Mauritanie: Amnesty International réclame l'abolition de la peine de mort contre les apostats

DR

Le 06/05/2018 à 10h00, mis à jour le 06/05/2018 à 11h13

Amnesty International (AI) demande aux autorités mauritaniennes l'abrogation de la nouvelle loi obligeant les juges à prononcer la peine de mort à l'encontre des apostats, même en cas de repentir.

L’adoption par l’Assemblée nationale de Mauritanie, la semaine dernière, d’une loi modifiant les dispositions de l’article 6 du Code pénal (CP), fait ses premières vagues et provoque la réaction des organisations dédiées à la défense des droits de l’Homme.

Dans une déclaration rendue publique vendredi 4 mai, Amnesty International condamne la validation d’une législation obligeant les juges à prononcer "la peine capitale pour les infractions liées à l’apostasie», la qualifiant de «véritable retour en arrière qui éloigne la perspective d’une abolition de la peine de mort". Amnesty International demande aux autorités d’abroger la nouvelle loi.

La déclaration trouve un lien entre la démarche des autorités de Nouakchott et le cas du blogueur Mohamed Cheikh ould M’Kheitir. Celui-ci a été condamné à mort par une cour criminelle de Nouadhibou (Nord) pour "apostasie, en vertu de l’article 306 du Code pénal (CP) en 2014. A la base de cette sentence, rappelle Amnesty International, une publication sur internet, dénonçant «le fait que la religion serve à légitimer les pratiques discriminatoires dont est victime la caste des forgerons, à laquelle il s’identifie. Cependant, la Cour suprême a ramené cette peine à deux ans d’emprisonnement, après avoir reconnu sa repentance, le 9 novembre 2017".

Mais une semaine plus tard, le gouvernement a initié un projet loi visant la modification des dispositions de l’article 306 du Code pénal et obligeant le juge à prononcer la peine de mort à l’encontre des individus reconnus coupables d’apostasie, même en cas de repentir.

En dépit de trois années passées en détention préventive, une période supérieure à la peine définitive de deux ans, le blogueur «reste toujours détenu au secret» déplore la déclaration d’AI, qui exige sa libération.

Amnesty Internationale rappelle par ailleurs le mauvais timing de la modification des dispositions de l’article 306 du Code pénal relatives à l’apostasie. Un texte voté pendant que la Commission africaine des droits et des peuples (CADHP), tenait les assises de sa 62e réunion à Nouakchott, dans le cadre d’un forum dont le thème central portait sur l’abolition de la peine de mort en Afrique.

Mercredi dernier, les autorités mauritaniennes ont affirmé à la CADHP que Mohamed Cheikh ould M’kheitir «est en détention administrative pour sa propre sécurité».

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 06/05/2018 à 10h00, mis à jour le 06/05/2018 à 11h13