Les Sud-Africains doivent renouveler le 29 mai leur Parlement, qui désignera ensuite le prochain président. M. Zuma, 82 ans, est candidat sur la liste du petit parti radical récemment créé Umkhonto We Sizwe (MK, «Lance de la nation» en zoulou). Pilier du Congrès national africain (ANC) au pouvoir depuis trente ans, il avait créé la surprise en annonçant en décembre soutenir le MK. L’ANC l’avait suspendu en janvier.
«Le retour de M. Zuma illustre sa colère contre l’ANC», explique à l’AFP l’analyste politique Susan Booysen. «Pour ses soutiens, le MK est une forme de revanche loyale».
Président de 2009 à 2018, le politicien habile et charismatique encore poursuivi pour corruption avait été forcé à la démission après une série de scandales. Mais l’ancien «combattant de la liberté» a toujours bénéficié d’un fervent soutien populaire, conservant une influence au cœur de la machine politique.
Sa condamnation à 15 mois de prison pour outrage en 2021 devait toutefois empêcher ses velléités de participer au prochain scrutin. Fin mars, la commission électorale (IEC) a invalidé sa candidature, rappelant qu’une personne condamnée à plus de 12 mois de prison ne peut se présenter.
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Le parti de M. Zuma a porté l’affaire devant la justice et ça sera finalement à la Cour constitutionnelle saisie par l’IEC de se prononcer sur l’éligibilité de l’ancien chef d’Etat et mettre fin à des semaines d’un débat passionné autour d’une des figures les plus clivantes du pays.
Jacbo Zuma «s’accroche au pouvoir», observe le professeur en politique Ongama Mtimka, il «redoute de vivre comme un citoyen ordinaire» susceptible, comme il l’a expérimenté lui-même, de se retrouver derrière les barreaux.
«Reprendre le pays»
Le soutien de Jacob Zuma est particulièrement bien ancré dans son fief du KwaZulu-Natal (est) et parmi les dix millions de Zoulous qui l’appellent affectueusement par son nom de clan «Msholozi».
Son incarcération en 2021 avait été suivie d’une vague d’émeutes et de pillages sans précédent en Afrique du Sud depuis la fin de l’apartheid, faisant plus de 350 morts.
Avec la montée des tensions depuis le début de la campagne électorale entre l’ANC et le MK, les autorités sont vigilantes face à de possibles troubles. Des membres du parti de Jacob Zuma ont promis sur les réseaux sociaux «l’anarchie dans le pays» et «des émeutes comme jamais vu» si les tribunaux mettaient des barrières au parti avant les élections.
Chantant et dansant devant ses partisans, M. Zuma a plusieurs fois appelé à «reprendre le pays».
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Selon la sociologue Leslie Dikeni, son objectif n’est pas tant d’accéder à nouveau à la fonction suprême que «d’éparpiller le soutien à l’ANC».
Et les multiples recours en justice permettent au MK «de continuer à faire les gros titres et unir le parti autour d’un discours de persécution» de Jacob Zuma, a relevé sur X le commentateur politique Sizwe Mpofu-Walsh.
L’ANC, embourbé dans les affaires et tenu pour responsable d’une économie plombée par un chômage endémique et une pauvreté croissante, craint de perdre pour la première fois en mai sa majorité parlementaire et d’être contraint de former un gouvernement de coalition.
Selon un dernier sondage publié cette semaine, le MK deviendrait la troisième force politique du pays, avec 13% d’intentions de vote. L’ANC plongerait à 37% dans les urnes en mai, contre 25% pour le premier parti d’opposition l’Alliance démocratique (DA).
L’ANC a multiplié les recours contre le MK, notamment pour que le parti change de nom et de logo. MK était pendant la lutte contre l’apartheid le nom de la branche armée de l’ANC.