La motion a été approuvée par 281 députés sur les 349 membres de l’Assemblée nationale, soit plus des deux tiers requis, a déclaré le président du Parlement Moses Wetangula. Il y a eu 44 voix contre et une abstention, selon la même source.
La motion doit désormais être soumise au Sénat où 45 voix seront nécessaires.
Soutenu par une équipe d’une vingtaine d’avocats, M. Gachagua s’est défendu devant les députés durant près de deux heures mardi soir, en s’appuyant sur un document de 500 pages.
Il a rejeté les accusations à son encontre, qu’il avait qualifiées lundi soir de «pure propagande» et de «complot visant à (le) chasser du pouvoir en raison d’autres considérations politiques».
Déposée il y a une semaine par un député de la coalition présidentielle (Kenya Kwanza), la motion liste onze motifs de destitution dont ceux d’«atteinte à l’unité nationale», d’«insubordination» envers le président ainsi que de nombreuses suspicions de « crimes économiques » (détournements de fonds publics, conflits d’intérêts, abus de pouvoir...).
Elle affirme notamment qu’«au cours des deux dernières années, (il) a accumulé de manière inexplicable un portefeuille immobilier colossal estimé à 5,2 milliards de shillings (environ 36 millions d’euros), provenant principalement de produits présumés de la corruption et du blanchiment d’argent».
Durant sa conférence de presse de plus de deux heures lundi soir, le vice-président, âgé de 59 ans, s’est dit «innocent», réfutant point par point les accusations, notamment sur son patrimoine qu’il dit avoir hérité de son frère et qu’il a également constitué légitimement lorsqu’il était dans le monde des affaires.
«Jusqu’au bout»
M. Gachagua, en rupture ouverte avec le président William Ruto depuis plusieurs mois, a répété que cette procédure «ne peut pas» avoir été lancée sans l’accord du chef de l’Etat.
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Le président de l’Assemblée nationale a vivement critiqué les déclarations du vice-président à la veille du vote.
«Je n’agirai pas en tant que juge dans cette affaire, mais je dois dire que la conduite du vice-président était, pour le moins, détestable, surtout compte tenu des procédures parlementaires en cours», a-t-il déclaré avant les débats mardi.
William Ruto, qui est resté silencieux sur le sujet, avait choisi M. Gachagua comme colistier pour la présidentielle d’août 2022, malgré sa réputation sulfureuse, déjà marquée par plusieurs accusations de corruption.
Doté d’un solide réseau d’influence notamment dans la région stratégique du Mont Kenya, cet homme politique de l’ethnie kikuyu - majoritaire dans le pays - a joué un rôle crucial dans la victoire de M. Ruto face à son rival Raila Odinga.
Mais les relations entre les deux hommes à la tête de l’Etat se sont détériorées notamment depuis un mouvement de contestation antigouvernementale qui a secoué le pays en juin et juillet.
Ses détracteurs l’accusent de ne pas avoir soutenu le chef de l’Etat face aux manifestations qui demandaient sa démission. La répression de ce mouvement a fait plus de 60 morts.
M. Gachagua s’estime depuis mis à l’écart par le président, qui a en revanche entamé un rapprochement avec le Mouvement démocratique orange (ODM) de M. Odinga.
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Il a exclu toute possibilité de démissionner, promettant une bataille judiciaire si nécessaire: «Je me battrai jusqu’au bout (...) Je n’ai aucun doute que j’obtiendrai justice et que cette procédure de destitution sera annulée».
«Patience politique»
En cas d’adoption, M. Gachagua serait le premier vice-président écarté du pouvoir dans le cadre d’une telle procédure, instaurée dans la Constitution de 2010. Mais il pourrait contester la décision en justice.
En 1989, le vice-président Josephat Karanja avait démissionné dans des conditions similaires, avant un vote de défiance l’accusant de saper l’autorité du président Daniel arap Moi.
Pour Dismas Mokua, analyste en risques politiques, l’ambitieux Gachagua s’est imaginé en «coprésidence» et «n’a pas compris l’article 147 (de la Constitution), qui définit clairement les rôles et les responsabilités du vice-président».
«Il n’a pas eu la patience politique stratégique nécessaire pour ce rôle», estime-t-il.
Sa possible destitution ne devrait pas provoquer de manifestations spontanées, estime Dismas Mokua, mais «la probabilité de troubles organisés est très élevée».