Mauritanie: début de changement au pays où le contrat d'assurance "se vend" dans une épicerie

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Le 03/04/2017 à 22h27, mis à jour le 04/04/2017 à 07h31

Le Collectif des assureurs de Mauritanie est reconnu par le gouvernement après une procédure qui a duré quatre longues années. Un nouvel espoir chez les opérateurs d'un secteur où règne l'anarchie la plus totale. En effet, en Mauritanie, l'activité d'assurance ne respecte toujours pas les normes.

Le collectif des sociétés d’assurances de Mauritanie a décroché la semaine dernière son récépissé de reconnaissance auprès des services compétents de l’Etat (ministère de l’Intérieur) après quatre années d’une longue procédure.

Une évolution positive saluée par les opérateurs et les professionnels de cet important secteur de l’économie nationale, dans la perspective d’une meilleure défense de leurs intérêts matériels et moraux, qui passe par une application plus rigoureuse de la réglementation.

Mohamed Abdallah El Helby, coordinateur des sociétés d’assurances, souhaite «une réorganisation du secteur pour lequel la structure nouvellement reconnue devrait servir de plateforme de concertation avec les autorités gouvernementales».

Ce cadre des assurances, en activité depuis 17 ans, décrit un marché «qui se débat actuellement dans une situation critique du fait des difficultés nées de la non-application de la réglementation. Il faut plus de moyens en faveur de la Direction du contrôle des assurances pour permettre à celle-ci de remplir convenablement sa mission. Par ailleurs, certaines compagnies ne règlent pas les sinistres et opèrent sans traité de réassurance, avec une absence de réserves financières et des capacités techniques insuffisantes. Finalement, ici n’importe qui vend de l’assurance: dans les papeteries, les garages, les quincailleries, les cafés étrangers…».

Situant les responsabilités par rapport à ce constat, Helby estime «qu’elles sont partagées entre l’Etat, les souscripteurs et les compagnies d’assurances, dont certaines se livrent à du dumping dans la branche automobile. Il faut arrêter la délivrance des agréments et procéder à un contrôle rigoureux qui permettrait de retirer les autorisations aux sociétés qui refusent de se plier aux normes».

La loi 93.040, planche de salut

Pour sa part, MOA, directeur commercial de l’une des plus importantes compagnies d'assurances du pays, plaide en faveur d’une application intégrale de l’article 199 de la loi 93.040, qui précise que tous les risques situés en Mauritanie doivent impérativement faire l’objet d’une assurance auprès d’une compagnie locale.

Il faut aussi, souligne-t-il, "réorganiser le secteur pour contraindre les compagnies à respecter les tarifs homologués (responsabilité civile automobile) et à indemniser correctement les sinistres pour les victimes d’accidents de circulation-responsabilité civile automobile. Exiger l’assurance pour les Facultés de transport de marchandises (FTM), les chantiers de travaux, les bris de machines, etc.".

En outre, "nous devons également évoluer vers la création d’une compagnie de réassurance avec un capital mixte, associant l’Etat et les grandes sociétés privées opérant dans ce domaine, pour augmenter la capacité de rétention et diminuer les transferts de primes de réassurances vers l’étranger».

Bref, le marché de l'assurance en Mauritanie a encore des étapes à franchir pour se réorganiser. Le secteur compte 14 compagnies nationales et 3 courtiers français (Gras Savoye, ASCOMA et Filet Allard Maritime) qui opèrent sur un marché exigu dont le chiffre d’affaires tournerait autour de 15 milliards d’ouguiyas, soit environ 43 millions de dollars, avec une prééminence de la branche automobile, structurellement déficitaire à travers le monde. La modicité de ce chiffre d'affaires s'expliquant par le fait que les compagnies étrangères opérant dans les industries extractives s'assurent à l'étranger.

La plus importante part du marché national d'assurance revient à Daman Assurances, filiale de la SNIM, créée au début des années 2010. 

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 03/04/2017 à 22h27, mis à jour le 04/04/2017 à 07h31