Le meurtre d’un taximan par balle, la semaine dernière à Dakar, a relancé le débat sur le port d’arme au Sénégal. On se souvient de la photo spectaculaire de Macky Sall, en visite au Pakistan, en train de tester une arme, et les commentaires que l’image avait suscités dans les réseaux sociaux…
Le quotidien «EnQuête», qui a consacré un dossier spécial au sujet dans son édition du jour, révèle que 1.000 permis de détention et de port d’arme ont été délivrés en 2016, pour 205 rejets. Ce qui, «sur une population de 14 millions d’habitants n’est pas beaucoup», estime l’adjudant Henry Ciss, chef du bureau relations publiques de la Police nationale, invitant à ne pas exagérer sur cette question du port d’arme.
Seulement, vu la facilité avec laquelle certaines personnes dégainent, si on ajoute à ces 1.000, les autres permis délivrés dans les années précédentes, le ratio devient important. En l’absence d’une base de données numérique compilant les statistiques, il n’est pas aisé de connaître le nombre exact d’armes en circulation. «Pour avoir le chiffre exact, il faut retourner aux archives», reconnaît l’adjudant Ciss. Ce qui est sûr, c’est qu’il y a, à ce jour, 3.000 permis de chasse en cours de validité, dont plus de 2.000 accordés lors des deux dernières années. Mais ces chiffres ne concernent que ceux qui sont en règle, c’est-à-dire ceux qui ont suivi la démarche légale pour obtenir une autorisation de port d’arme.
Or, on sait qu’il y a de nombreuses personnes détenant illégalement une arme. Des endroits comme le marché Ocas de Touba, Médina Gounass et Diaobé (dans la région de Kolda, frontalière avec la Guinée Bissau) sont réputés être des coins informels où il est facile de se procurer une arme. A cela s’ajoute, les milliers d’armes légères et de petit calibre, en provenance des pays frontaliers.
Si certains sont armés par «nécessité», d’autres le sont uniquement pour se donner l’impression d’être puissant, d’être «au-dessus des autres».
Au Sénégal, la procédure pour l’obtention d’une autorisation de port d’arme est totalement gratuite. En effet, il suffit d’adresser une demande manuscrite au ministère de l’Intérieur, accompagnée d’un dossier composé d’une copie de la carte nationale d’identité, d’un casier judiciaire, d’un certificat médical, de 4 photos d’identité et d’un timbre fiscal de 2.000 FCFA (3 euros). La procédure peut prendre quelques mois –le temps de faire une enquête de personnalité. Mais une fois l’autorisation obtenue, elle est en principe définitive, tant que la personne reste en règle (c’est-à-dire s’acquitte d’une taxe annuelle) et ne commet pas de crime justifiant la suspension temporaire ou définitive de son permis de port d'arme.
Face à une société qui «produit de la violence», faut-il revoir cette procédure ?