Certains dirigeants africains ont en commun le monopole du pouvoir depuis des décennies. N’hésitant pas à recourir aux réformes constitutionnelles pour faire sauter les verrous de la limitation des mandats et d’âge, ils ont réussi à s’éterniser au pouvoir contre vents et marrées. Ces cinq chef d’État africains, toujours en poste, cumulent plus de 200 an d’exercice du pouvoir.
Le plus ancien d’entre eux, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, 45 ans au pouvoir en Guinée équatoriale, a vu se succéder, d’août 1979 à aujourd’hui, huit présidents américains: Jimmy carter (1977-1981), Ronald Reagan (1981-1989), George H.W. Bush (1989-1993), Bill Clinton (1993-2001), George W. Bush (2001-2009), Barack Obama (2009-2017), Donald Trump (2017-2021), Joe Biden (2021-202) et encore Donald Trump (depuis janvier 2025). Teodoro Obiang Nguema Mbasogo est le président le plus ancien en exercice au monde.
Lire aussi : Afrique: est-ce le début de la fin des dinosaures politiques?
La faiblesse de l’alternance politique en Afrique explique en partie la faible démocratisation du continent, comme l’illustre le dernier classement Democracy Index 2024 de the Economist Intelligence Unit (EIU).
L’Equatoguinéen Teodoro Obiang Nguema Mbasogo: le plus ancien président en exercice au monde
Chef d’État de la Guinée équatoriale depuis le 3 août 1979, après avoir renversé son oncle Francisco Macias Nguéma, il affiche actuellement 45 ans et 7 mois de pouvoir absolu sur le petit pays d’Afrique centrale peuplé d’à peine deux millions d’habitants. Il est ainsi le plus ancien dirigeant politique au pouvoir en Afrique dépassant l’empereur d’Éthiopie Hailé Sélassié Ier (44 ans, 5 mois et 9 jours de pouvoir) et les anciens présidents Omar Bongo (42 ans) et Mouammar Kadhafi (42 ans).
Ces cinq plus anciens présidents au pouvoir en Afrique cumulent plus de 200 ans à la tête de leurs pays. Le moins ancien de ce club, Issa Afwerki, dirige l'Érythrée depuis son indépendance en 1993.. le360 Afrique/W. Belfkih
Né le 5 juin 1942, il est militaire de profession et a occupé plusieurs postes sous la présidence de son oncle avant de l’évincer 1979 et de prendre les rêne du pouvoir en tant que président du Conseil militaire suprême (1979-1982) qui dirige le pays et puis comme président de la République depuis 1982. Depuis cette date marquant l’entrée du pays dans l’ère de la démocratie et puis du multipartiste en 1992, il est réélu avec des scores à la soviétique: 99% des voix en 1989, 97,8% en 1996, 97,1% en 2002, 95,8% en 2009, 93,5% en 2016 et 97,0% en 2022.
Lire aussi : Guinée équatoriale: Teodoro Obiang Nguema un record mondial de longévité au pouvoir
À bientôt 83 ans, Teodoro Obiang Nguema compte rester président et pour longtemps… Cet abonnement au pouvoir est à l’origine du 156e rang mondial (sur 167 pays) qu’occupe le pays dans le Democracy Index 2024 de the Economist Intelligence Unit.
Paul Biya du Cameroun: le plus vieux président en exercice au monde
Né le 13 février 1933, Pau Biya, né Paul Barthélemy Biya’a bi Myondo, est aujourd’hui, à 92 ans, le plus âgé président en exercice au monde. Destiné à devenir un homme d’église, Paul Biya, après l’obtention de son baccalauréat a poursuivi des études supérieures à Paris au Lycée Louis le Grand, à l’Université de la Sorbonne, à l’Institut d’études politique et à l’Institut des hautes études d’outre-mer, le tout sanctionné par un Diplôme d’études supérieures en Droit public en 1963. Ces diplômes font de Paul Biya l’un des rares dirigeants africains qui peut se prévaloir d’un tel parcours réalisé au lendemain des indépendances.
Un parcours académique qui le fit gravir rapidement les échelons sous le président Ahmadou Ahidjo, passant de chargé de mission à la présidence, à directeur de cabinet et ministre secrétaire général de la présidence, en passant par chef du gouvernement à partir de 1975 et successeur constitutionnel du président en 1979.
Lire aussi : Cameroun: «Je veux connaître un autre président», la fièvre politique s’empare des jeunes
En 1982, après la démission d’Ahmadou Ahidjo, il devient le président de la République du Cameroun. Depuis, il est à la tête de ce pays d’Afrique centrale et a remporté haut la main toutes les élections depuis l’avènement du multipartisme. Après plus de 42 ans au pouvoir, il sera très probablement candidat pour un nouveau mandat présidentiel à la tête du Cameroun lors de l’élection prévue en octobre 2025.
