Sénégal: Bethio Thioune, l'influent guide des Thiantacounes, condamné à 10 ans de travaux forcés

Cheikh Bethio Thioune

Cheikh Bethio Thioune. dr

Le 06/05/2019 à 13h58, mis à jour le 07/05/2019 à 00h33

Cheikh Bethio Thioune vient d'écoper d'une peine de prison de 10 ans, assortie de travaux forcés dans une affaire de meurtre. Le juge n'a pas lancé de mandat d'arrêt international contre celui qui se trouve actuellement en France pour des soins médicaux.

L'influent Cheikh Bethio Thioune, 80 ans, vient d'écoper d'une peine de prison de 10 ans, assortie de travaux forcés, dans l'affaire du meurtre de ses deux disciples, Bara Sow et Abdoulaye Diagne.

Le juge n'a pas suivi le procureur qui, dans son réquisitoire, avait demandé une condamnation à perpétuité, mais a estimé que des raisons suffisantes existaient pour le condamner pour "complicité de meurtre" et "non-dénonciation de crime". 

Les biens du guide des "Thiantacounes" ("Ceux qui remercient Allah pour ses bienfaits") ont également été placés sous séquestre, alors que le Conservateur des droits de propriétés du département de Mbour est chargé, en ce qui le concerne, de l'exécution de cette peine. 

Le guide religieux n'était pas le seul sur le banc des accusés pour répondre aux griefs de "meurtres avec actes de torture et de barbarie", "association de malfaiteurs" et "inhumation illégale". Etaient à ses côtés, près d'une vingtaine de ses disciples, qui étaient impliqués dans les malheureux évènements qui se sont déroulés à son domicile, voici 6 ans. 

Six des trois co-accusés ont été acquittés, tandis que 16 d’entre eux ont écopé de peines allant de six mois d’emprisonnement ferme à quinze ans de travaux forcés.

Au chapitre des dédommagements pour les familles des victimes, Bethio et ses disciples ont été condamnés à verser quelque 100 millions de Fcfa, une sentence bien plus clémente que les 3 milliards que réclamait la partie civile. 

Ce verdict semble néanmoins satisfaire les victimes, qui ont non seulement obtenu des condamnations à des peines de prison contre les prévenus, mais aussi une répération pécuniaire pour le préjudice. C'est en tout cas ce que leur avocat a affirmé, en sortant de la salle d'audience. 

Pour le moment, Cheikh Bethio Thioune séjourne en France pour des raisons médicales, selon la presse sénégalaise. Mais contrairement à la demande du procureur, le juge Thierno Niang n'a pas lancé de mandat d'arrêt, compte tenu de son âge.

De même, il n'y aura pas non plus de contrainte par corps pour l'amende ainsi que les réparations dues aux familles des vicitimes. C'est sans doute ce qui justifie la mise sous séquestre de ses biens. 

Cette affaire remonte au 22 avril 2012, date à laquelle Bara Sow et Abdoulaye Diagne ont trouvé la mort dans une bagarre à l'intérieur d'un des domiciles de Cheikh Bethio Thioune, à Medinatou Salam, à Mbour, situé à une centaine de kilomètres au sud de Dakar. 

Cependant, Me Ousmane Sèye continue de nier la culpabilité du guide religieux qu'il représentait dans ce procès. Selon lui, la "complicité de meurtre" pour laquelle son client est condamné suppose assistance en faveur des auteurs du crime. Or son client a été informé en même temps que tout le monde, quand les forces de l'ordre se sont saisies du dossier et sont venues chez lui pour les besoins de l'enquête. 

La défense des prévenus a soutenu la thèse de la provocation, arguant que les victimes avaient été interdites de mettre les pieds dans les domiciles du Cheikh des Thiantacounes. Pourtant, ils auraient violé cette interdiction, ce qui aurait provoqué la violente bagarre ayant causé leur mort. 

Cheikh Bethio Thioune est un ancien administrateur civil qui a exercé, à plusieurs reprises, la fonction de sous-préfet.

Fidèle serviteur de Serigne Saliou, dernier fils vivant de Serigne Touba, fondateur du mouridisme, il a rapidement gagné en notoriété au sein de cette confrèrie.

Il a alors fondé la branche des Thiantacounes, mais reste néanmoins très controversé, à cause de ses pratiques qui sortent de l'orthodoxie. 

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 06/05/2019 à 13h58, mis à jour le 07/05/2019 à 00h33