Le calme est revenu au sommet de l’Etat, après des jours de grande incertitude. L’ANC, au pouvoir depuis la fin de l’apartheid et qui se réunit lundi pour discuter du sort du président, semble avoir trouvé une majorité pour le soutenir, en dépit de profondes divisions sur fond de guerre de factions.
Une manifestation en vert, jaune et noir, les couleurs de l’ANC, est annoncée devant le bâtiment où se réuniront dans la matinée les caciques du parti, le tout-puissant Comité exécutif national (NEC), en présence du président.
En chemise bleue, visiblement détendu et même hilare, Ramaphosa, s’est adressé dimanche à quelques journalistes réunis devant ce centre de conférences, où se tenait déjà une réunion de délégués ANC. Ces militants ont préféré, pour discuter de l’affaire le concernant, qu’il n’y participe pas. «C’est toujours préférable», a-t-il reconnu en souriant.
Jeudi dernier, croit savoir la presse locale, «Cyril», comme l’appellent familièrement les Sud-Africains, était prêt à jeter l’éponge, au lendemain de la publication du rapport d’une commission parlementaire, selon lequel il «a pu commettre» des actes contraires à la loi dans le scandale de «Phala Phala», du nom d’une de ses propriétés.
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Une plainte, déposée en juin, l’accuse d’avoir tenté de taire un cambriolage chez lui en février 2020, en ne le déclarant ni à la police ni au fisc: les malfaiteurs avaient alors emporté 580.000 dollars en liquide... camouflés sous les coussins d’un canapé.
Ramaphosa clame son innocence depuis des mois, mais ses explications n’ont pas convaincu la commission parlementaire. Il n’est cependant pas inculpé dans cette affaire, l’enquête de police se poursuit.
Bataille politique
Samedi, son porte-parole a annoncé qu’outre la bataille politique qu’il va mener pour se maintenir à son poste et même briguer un deuxième mandat, lors d’une conférence cruciale de l’ANC mi-décembre, Ramaphosa va se bagarrer aussi dans les tribunaux, où il va contester la validité de ce rapport.
«Il est dans l’intérêt (...) de notre démocratie, bien au-delà de la présidence Ramaphosa, qu’un rapport aussi bancal soit remis en question, en particulier lorsqu’il est utilisé comme point de référence pour destituer un chef d’État en exercice», a expliqué à l’AFP Vincent Magwenya samedi.
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Le Parlement, réuni mardi en session extraordinaire à la veille des grandes vacances de l’été austral, doit voter pour décider de lancer, ou non, une procédure de destitution du président sur la base de ce rapport.
Il faut pour déclencher la procédure une majorité de 50%. Si elle était lancée, il faudrait alors une majorité des deux tiers pour parvenir à destituer le président. En sachant que l’ANC, malgré de fortes divisions, détient une majorité confortable au Parlement.
«En fin de compte, cette décision sur la destitution sera entièrement politique», souligne une source judiciaire qui tient à son anonymat, soulignant que les présidents américains Bill Clinton ou Donald Trump y ont échappé «parce que les majorités nécessaires n’ont pas pu être trouvées par leurs adversaires».
Il n’est même pas sûr que le Parlement vote pour lancer la procédure. Suspense donc.
De nombreux juristes - ils se sont fiévreusement succédé ces derniers jours sur les plateaux télé, relèvent les défauts du rapport accusant le président. Faute d’accès à l’enquête pénale, qui est en cours, il se base largement sur du «ouï-dire», multipliant suppositions et questions rhétoriques sur la seule base de la plainte initiale, déposée par un opposant notoire au président, et des déclarations de ce dernier.