Alors que le souvenir de la mauvaise campagne arachidière 2017 est toujours vivace chez les producteurs, celle de 2018 pourrait être pire. C’est du moins ce que soutiennent les travailleurs de la Sonacos, qui sont montés au créneau une fois de plus pour attirer l’attention sur les stocks qui dorment dans les magasins de la société. Selon eux, si les autorités ne suspendent pas les autorisations d’importations délivrées aux importateurs d’huile, cette situation pourrait, comme ce fût le cas l’année dernière, hypothéquer la prochaine campagne arachidière.
«Les produits stockés et invendus à la Sonacos sont estimés à près de 7 milliards de Fcfa (10,5 millions d’euros)», a indiqué le syndicat des travailleurs de la Sonacos lors d’une conférence de presse tenue ce mardi. Et comme si les autorités commerciales n’étaient pas conscientes des difficultés que vivent actuellement les travailleurs de cette société nationale, la direction du commerce intérieur continue de distribuer des autorisations d’importation aux opérateurs et autres sociétés concurrentes. «Ces derniers, dénonce le syndicat, ne respectent pas le protocole et sont entrain de fouler aux pieds la volonté du chef de l’Etat d’engager la Sonacos dans un nouveau modèle financier».
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Entre autres changements prévus, le plan de relance de la Sonacos prévoyait, dans un protocole défini par l’Etat du Sénégal et la Banque mondiale, un nouvel audit de la société, la reprise des activités dans les unités régionales, la trituration des stocks d’arachide collectée lors des dernières campagnes et la reprise du raffinage d’huile brute d’arachide, de soja et de palme.
Il était strictement interdit d’importer de l'huile raffinée, quel que soit son conditionnement et son format. Le ministre du Commerce avait d'ailleurs annoncé, lors d’une tournée à Touba, en partenariat avec les opérateurs économiques, «avoir instruit ses services que désormais, tous les petits formats d’emballage d’huile raffinée seront impérativement et exclusivement en huile d’arachide fabriquée au Sénégal. Mais il suffit de faire un tour chez le boutiquier du quartier pour se rendre compte que ces instructions n’ont jamais été respectées.
Aujourd’hui, les travailleurs de la Sonacos réclament que leur société soit détentrice «de 50 % des parts du marché d’huile locale qui est estimé à 200 milliards de francs Cfa (300,7 millions d’euros) annuellement». «Une nouvelle campagne de commercialisation de l’arachide pointe à l’horizon, préviennent les travailleurs, et la Sonacos doit pouvoir vendre sa production pour rembourser les crédits des campagnes et désengorger ses usines des importants stocks d’huile et d’arachide en coque».
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Devant ces accusations portées envers les autorités, le directeur du Commerce intérieur, Ousmane Mbaye réagit ainsi: «Il existe un réel problème de compétitivité en ce qui concerne l’huile d’arachide. Aujourd’hui, nous avons du mal à vendre cette huile sur le marché national. Elle est plus chère que celle trouvée sur le marché c’est ce qui fait toujours qu’elle pâtit de sa cohabitation avec les autres huiles (importées, NDLR)», soutient-il. Mais des solutions pourraient exister et il faudrait trouver «un levier sur lequel agir pour rendre cette huile compétitive», a-t-il conclu.
Il faudrait toutefois trouver des solutions à la commercialisation de ces stocks d’huile, toujours dans les dépôts de la Sonacos, sans lesquelles, le Sénégal fonce droit vers une compagne arachidière aussi mauvaise que celle de l’année dernière.
On se souvient qu’à l’occasion de la visite au Sénégal du président turc, Recep Tayyip Erdogan, le 2 mars 2018, le président Macky Sall avait presque supplié son homologue de demander aux opérateurs économiques turcs d’acheter l’arachide du Sénégal pour sauver la campagne arachidière en cours.