Le Cameroun occupe le 136e rang mondial dans Democracy Index 2024 avec un régime qualifié d’autoritaire, selon la classification de the Economist Intelligence Unit (EIU).
Denis Sassou-Nguesso: 40 ans au pouvoir en deux temps
Né le 23 novembre 1943 à Edou, Denis Sassou Nguesso a dirigé la république du Congo de 1979 à 1992, puis depuis 1997 à aujourd’hui, soit un cumul de 40 ans présidant aux destinées du Congo. C’est en mars 1979 que le Parti congolais du Travail (PCT), d’obédience marxiste-léniniste dont il est membre fondateur, a élu le Colonel Denis Sassou-Nguesso président de son Comité central et de droit président de la République pour cinq ans. Il restera à la tête du pays jusqu’en 1992, année durant laquelle il a perdu les élections face à Pascal Lissouba. Il revient au pouvoir en 1997 après avoir renversé le président élu dans les premiers mois de la guerre civile qui a embrasé le Congo Brazzaville.
Lire aussi : Congo-Brazzaville: Denis Sassou Nguesso réélu président avec 88,57% des voix
Militaire, formé à l’École nationale des Sous-Officiers d’active et l’École militaire de Cherchell en Algérie, Sassou Nguesso dirige depuis le pays en remportant tous les suffrages. En mars 2021, il a été réélu pour un 4e mandat, toujours sous les couleurs du Parti congolais du travail (PCT), avec un score de 88,57%. Après la réforme constitutionnelle de 2015 qui supprimé les article empêchant le président de briguer un autre mandat, il peut en conséquence se représenter et diriger le Congo jusqu’en 2031 !
Le Congo se situe au 128e rang mondial de Democracy Index 2024 et le régime est considéré comme autoritaire par the Economist Intelligence Unit (EIU).
Yoweri Museveni: plus de 39 ans de pouvoir en Ouganda
Yoweri Museveni a pris le pouvoir le 26 janvier 1986. Depuis ce jour, il est à la tête de l’Ouganda, soit plus de 39 ans et 1 mois. Parti en 1967 poursuivre des études en sciences économiques en Tanzanie dirigée alors par Julius Nyerere, il retourne en Ouganda en 1979 pour intégrer l’administration du président Milton Obote en tant membre des services secrets. Le coup d’État d’Idi Amin Dada, en janvier 1975, le pousse à l’exil en Tanzanie où il fonde le Front for national salvation. Il revient en Ouganda à la tête d’une guérilla soutenue par la Tanzanie en 1979.
Lire aussi : Congo-Brazzaville: Denis Sassou Nguesso réélu président avec 88,57% des voix
À la tête du Mouvement de résistance nationale (NRM), il parvient à chasser le président Milton Obote en janvier 1986 et accède à la présidence du pays. Ce dernier avait été élu président après la fuite en Arabie Saoudite d’Idi Amin Dada.
Né le 15 septembre 1944 à Ntungamo, Museveni dirige toujours le pays en multipliant les amendements constitutionnels qui lui garantissent de rester au pouvoir. Ainsi, en 2005, il supprime la limitations du nombre de mandats électifs à la tête du pays et s’offre un 3e mandat. Et en 2018, il fait sauter un autre verrou en supprimant la limite d’âge présidentielle avant de remporter l’élection de 2021.
L’Ouganda occupe le 98e rang mondial du classement Democracy Index 2024 de the Economist Intelligence Unit (EIU).
Isaias Afwerki, l’unique président depuis l’indépendance de l’Érythrée
Né le 2 février 1946 à Asmara, Issa Afwerki est l’unique président de l’Érythrée depuis son indépendance en de l’Éthiopie. Ayant rejoint le Front de libération de l’Érythrée en 1966, il gravit les échelon pour en devenir le chef en 1970 avant de former le Front de libération du peuple érythréen (FPLE) qu’il mènera à la victoire face à l’Éthiopie en mais 1991, après une guerre de 30 ans. Deux ans après cette victoire et suite à un référendum sur l’indépendance supervisé par les Nations unies, Afwerki est élu par l’Assemblée nationale érythréenne président de nouvel État en 1993. Et depuis, il dirige le pays considéré comme l’un des plus fermé au monde.
Dans le classement de the Economist Intelligence Unit, le régime érythréen, qualifié d’autoritaire, occupe le 153e rang mondial, sur 167 pays, en matière de démocratie.
Lire aussi : 3e mandat: faut-il brûler les constitutions africaines?
Ce tour d’horizon effectué, une question reste en suspens: ces dinosaures politiques vont-ils enfin laisser la place à la jeune génération? Mais il semble que, si certains préparent leurs fils à la succession, ces dirigeants ne comptent pas abandonner les rênes du pouvoir et suivre les traces de José Eduardo dos Santos. L’ancien doyen des présidents africains qui a régné en maitre absolu sur l’Angola durant 38 ans (septembre 1979-septembre 2017) avait quitté le pouvoir de sa propre volonté en 2017.