«En raison des violations répétées par l’État malien de notre espace aérien, le gouvernement algérien a décidé de fermer ce dernier à la navigation aérienne en provenance ou à destination de l’État malien, et ce à partir d’aujourd’hui, le 7 avril 2025b», a indiqué le ministère, sans donner d’autres précisions.
L’Algérie a rejeté, dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères, les «graves accusations» portées par le Mali qui affirme qu’Alger a abattu l’un de ses drones sur le territoire malien.
Selon Alger, les données radars de son ministère de la Défense «établissent clairement la violation de l’espace aérien de l’Algérie» par un drone de reconnaissance venu du Mali.
L’Algérie a dit devoir se résoudre à «appliquer la réciprocité et procéder au rappel, pour consultation, de ses ambassadeurs au Mali et au Niger et à différer la prise de fonction de son nouvel ambassadeur au Burkina Faso». Alger a «regretté l’alignement inconsidéré du Niger et du Burkina sur les thèses fallacieuses du Mali».
En début de soirée, le ton est monté d’un cran supplémentaire avec l’annonce par le ministère algérien de la Défense (MDN) de la fermeture immédiate de l’espace aérien algérien à tous les avions ou aéronefs, «en provenance ou à destination du Mali». Cela inclut donc les vols commerciaux Alger-Bamako.
Les «allégations mensongères» venant de Bamako «ne dissimulent que très imparfaitement la recherche d’exutoires et dérivatifs à l’échec manifeste (d’)un projet putschiste qui a enfermé le Mali dans une spirale d’insécurité, instabilité, désolation et dénuement», a fustigé Alger.
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Le MDN avait annoncé le 1er avril avoir abattu «vers minuit, à proximité de la ville frontalière de Tin-Zaouatine un drone de reconnaissance armé ayant pénétré notre espace aérien» mais n’avait pas précisé sa provenance. «Il ne s’agit pas de la première violation par un drone malien de l’espace aérien de l’Algérie mais bien de la troisième en quelques mois», selon Alger.
«Toutes les données du ministère de la Défense algérien établissent une violation de l’espace aérien de l’Algérie sur une distance de 1,6 km» dans la nuit du 31 mars au 1er avril, a précisé lundi le ministère des Affaires étrangères.
A l’opposé, selon Bamako, une enquête «a conclu avec une certitude absolue que le drone a été détruit suite à une action hostile préméditée du régime algérien».
En conséquence, les chefs d’Etats de l’Alliance des Etats du Sahel (AES: Mali, Niger et Burkina) ont décidé de «rappeler pour consultations les ambassadeurs des Etats membres accrédités à Alger», a annoncé dimanche soir l’AES.
Selon le gouvernement malien, dirigé par des militaires depuis un double coup d’Etat en 2020 et 2021, l’épave du drone a été localisée à 9,5 kilomètres au sud de la frontière avec l’Algérie.
Le gouvernement malien a dit avoir convoqué l’ambassadeur d’Algérie au Mali et «élevé une vive protestation» après l’incident ayant visé son drone, dans un communiqué lundi soir.
«Dialogue stratégique»
La junte malienne a annoncé également son retrait avec effet immédiat du Comité d’état-major conjoint (CEMOC), basé en Algérie - une alliance de forces armées du Sahel contre le terrorisme - et une plainte devant des instances internationales «pour actes d’agression».
Les relations entre le Mali et son grand voisin du nord n’ont cessé de se dégrader ces dernières années, avec déjà un rappel réciproque d’ambassadeurs en décembre 2023 qui avait duré moins de deux mois.
Le Mali reproche à Alger d’entretenir une «proximité avec les groupes terroristes», notamment dans la région frontalière, où l’armée malienne et ses alliés russes ont subi en juillet dernier de lourdes pertes face à une rébellion à majorité touareg.
En janvier 2024, la junte malienne avait annoncé la «fin, avec effet immédiat», de l’accord de paix d’Alger, signé en 2015, longtemps jugé essentiel pour stabiliser le pays.
Le Mali est confronté depuis 2012 à une crise sécuritaire nourrie par les violences de groupes affiliés à Al-Qaïda et au groupe Etat islamique (EI), et de bandes criminelles communautaires.
Depuis sa prise du pouvoir en 2020, la junte a aussi rompu l’ancienne alliance avec la France et l’Europe pour se tourner vers la Russie, et a fait partir la mission de stabilisation des Nations Unies (Minusma).
Lundi lors d’une visite à Alger consacrant une réconciliation après une grave crise bilatérale, le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot a annoncé «un dialogue stratégique sur le Sahel» entre France et Algérie, sans donner de détails.
Une réunion des plus hauts responsables des renseignements est aussi prévue prochainement, notamment autour de la lutte anti-jihadiste.