Gabon: la course contre la montre pour des élections législatives et municipales historiques

Un électeurs devant des listes électorales.

Le 08/09/2025 à 07h38

VidéoÀ l’approche du double scrutin législatif et municipal du 27 septembre 2025, le Gabon s’apprête à tourner une page cruciale de son histoire, porté par une mobilisation électorale sans précédent. Premières consultations depuis la transition ouverte après le coup d’État de 2023 et l’élection présidentielle d’avril 2025, qui a confirmé Brice Clotaire Oligui Nguema à la tête du pays, elles constituent une étape déterminante dans la restauration des institutions démocratiques.

Depuis le 1er septembre 2025, le ministère de l’Intérieur a instauré deux périodes exceptionnelles d’inscription sur les listes électorales, la dernière courant jusqu’au 10 septembre. Cette fenêtre administrative, destinée aux retardataires et aux nouveaux électeurs, révèle autant d’élans d’engagement que de dysfonctionnements persistants. Pour les candidats en lice, tel David Ella Mintsa, il s’agit d’une ultime occasion de convaincre et de mobiliser un électorat parfois désabusé.

Dans les circonscriptions, les soutiens redoublent d’efforts pour séduire les électeurs et contrer l’abstention. David Mintsa, figure politique, incarne cette dynamique. Ses équipes arpentent les centres d’inscription pour ramener vers les urnes les électeurs démobilisés ou ceux ayant changé de province. Son approche, méthodique et ciblée, se manifeste notamment dans sa volonté d’intégrer les jeunes devenus majeurs depuis le dernier scrutin. «Il y a certains de nos électeurs qui, jusqu’en 2023, votaient dans des provinces. Nous les ramenons vers nous. Et nous avons aussi des jeunes qui viennent d’atteindre 18 ans : nous devons leur montrer leur droit de citoyen, celui de s’inscrire et de voter.»

Malgré les efforts affichés par la Commission nationale d’organisation et de coordination des élections (CNOCER), la phase de basculement des électeurs demeure semée d’embûches techniques. Des citoyens découvrent, à leur grande frustration, que leur nom ne figure pas sur les listes affichées, malgré leurs démarches. «Comme je passais par là, j’ai constaté qu’il y avait déjà des listes affichées. Je me suis arrêté pour voir s’il y avait mon nom. J’avais fait le basculement pour l’école publique de Dragages. Malheureusement, je ne trouve pas mon nom sur les listes.»

Face à ces anomalies, des acteurs de la société civile se mobilisent pour préserver l’intégrité du processus. Tomé Jores Cyril, bloc-notes en main, inspecte les centres de vote à la recherche d’inscriptions douteuses ou frauduleuses. Sa tâche fastidieuse, mais essentielle, vise à garantir que seules les personnes légalement inscrites participent au scrutin. Son action rappelle que la transparence électorale repose autant sur l’engagement citoyen que sur les institutions. «Nous travaillons pour relever les intentions de vote. Malheureusement, nous constatons que certaines personnes ont menti sur les lieux de vote. Car, lorsqu’on vérifie les données, certains noms n’apparaissent pas.»

Ces élections législatives et locales dépassent le simple renouvellement des assemblées. Elles doivent clore la période de transition ouverte en août 2023 et inaugurer une nouvelle ère institutionnelle. Le scrutin s’inscrit dans un paysage politique bouleversé par l’émergence du Rassemblement des bâtisseurs (RDB), formation du président Oligui, qui aspire à devenir la première force politique du pays. Le taux de participation, record de 87% lors de la présidentielle d’avril 2025, constituera un baromètre clé de la confiance des Gabonais dans ce processus.

Alors que la campagne officielle s’ouvrira le 17 septembre, les derniers jours ont été marqués par une frénésie d’activités pour corriger les imperfections et convaincre les électeurs de jouer le jeu démocratique. Les dysfonctionnements observés, bien que préoccupants, apparaissent peut-être comme le prix d’un processus se voulant authentiquement inclusif. Le succès de ce scrutin ne se mesurera pas seulement à la régularité technique du vote, mais aussi à la capacité de l’ensemble des acteurs – État, partis et société civile – à garantir que chaque voix gabonaise puisse être entendue.

Par Ismael Obiang Nze (Libreville, correspondance)
Le 08/09/2025 à 07h38