Avec 35% des votes comptabilisés peu avant 18H00 GMT, le Congrès national africain (ANC) se plaçait sous la barre fatidique des 50% avec 42,3% des suffrages exprimés, selon la commission électorale (IEC).
Le plus grand parti d’opposition (Alliance démocratique, DA, centre libéral) cumulait moins de 25%. Les radicaux de gauche des Combattants pour la liberté économique (EFF) rassemblaient 9% des voix, tout comme le tout récent parti Umkhonto We Sizwe (MK) du sulfureux ex-président Jacob Zuma.
Les grandes villes, notamment Johannesburg et Durban, ne sont pas encore comptabilisées, a mis en garde la commission électorale.
La participation s’établit actuellement à 58,7%, soit une baisse par rapport aux 66% enregistrés lors des dernières législatives de 2019.
Les résultats définitifs ne sont pas attendus avant samedi au plus tôt. Mais ces résultats partiels reflètent pour l’instant les prévisions des experts et enquêtes d’opinion des dernières semaines.
Après trente ans d’une loyauté sans faille à l’égard de l’ANC, qui a libéré l’Afrique du Sud du régime raciste de l’apartheid, les électeurs devraient faire perdre, pour la première fois, au parti de Nelson Mandela sa majorité historique. Les 400 députés de la nouvelle Assemblée devront ensuite élire le président courant juin.
Pour nombre des 62 millions de Sud-Africains, le parti qui avait promis aux premières élections multiraciales en 1994 l’éducation, l’eau et un toit pour tous, n’a pas tenu ses engagements: la criminalité atteint des records, la pauvreté et les inégalités vont croissant.
Le quotidien est aussi rongé par des coupures d’eau et d’électricité. Et les affaires de corruption impliquant ses hauts responsables a fini d’entamer une confiance déjà mise à mal.
Alliances et coalition en vue
«J’ai bon espoir que l’ANC se rendra compte qu’on n’a plus besoin de lui», dit à l’AFP Shaun Manyoni, un étudiant de 21 ans, rencontré jeudi dans le centre de Johannesburg.
Dans la province zouloue (KZN, est) et bastion traditionnel de l’ANC où l’armée est déployée jeudi, le MK est pour le moment en tête avec plus de 43% des voix contre 21% pour l’ANC.
«Ma mère et moi avons voté MK», lance bravache Londi Mbatha, 20 ans. «Avec l’ANC, le chômage n’a fait qu’augmenter, la jeunesse et la formation ont été laissées de côté».
«Le MK est vraiment venu grignoter des voix à l’ANC», souligne le professeur en politique Siphamandla Zondi interrogé par l’AFP. De nombreux observateurs prédisent que la province clef, qui rassemble plus de 20% de l’électorat du pays, tombera aux mains de Jacob Zuma.
L’ancien chef d’Etat (2009-2018) de 82 ans, déclaré inéligible quelques jours avant le scrutin, bénéficie encore d’un fervent soutien populaire particulièrement dans son fief du KZN.
L’ANC, qui détient actuellement 230 sièges de députés (57,5%) devrait rester le plus gros parti au Parlement. Mais s’il passait sous la barre des 50% des voix, il devrait se résoudre à nouer des alliances et tenir des négociations pour la formation d’un gouvernement de coalition.
Selon l’analyste politique Susan Booysen, l’ANC devra décider s’il se rapproche des velléités libérales de la DA, qui a promis de «sauver l’Afrique du Sud» et son économie, ou des demandes «erratiques» de l’EFF, comme la redistribution de terres et la privatisation des mines.
Le parti au pouvoir devra aussi déterminer s’il est disposé à faire un pacte avec le MK. Les deux mouvements «ont des politiques et des tendances similaires», estime M. Zondi.
Mais le fossé entre Cyril Ramaphosa et Jacob Zuma, ennemis politiques de longue date, sera difficile à combler, selon les experts, qui s’accordent à dire que quelque soit le scenario, l’ANC tout-puissant ressortira affaibli du scrutin.