, Guediawaye, etc.
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Du coup, la nouvelle ville, située à 30 km de Dakar, construite sur 1.750 ha, sera dotée de tout ce qui en fera une cité fonctionnelle avec la présence de l’Etat grâce à la délocalisation de 15 ministères (10.000 fonctionnaires vont y habiter), le développement d'activités créatrices d’emplois avec la mise en place de parcs industriels d’envergure, l'installation d'infrastructures de base (hôpitaux, cliniques, écoles, police, centres commerciaux, marchés, etc.) mais aussi de divertissement et de loisirs (stades, hôtels, etc.), la construction de logements (40.000 unités à terme), etc. Il s’agit d’«une ville qui offre un cadre de vie et de travail à ses populations».
Pour assurer la mobilité, outre l’autoroute, un Train régional express (TRE) reliera Dakar-Diamniadio-Aéroport international Blaise Diagne.
La réussite de cette expérience pourrait servir de modèle à d’autres pays du continent, et notamment à ceux de la sous-région, confrontés au même problème d’urbanisation anarchique.