M. Djemali, 81 ans, fondateur du Conseil tunisien des réfugiés (CTR), Abderrazek Krimi, chef de projet, détenus depuis un an et demi, et quatre responsables laissés libres sont accusés de «création d’une organisation» visant à «faciliter l’entrée clandestine» et l’«hébergement» de migrants.
A l’audience, la défense a réclamé le report du jugement sur le fond, sollicitant que soit «recueilli le témoignage» du Haut Commissariat aux réfugiés (HCR), dont le CTR était partenaire «exécutif» dans l’aide aux demandeurs d’asile dans le cadre d’une «convention légale» et d’un «programme financé» par l’ONU, a indiqué à l’AFP l’avocate Mounira Ayari.
L’avocate a aussi demandé la «libération provisoire» des deux détenus, arguant notamment que M. Djemali, ancien directeur régional du HCR, est âgé et souffre de «graves problème de santé». «Il ne supporte plus les conditions de sa détention» qui a «dépassé la limite légale des 14 mois».
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«Il n’arrive pas à se tenir debout, c’est très difficile de le voir comme ça», a confirmé à l’AFP sa fille Yusra. Toutes les charges lourdes (blanchiment, fraude) ont été abandonnées, a souligné la famille.
Début mai 2024, les prévenus avaient été arrêtés en même temps qu’une dizaine d’autres travailleurs humanitaires comme Sherifa Riahi, ex-dirigeante de l’association Terre d’asile, et la militante anti-raciste Saadia Mosbah de l’ONG Mnemty.
MM. Djemali et Krimi sont poursuivis «uniquement en raison de leur travail humanitaire légitime», a souligné à l’AFP Antonia Mulvey, directrice du cabinet Legal Action Worldwide (LAW), dénonçant «une procédure arbitraire en violation des engagements internationaux de la Tunisie», notamment de protection des réfugiés et du personnel humanitaire.
Pour le cabinet LAW, chargé de les représenter pour des démarches internationales, il existe en Tunisie «une tendance inquiétante à la criminalisation de ce travail».
L’ONG tunisienne FTDES a également fustigé «une criminalisation de l’aide» aux migrants et réfugiés, apportant son «soutien total» au CTR.
En février 2023, le président Kaïs Saied avait dénoncé dans un discours l’arrivée «de hordes de migrants subsahariens» menaçant, selon lui, de «changer la composition démographique» du pays.
Peu après, des dizaines de Subsahariens avaient été chassés des grandes villes, d’autres rapatriés en urgence par leurs pays. Certains avaient été expulsés aux frontières désertiques avec l’Algérie et la Libye, où au moins une centaine d’entre eux étaient morts.