Une nouvelle affaire d’accaparement des terres dans les environs du village de Ferallah (subdivision de MBagne, région du Brakna) au sud de la Mauritanie défraie la chronique depuis une quinzaine de jours.
Les populations du village ont organisé une série de manifestations pour dénoncer "une expropriation foncière", portant sur un terrain, appelé Plaine de Koylal, constitué de 25 hectares destinés à la coopérative Ibn Khaldoun, dans le cadre d’un Projet d’appui à l’initiative de l’irrigation dans le Sahel (PARIIS).
Les communautés locales dénoncent une atteinte grave à la propriété traditionnelle et s’opposent à la perte de terres qu’elles considèrent comme leur unique source de revenus, au profit de capitaux étrangers et parfois nationaux, et ce, pour un business peu soucieux de l’équilibre social et de leur sécurité alimentaire.
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En plus des autorités mauritaniennes, les manifestants ont également fait connaître leurs griefs contre la Banque mondiale (BM), dont "la complicité" a été dénoncée par de nombreux orateurs ayant pris la parole en diverses circonstances.
La Banque mondiale se lave à grande eau
Face à ces accusations de "complicité" la Banque mondiale (BM) s’est lavée à grande eau à travers un communiqué de presse publiée le week-end dernier, et a annoncé une prochaine mission sur le terrain.
Celle-ci aura pour tâche "de recueillir des informations nécessaires auprès de toutes les parties concernées au sein de la communauté et l’institution financière en tiendra compte dans le cadre de son dialogue avec le gouvernement mauritanien".
Par ailleurs, le document rappelle que "la protection des droits des communautés, ainsi que la préservation de l’environnement occupent une place centrale dans ses activités liées à des projets d’investissement."
Bombe à retardement
Le problème de l’expropriation des communautés et de l’accaparement des terres par le capital international et l’agrobusiness en Afrique est considéré comme une véritable bombe à retardement.
En Mauritanie, le cas de Ferallah, dans la région du Gorgol, ou encore celui de Dar el-Barka, dans la région du Brakna, sont des exemples de ces processus d'accaparement des terres appartenant à des communautés villageoises de la vallée du fleuve Sénégal.
Réagissant à ce nouveau conflit foncier, le Pr Lô Gourmo, vice-président de l’Union des forces de progrès (UFP/opposition), met en garde contre "l’étincelle qui peut mettre le feu à toute la plaine".
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L’homme politique, professeur de droit en France et avocat au barreau de Nouakchott, rappelle que "la tragédie de l’accaparement des terres se poursuit sans désemparer tout le long de la vallée du fleuve. Le scénario est le même depuis plusieurs décennies, en particulier depuis que le chauvinisme est devenu officiel durant la seconde période du régime de Maaouya ould Sid’Ahmed Taya. Cet accaparement est systématique sous le règne invraisemblable de Mohamed ould Abdel Aziz, devenu lui-même, semble-t-il, un grand propriétaire terrien notamment dans la zone de Rosso".
Pointant un doigt accusateur sur une législation galvaudée, le professeur Lô parle "d’une loi foncière transformée en arme de guerre contre les populations" au fil du temps.
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Il invite l’Etat à protéger les intérêts de toutes les parties, à commencer par ceux des populations locales, car "le faux capitalisme foncier à l’œuvre ne contribue pas au développement du pays, à son unité, mais à la spéculation et à la division ethnique".
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En Mauritanie la loi foncière est constituée par une ordonnance adoptée en 1983, dans la foulée d’une loi annonçant l’interdiction de l’esclavage datant de 1981.
Ce texte originel "à l’esprit révolutionnaire" dont l’objectif était de permettre l’accès à la terre aux anciens esclaves, promulgué sous le régime d’exception du colonel Mohamed Khouna ould Haidallah "a finalement été galvaudé par la pratique vicieuse des préfets et des gouverneurs, qui ont violé toutes les dispositions destinées à encadrer la mise en œuvre", déclarait fin août Sarr Mamadou, président du Forum national des organisations de droits humains (FONADH), un collectif d’une vingtaine d’ONG.