Ethiopie: un chef militaire tigréen nommé à la tête du Tigré pour apaiser les tensions

Le lieutenant-général Tadesse Werede (assis) nommé président de l'administration intérimaire de cette région du nord de l'Ethiopie, par le Premier ministre Abiy Ahmed (debout à gauche).

Le 08/04/2025 à 12h39

Le lieutenant-général Tadesse Werede, chef des forces de défense du Tigré (TDF), a été nommé mardi à la tête de l’administration intérimaire de cette région du nord de l’Ethiopie, une désignation visant à éloigner le spectre des violences qui semblait se raviver dans la zone.

Le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), qui gouverne la région après avoir été hégémonique pendant plus de trois décennies en Ethiopie, connaissait ces derniers mois de fortes turbulences internes.

Les autorités fédérales avaient annoncé fin mars le remplacement de l’ex-président de l’administration intérimaire Getachew Reda, qui était de plus en plus marginalisé par Debretsion Gebremichael, le numéro 1 du TPLF.

Dans un document de l’administration intérimaire reçu par l’AFP, signé par le général Tadesse, celui-ci promet de s’«acquitter avec diligence» d’une série de responsabilités (désarmement, gouvernance, préparation d’élections, etc.) «dès (sa) nomination en tant que président».

Le général, qui a été l’adjoint de Getachew Reda ces deux dernières années et dirigeait jusqu’à présent les forces tigréennes, «s’est vu confier ce rôle de leader», a de son côté déclaré sur X le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, qui l’a nommé. Il avait aussi annoncé fin mars le prolongement d’un an le mandat du gouvernement intérimaire.

«Il comprend bien les forces et les faiblesses de l’administration précédente et beaucoup pensent qu’il est bien placé pour guider le Tigré dans cette transition critique», a-t-il encore estimé.

L’administration intérimaire a été mise en place dans le cadre de l’accord de paix signé à Pretoria, en Afrique du Sud, qui a mis fin à la guerre au Tigré.

Ce conflit, l’un des plus meurtriers de ces dernières décennies avec au moins 600.000 morts, selon l’Union africaine, a opposé les rebelles tigréens, avec le général Tadesse à leur tête, aux forces fédérales, appuyées par des milices locales et l’armée érythréenne, entre novembre 2020 et novembre 2022.

Les armes se sont tues dans la région, mais les retards pris dans la mise en place de l’accord, notamment le retour d’environ un million de personnes toujours déplacées, ont nourri les divisions au sein du TPLF.

Tâches immenses

Tadesse Werede est «aujourd’hui le dirigeant avec le plus de soutiens et qui inspire le respect au sein de la population tigréenne», affirme à l’AFP Kjetil Tronvoll, professeur de l’Oslo New University College, spécialiste de la Corne de l’Afrique.

Mais les tâches qui l’attendent sont immenses, «entre stabiliser la situation politique au Tigré, et essayer de négocier la mise en place des points manquants de l’accord de paix», notamment le retour des déplacés, poursuit-il.

Le conflit au sein du TPLF avait pris une tournure particulièrement inquiétante début mars, quand M. Getachew avait limogé plusieurs hauts gradés au sein des TDF, accusés de fomenter un coup d’Etat.

Des hommes en armes proches de Debretsion Gebremichael avaient ensuite pris le contrôle de d’Adigrat, deuxième ville de la région, délogeant l’édile nommé par l’administration intérimaire. Cette faction avait aussi pris le contrôle de la capitale Mekele.

Pour tenter de mettre fin aux tensions dans la région, les autorités fédérales ont donc décidé de placer à sa tête un militaire de carrière.

Tadesse Werede, né en 1958 à Mekele, fait ses premières armes dans la lutte contre le régime communiste du Derg, qui chute en 1991. Après avoir travaillé au sein du ministère de la Défense, il est entre 2011 et 2013 commandant en chef de la force onusienne pour la région d’Abyei, une zone contestée entre Soudan et Soudan du Sud.

Vice-président de l’administration intérimaire, Tadesse Werede, qui n’est officiellement plus membre du TPLF, n’avait pas pris position dans ce conflit interne. Il s’était abstenu de faire le moindre commentaire lorsque 200 commandants des TDF avaient demandé en janvier le départ de M. Getachew.

Mi-mars, il avait affirmé que le risque d’un conflit dans la région était «sans fondement et ne devrait pas être une source d’inquiétude».

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 08/04/2025 à 12h39