Sénégal: Dakar convoque l'ambassadeur britannique, suite aux révélations de la BBC

Franck Timis et Aliou Sall.

Franck Timis et Aliou Sall. . DR

Le 06/06/2019 à 10h59

Suite aux révélations de la BBC concernant la présumée corruption de Aliou Sall, frère du président Macky Sall, dans l'affaire du pétrole, le ministre étrangères des Affaires convoque l'ambassadeur de Grande-Bretagne à Dakar. En 72 heures, Dakar a pris une série de décisions controversées.

Depuis le reportage publié par la chaîne de télévision BBC révélant une présumée corruption du frère du président, qui aura fait perdre jusqu'à 12 milliards de dollars au Sénégal, Dakar, très embarrassé, multiplie les actions. 

Le Président Macky Sall lui-même, s'est exprimé à ce sujet pour prendre implictement la défence de son frère, Aliou Sall.

La ministre porte-parole du gouvernement, a quant à elle donné une conférence de presse hier, alors même que le pays célébrait l'Aïd el Fitr. Et ce matin du jeudi 6 juin, le ministre des Affaires étrangères a convoqué l'ambassadeur de Grande-Bretagne à Dakar. 

Juste après avoir présidé la traditionnelle prière de l'Aïd, Macky Sall a dénoncé hier, mercredi, une tentative de "déstabilisation". 

"Nous savons que là où il y a du pétrole, certains vont tenter de déstabiliser le pays (...) Le gouvernement va poursuivre cette affaire", alors que l'exploitation d'importantes réserves au large du Sénégal devrait commencer d'ici à 2021-2022.

"Je tiens à ce que la vérité soit rétablie", a-t-il dit, sans citer le nom de son frère en raison du "caractère privé" de cette mise en cause.

Réclamant des preuves, il a promis : "s'il faut sanctionner, nous allons sanctionner".

Et d'ajouter: "toutefois, nous n'accepterons pas de fausses accusations", en assurant que "jamais un pays n'a pris autant de dispositions pour éviter les écueils par rapport aux ressources qui vont être exploitées dans les prochaines années".

Dans l'après-midi de ce même mercredi, la porte-parole du gouvernement a convié la presse pour faire une déclaration dans les locaux même du ministère des Affaires étrangères. 

Plus sérieux encore, le ministère des Affaires étrangères a reçu l'ambassadeur de Grande-Bretagne, au matin de ce jeudi 6 juin.

C'est l'organe officiel de presse, le quotidien Le Soleil, qui a révélé cette information, en précisant cependant qu'il ne "s'agit pas d'une convocation, qui indiquerait une tension diplomatique" entre les deux pays.

Le journal parle d'une simlple "réception" par le ministre des Affaires étrangères, de l'ambassadeur britannique, George Ogdson, dans le cadre d'une audience de clarification.

"Amadou Ba mettra à profit ce tête-à-tête pour expliciter davantage les appréciations de l’État du Sénégal quant aux actes posés par la BBC, avant de lui remettre le mémorandum", écrit toujours le média. 

En juin 2012, peu après son élection, contre l'avis d'un rapport de l'Inspection générale d'Etat, (IGE), Macky Sall avait confirmé la décision de son prédécesseur, Abdoulaye Wade, d'attribuer l'exploitation de deux champs pétroliers et gaziers au large du Sénégal à la société Timis Corporation de l'homme d'affaires australo-roumain Frank Timis, n'ayant pas aucune expérience technique en la matière. 

Dimanche dernier, la BBC a affirmé que ce même groupe avait secrètement versé deux ans plus tard une prime de 250.000 dollars à Agritrans, une société contrôlée par Aliou Sall, frère cadet de Macky Sall.

Aliou Sall a qualifié , le mardi suivant, de "totalement fausses" ces informations, et promis de poursuivre la BBC en diffamation.

De son côté, le député Ousmane Sonko, candidat malheureux à la dernière présidentielle, s'est dit, hier, mercredi 5 juin, "sidéré" par les explications de Macky Sall.

"Moi, Ousmane Sonko, je l'accuse d'être le seul responsable de cette corruption qui en cache des dizaines d'autres. Il est le responsable de faits caractéristiques de haute trahison", a lancé sur Facebook le virulent député, dont le credo mêle patriotisme économique et dénonciation de la mal-gouvernance.

"A chaque fois, la stratégie a consisté à tenter d'allumer un contre-feu en se cachant lâchement derrière l'argument d'une prétendue 'manipulation d'opposants' ou d'une 'tentative de déstabilisation de notre pays par des forces obscures'".

La BBC affirme également que les participations de Timis Corporation ont été rachetées par le géant pétrolier BP en 2017 pour 250 millions de dollars, assorti de redevances de quelque 10 milliards de dollars sur 40 ans, privant la population d'importants revenus, alors que le Sénégal figure parmi les 25 pays les plus pauvres au monde.

BP a assuré, de son côté, avoir effectué toutes les vérifications nécessaires en matière d'éthique avant de signer ce contrat.

Le 06/06/2019 à 10h59