Afrique du Sud: ouverture des bureaux de vote pour des législatives à haut risque pour l’ANC

Le président du Congrès national africain (ANC) et président sud-africain Cyril Ramaphosa (2e à droite) réagit en votant au bureau de vote de l'école primaire Hitekani à Soweto le 29 mai 2024, lors des élections générales en Afrique du Sud.. AFP or licensors

Le 29/05/2024 à 08h36

L’Afrique du Sud a commencé à voter aux législatives les plus disputées depuis la fin de l’apartheid, l’ANC au pouvoir depuis 30 ans risquant de perdre pour la première fois sa majorité absolue au Parlement.

A Soweto, immense township près de Johannesburg, les premiers électeurs, doudoune ou châle sur les épaules pour braver le froid de cette matinée d’hiver austral, ont pris place dans la queue pour voter dans l’école primaire où le président Cyril Ramaphosa, 71 ans, est attendu dans la matinée.

«Je me suis levée tôt pour voter pour le parti que j’aime, celui qui a fait de moi ce que je suis aujourd’hui», a déclaré à l’AFP Agnes Ngobeni, 76 ans, faisant peu de mystère de sa loyauté à l’égard de l’ANC. «Mon vote comptera encore aujourd’hui», a ajouté la grand-mère, tout sourire.

En pays zoulou (Est), Bhekumuzi Shange, 81 ans, qui «n’a jamais aimé l’ANC», était aussi parmi les premiers à se présenter sur un chemin de terre menant à l’école primaire de Ntolwane, a également constaté l’AFP.

Les bureaux resteront ouverts jusqu’à 21 heures (19H00 GMT) en cette journée fériée. Les résultats définitifs ne sont pas attendus avant le weekend. C’est le Parlement qui élira ensuite le prochain président courant juin.

Lundi et mardi déjà, plus de 1,6 million d’électeurs - invalides, personnes âgées, détenus, policiers ou journalistes - avaient pu voter de manière anticipée.

Quelque 27,6 millions d’inscrits voteront pour des listes, à la proportionnelle. Ils doivent cocher deux bulletins distincts pour élire leurs députés: un bleu comptant des listes composées au niveau national, et un deuxième de couleur orange, présentant en gros les mêmes partis mais avec un panachage d’élus plus locaux.

Enfin, ils doivent former une croix sur un troisième bulletin, de couleur rose, pour élire leurs assemblées provinciales et repartir le pouce teinté d’encre indélébile, pour limiter les fraudes.

Fin de l’hégémonie de l’ANC

Ce scrutin est «sans aucun doute le plus imprévisible depuis 1994c», relève l’analyste politique Daniel Silke.

En raison d’une désillusion croissante à l’égard de l’ANC, liée à «son incapacité à assurer une croissance économique et créer des emplois» notamment, mais aussi à juguler pauvreté, inégalité, criminalité ou fourniture d’eau et d’électricité, le parti dominant doit se préparer à «un résultat potentiellement inférieur à 50%».

Ce qui signifie, si ce scénario était confirmé, qu’il devra former une coalition pour se maintenir au pouvoir et «aura besoin d’un ou de plusieurs partenaires pour gouverner». La nature des ces alliances, plutôt vers le centre libéral ou sur sa gauche, déterminera «l’orientation future de l’Afrique du Sud».

Si le score de l’ANC est meilleur qu’annoncé (entre 40 et 47% selon les sondages), à savoir juste en dessous des 50%, il lui suffira alors de quelques parlementaires issus de petits partis pour maintenir sa ligne générale.

La participation a régulièrement baissé au fil des quinquennats, passant de 89% en 1999 à 66% aux dernières élections en 2019.

En raison d’une opposition morcelée, tous les observateurs s’attendent à ce que l’ANC reste le premier parti au Parlement, où il compte actuellement 230 sur 400 députés.

Mais sa «puissance» liée à son aura d’ancien mouvement de libération, qui a sorti le pays des griffes de l’apartheid, s’affaiblit. «Cela crée bien sûr des opportunités» pour le pays, relève encore M. Silke, «mais dans l’intervalle, cela promet un avenir immédiat instable et imprévisible».

Le premier parti d’opposition, l’Alliance démocratique (DA), qui promet de «sauver l’Afrique du Sud» et notamment son économie, pourrait rafler environ 25% des suffrages exprimés.

Mais la plus grande menace pour l’ANC pourrait provenir du petit parti (MK) mené par l’ancien président Jacob Zuma, qui pourrait séduire jusqu’à 14% des électeurs, capitalisant sur les déçus du parti au pouvoir.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 29/05/2024 à 08h36