G5 Sahel: ce mouvement peul qui ne souhaite pas la bienvenue à la Force commune

Abdou Birane Wane est surtout connu pour son activisme pour la défense des droits des négro-mauritaniens

Abdou Birane Wane est surtout connu pour son activisme pour la défense des droits des négro-mauritaniens. DR

Le 02/07/2017 à 11h12, mis à jour le 02/07/2017 à 19h31

Un mystérieux Mouvement panafricain pour la renaissance (MPR) accuse la France d'armer des dictatures sous le prétexte de lutter contre le terrorisme, en perspective de l'avènement de la force conjointe du Sahel, à travers un document signé par une vingtaine de personnalités.

Le Mouvement panafricain pour la renaissance (MPR), organisation encore peu connue, accuse la France et les puissances européennes d’armer des dictatures étouffant la liberté de leurs peuples sous le prétexte de la lutte contre le terrorisme, en mettant sur pied la force conjointe du G5 Sahel, dans une déclaration rendue publique ce week-end.

Le MPR regroupe des personnalités issues de la composante ethnique peule d’une dizaine de pays africains, allant de la Mauritanie au Soudan.

Cette déclaration tombe à quelques heures de la tenue à Bamako, d’un sommet des chefs d’état du G5 Sahel, organisation regroupant le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad. Le président français, Emanuel Macron, prend part à cette réunion ce dimanche.

Ce conclave doit arrêter les modalités pour rendre opérationnelle la nouvelle force du G5 Sahel.

Dans cette perspective, le mouvement sonne l’alerte et dénonce «la stigmatisation» dont serait victime la communauté peule, «associée injustement au terrorisme islamiste par certaines puissances occidentales et leurs médias parmi lesquels JeuneAfrique, RFI et Le Monde diplomatique, alors que cette composante est victime au premier rang du terrorisme islamiste».

La déclaration dénonce «la haine à l’égard de la communauté peule» de la part de trois leaders, dont les pays sont membres du G5 Sahel, à savoir le président Mohamed Ould Abdel Aziz de Mauritanie, Ibrahim Boubacar Keita (IBK) du Mali et Idriss Deby Itno du Tchad.

Ces responsables sont accusés d’avoir créé le G5 sous l’alibi de la lutte contre le terrorisme, dans le but d’étouffer les libertés et consolider des dictatures, lesquelles n’hésiteraient pas à recourir aux solutions extrêmes du genre «génocide» contre certaines composantes ethniques de leurs peuples.

Procédant à un diagnostic du phénomène extrémiste, qui débouche sur la violence terroriste, le document de ce mystérieux MPR, soutient que «les mouvements islamistes prolifèrent dans le Sahel parce que la présence de l’administration est insuffisante dans certaines zones, laissant les populations dans un état de marginalisation socioéconomique et dans des conditions de pauvreté». Mais aussi et surtout à cause d'«une situation d’insécurité totale, propice à l’installation et à la dissémination d’un islamisme radical rampant».

Ainsi, les Etats, qui portent une responsabilité historique pour avoir « créé les conditions de naissance et d’expansion du terrorisme, se mettent aujourd’hui à terroriser les populations sous le prétexte de lutter contre le même phénomène».

La mise sur pied de la nouvelle force conjointe du G5 Sahel génère un vif débat au sein de la classe politique et des spécialistes de la sécurité au niveau de la sous-région.

Une multitude d’interrogations sont soulevées, la première étant de savoir si les pays de la sous-région et l’Afrique en général peuvent continuer à «sous-traiter» leur sécurité à la France, ancienne puissance coloniale, et à l’Europe qui roulent uniquement pour leurs intérêts stratégiques et géopolitiques, bien loin des préoccupations des peuples africains.

D’autres questions concernent le financement, le nombre de militaires à mobiliser, la capacité militaire des Etats.

Mais ce nouveau document, qui porte la signature d’une vingtaine de personnalités parmi lesquelles le Mauritanien Abdoul Birane Wane, leader du mouvement contestataire «Touche pas à ma nationalité» (TPMN), ressemble à un gros pavé dans la mare d’un débat qui suscite parfois des torrents de passion et charrie des ressentiments vis-à-vis de l’ancienne puissance coloniale.

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 02/07/2017 à 11h12, mis à jour le 02/07/2017 à 19h31