Houda Ibrahim: Etes-vous satisfait concernant la dernière résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies, surtout après le retrait du Polisario de Guerguerat, dans la zone tampon ?
Naser Bourita: C'est une résolution qui conserve les paramètres de la recherche de solution à ce différend régional tels qu'ils ont été définis depuis 2007. C'est une résolution qui converge sur beaucoup de points avec le rapport du sécrétaire généra de l'ONU. Que ce soit par rapport à la prééminence de l'initiative marocane d'autonomie ou par rapport à la dimension régionale du conflit et du rôle des pays voisins dans la résolution de ce différend. Que ce soit aussi par rapport à la situation dans les camps de Tindouf et l'impératif de recenser et de quantifier ces populations vivant dans ces camps. C'est un préalable humanitaire imposé par le droit international dans le domaine.
Sur tous ces points, la résolution a réitéré des éléments qui se recoupent avec la position du Maroc. Sur Guerguerat en particulier, le Maroc a noté que le Conseil de sécurité, représentant la communauté internationale, a été ferme pour que les éléments militaires du Polisario se retirent de manière définitive et permanente, précisant par la même occasion, que cette présence est illégale et illégitime car violant les accords de cessez-le-feu. Le Polisario a tenté de tergiverser, manoeuvrer et manipuler pendant un certain temps. Mais je crois que la fermeté de la communauté internationale est venue à bout de toutes ces maneuvres. Il n'avait d'autre choix que de quitter cette zone.
Comment le Maroc va faire pour cohabiter avec la RASD au sein de l'Union africaine ?
La position du Maroc sur cette question est claire. Le problème de cette entité que vous appelez la RASD n'est pas avec le Maroc tout seul. Il l'est avec les deux tiers des pays africains, Puisque que 35 autres pays de l'UA ne la reconnaissent pas. Cette entité n'est pas reconnue par l'ONU. Elle n'est reconnue par aucun pays de l'Union européenne. Comment faire avec cette situation anormale où les deux tiers d'une organisation ne reconnaissent pas un membre. Un membre qui n'est reconnu par aucun pays européen, qui n'est reconnu par les pays arabes, qui n'est reconnu que par le régime de la Corée du Nord en Asie, cela pose un problème de légalité internationale. La question est de savoir si cette entité présente les attibuts d'un Etat.
Lorsqu'il y aura la réunion des ministres des Finances africains, est-ce que cette entité a une monnaie? Lorsqu'il y aura la réunion des autres ministres sectoriels, qu'est-ce que cette entité peut présenter? Donc, ce n'est pas un problème qui se pose uniquement au Maroc, c'est un problème qui se pose à l'ensemble de l'organisation panafricaine. Il faut que l'anonmalie soit corrigée.
Le Maroc a demandé d'intégrer la CEDEAO. Il y a quelques pays qui sont réticents par rapport à cette demande. Comment ce dossier a-t-il évolué ?
On n'a pas vu de pays réticents. Au contraire, beaucoup de pays ont exprimé clairement leur soutien à cette candidature qui est tout à fait naturelle. Sa majesté le roi a toujours placé l'Afrique de l'Ouest en priorité dans sa politique africaine. Le Maroc est le premier investisseur dans cette région. Il a participé à beaucoup d'opération de maintien de la paix ou de gestion de crises dans cette région. Les liens humains et religieux entre le Maroc et l'Afrique de l'Ouest sont très enracinés. La présence économique également du Maroc dans cette zone est très forte. Géographiquement, le Maroc est à l'Ouest de l'Afrique. Donc tous les arguments, tous les éléments sont là pour conforter cette candidature et nous somme très confiants par rapport à son aboutissement le mois prochain.
Est-ce que le Maroc, qui a montré une dynamique très forte économiquement et politiquement sur le continent, compte intégrer d'autres organisations, d'autres institutions africaines?
Grâce à l'action de sa majesté le roi, la politique africaine du Maroc a franchi un nouveau palier. D'abord, c'est une politique qui est passée du stade unidimensionnel à celui multidimensionnel où s'imbriquent le religieux, le sécuritaire, l'économique, l'investissement, l'humain, le culturel. Ensuite, ce n'est pus une relation concentrée sur une région. Elle couvre tout le continent. Enfin, ce n'est plus une politique uniquement bilatérale, elle passe également par des organisations régionales et continentales, d'où le retour du Maroc à l'Union africaine et la demande d'intégrer la CEDEAO. Le Maroc est en train de construire patiemment cette politique africaine et de lui donner un contenu et un objectif. L'objectif, sa majesté le roi l'a souligné à plusieurs reprises: c'est une véritable coopération Sud-Sud avec des objectifs et un contenu, basée sur des projets ambitieux comme la baie de Cocody en Côte d'Ivoire, le Gazoduc à partir du Nigeria ou le canal des Pangalanes à Madagascar...