Face à Umaro Sissoko Embalo, président de la Guinée-Bissau et de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), dépêché par les pays de cette communauté dont est originaire la grande majorité des migrants subsahariens en Tunisie, le président tunisien Kaïs Saïed a tenté de faire baisser la tension qu’a suscitée son discours du 21 février dernier, qualifié de «haineux et raciste».
Dans une vidéo de la réception de son hôte ouest-africain, à Tunis, Saïed, qui commence à saisir la portée négative de ses propos, souligne que «cette situation concernant les “Africains” ne doit pas être interprétée par les langues malveillantes, comme cela a été le cas ces derniers jours. Elles ne savent pas de quoi elles parlent, elles divaguent.»
Et pour «prouver» qu’il n’est pas raciste, le chef de l’Etat tunisien, visiblement à court d’arguments, avance qu’il a «des membres de sa famille mariés à des Africains», oubliant peut-être que les Tunisiens, jusqu’à preuve du contraire, sont Africains, eux dont le pays était jadis nommé Afriquia et qui a donné son nom au continent. «Mes amis à la Faculté de Tunis étaient des Africains», poursuit Saïed, évoquant un «voisinage historique avec les cadres de la Banque africaine de développement lorsque le siège de cette banque a été déplacé à Tunis durant un certain de temps», lors de la guerre civile en Côte d’Ivoire.
Partant, Saïed explique que ce qui est regrettable, c’est «l’interprétation des propos afin de nuire à la Tunisie et à un certain nombre d’Etats africains». Pour lui, tous ceux qui ont trouvé son discours haineux et raciste «se sont trompés d’adresse et de personne».
Ainsi, celui qui a clairement utilisé l’expression «hordes de migrants» soutient que ses propos ont tout simplement été travestis, certainement par des comploteurs, comme il a l’habitude de qualifier ses opposants.
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Face à lui, Umaro Sissoko Embalo a joué la carte de la diplomatie en acceptant une «mal-interprétation» du discours de Saïed, expliquant que «le président de la Tunisie, le pays de Bourguiba, ne peut être xénophobe ou raciste». Cependant, si parler de «hordes de migrants» subsahariens, source de «violences et de crimes» et relevant d’une «entreprise criminelle» visant à «changer la composition démographique» de la Tunisie en la transformant en un «pays uniquement africain» dépourvue de sa «composante arabo-musulmane» n’est pas raciste, surtout de la part d’un chef d’Etat d’un pays de ce continent, alors Eric Zemmour peut continuer à prêcher sa «bonne parole».
Et en voulant défendre l’indéfendable, le président de la CEDEAO contredit même l’Union africaine (UA), qui a condamné les propos du président tunisien, appelant ses pays membres à «s’abstenir de tout discours haineux à caractère raciste». Tout est dit, sans gants, par Moussa Faki Mahamat, président de Commission de l’UA.
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D’ailleurs, les premiers à condamner ce discours et à le qualifier de «raciste et haineux» sont les Tunisiens de tous bords (ONG, personnalités, politiciens, sportifs...). Juste après ce discours, qui est intervenu après des semaines de calvaire des migrants subsahariens, victimes de contrôles au faciès suivis d’arrestations et de jugements dégradants n’épargnant même pas ceux qui sont en situation régulière, comme les étudiants, son discours a marqué une nouvelle étape dans ces violences.
Les expulsions de migrants de leurs logements, les agressions et arrestations se sont multipliées depuis lors en Tunisie, entraînant l’indignation de l’UA, de pays africains, ainsi que des sanctions de la Banque mondiale et des préoccupations du FMI…