La «gabonisation» des postes dans les stations-service n’est plus une simple annonce ministérielle, mais une réalité qui façonne désormais le quotidien de nombreux jeunes Gabonais. Décrétée début septembre par le ministre du Pétrole et du Gaz, Sosthène Nguema Nguema, cette politique ambitieuse vise à libérer près de 900 emplois pour les nationaux, marquant une étape cruciale dans la lutte contre le chômage des jeunes.
Si l’échéance de fin septembre est passée, le bilan sur le terrain reste contrasté. Certaines enseignes ont anticipé la mesure en recrutant exclusivement du personnel local. D’autres, à l’image de TotalEnergies, sont encore en phase de transition. Pour l’heure, l’arrivée de stagiaires gabonais s’accommode de travailleurs étrangers sur certains sites. Le gouvernement privilégie une phase de sensibilisation avant d’envisager d’éventuelles sanctions.
Parmi les premiers bénéficiaires, des jeunes comme Lionel Biyogue, 28 ans, voient enfin l’horizon se dégager. Après avoir enchaîné les «petits boulots», il a trouvé une stabilité dans un métier qui était autrefois dévalorisé.
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«Avant, ça suscitait des moqueries de voir un Gabonais pompiste. Mais de nombreux jeunes comme moi ont compris que c’est un travail noble. C’est vrai que c’est épuisant à la fin de la journée mais j’avoue que c’est un métier passionnant qui vous met en contact avec monsieur tout le monde», dit-il.
Cette reconquête de l’estime de soi passe aussi par un professionnalisme retrouvé. Comme Thibault Ndong, en stage depuis trois semaines à la station Bessieux de Libreville, de nombreux jeunes intègrent les rigueurs du métier avec sérieux, espérant décrocher un contrat stable. «Imaginez-vous en train de partir de chez vous en voiture sans carburant, vous allez vous diriger vers une station. Et pour y être servi, il faudrait trouver une équipe en poste. Donc la première chose ici c’est d’être ponctuel pour servir la clientèle. Nous nous relayons chaque jour avec le respect des horaires de travail comme boussole», explique-t-il.
Cette politique de nationalisation se met en place progressivement, avec l’adhésion des acteurs de terrain.
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Simplice Zomo, gérant d’une station au quartier Nombakélé à Libreville, illustre cette mise en œuvre. Sa station était déjà bien avancée dans le processus, et la mesure gouvernementale a permis de combler les derniers postes encore occupés par des étrangers. «J’avais déjà 90% de mon personnel qui est gabonais. Le seul poste qui n’était pas pourvu, c’est celui de graissage. Après la mesure gouvernementale, la direction a mis en place un processus progressif d’embauche des nationaux. J’ai un jeune Gabonais en phase d’apprentissage. On a des profils divers, certains étaient au chômage et d’autres avaient des qualifications mais étaient sans emploi», déclare-t-il.
Au-delà de la simple création d’emplois, la «gabonisation» des postes dans des secteurs sensibles, comme l’énergie, symbolise la volonté des pouvoirs publics de renforcer l’inclusion des nationaux dans les chaînes de valeur économiques du pays.
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Cette préférence nationale dans les stations-service a été précédée par les secteurs de la pêche et du transport urbain, majoritairement tenus par des expatriés. Le secteur financier est également dans le viser du gouvernement qui veut imposer des dirigeants nationaux à la tête des sociétés financières.