Mauritanie: découverte d'un charnier contenant 15 squelettes ligotés

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Le 01/04/2018 à 09h45, mis à jour le 01/04/2018 à 09h45

Une trentaine d’années après les faits, la Mauritanie reste toujours hantée par les vieux démons du passif humanitaire de la gouvernance sécuritaire de l'ancien président Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya. Et ce, malgré une loi d’amnistie au forceps adoptée en 1993.

Illustration avec cette déclaration des Forces de libération africaine de Mauritanie (FLAM)-organisation de la mouvance nationaliste noire en exil-demandant l’ouverture d’une enquête suite à la découverte d’un charnier contenant les restes de 15 personnes au nord de la Mauritanie, dans une déclaration rendue publique samedi. 

Le communiqué évoque une découverte par la gendarmerie mauritanienne d’un charnier sous forme «de squelettes humains révélant que les suppliciés ont eu les mains et les pieds ligotés. Cette caractéristique rappelle les circonstances dans lesquelles, plusieurs soldats arrêtés et torturés en raison de leur appartenance raciale, ont été sommairement assassinés durant les années de braises (1987- 1991)».

 

La déclaration du mouvement, rappelle par ailleurs que les exactions de cette période -ont eu principalement pour théâtre le nord de la Mauritanie, se demandant, sur la base de ce constat, si à travers ces découvertes «la terre ne commençait pas enfin à révéler ses secrets». Dans ces conditions, les Forces de libération africaines de Mauritanie (FLAM) «exigent le transfert des squelettes découvertes dans un centre médico-légal indépendant aux fins d’autopsie par des médecins indépendants dans le but de déterminer les circonstances et conditions dans lesquelles ces personnes ont trouvé la mort».

 

Les FLAM sollicitent aussi «des tests ADN et que toutes les analyses utiles susceptibles de permettre la remise des corps aux familles et proches soient effectuées, de manière à offrir aux défunts un enterrement digne et conforme aux prescriptions de notre religion». Au-delà des circonstances actuelles, la déclaration demande «une commission d’enquête pour faire toute la lumière sur le génocide perpétré par les autorités mauritaniennes durant la période 1987-1991».

 

Elle exige aussi «l’abrogation de la loi d’amnistie 93.23 du 14 juin 1993, couvrant tous les membres des forces armées et de sécurité impliqués dans ces exactions, pour que ces derniers répondent de leurs actes devant la justice». Ainsi, une trentaine d’années après les faits, la Mauritanie reste encore confrontée à l’équation de crimes ayant porté une grave atteinte à la cohésion nationale, malgré la loi d’amnistie de 1993.

 

En Afrique, les autorités héritières de ce genre de situation ont toujours un choix difficile pour concilier le devoir de vérité, de justice, de mémoire et de pardon. Ainsi, certains dirigeants ont opté pour la justice transitionnelle, dans le cadre d’une démarche consensuelle associant tous les segments de la société.

 

En novembre 2017, plusieurs sources concordantes ont fait état d’une nouvelle initiative du président Mohamed Ould Abdel Aziz visant à vider définitivement ce dossier.Fondé en 1983, le mouvement des FLAM a servi d’épicentre à la répression qui a touché toute la communauté négro-africaine de Mauritanie sous le régime du président Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya, avec comme point d’orgue les exécutions extrajudiciaires de plusieurs centaines de militaires entre septembre 1990 et février 1991.

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 01/04/2018 à 09h45, mis à jour le 01/04/2018 à 09h45