Cameroun. De simple cache-sexe à tissu noble: voici l’histoire de l’Obom

Le tissu Obom, un pan de l'histoire du Cameroun.

Le 25/02/2025 à 15h56

VidéoSi le tissu Ndop est camerounais, il en est de même pour Obom. Mais le premier est plus connu et représente régulièrement le pays dans certains rendez-vous culturels internationaux. L’Obom est une page de plusieurs siècles d’histoire dont le premier chapitre a été écrit par les ancêtres des Ekang. Cette étoffe a des origines des plus insoupçonnées. Même pour un des pays les plus arborés d’Afrique.

Le tissu Obom est-il un colosse aux pieds d’argile? Même le plus malin d’entre les Camerounais ne saurait répondre à cette question qui revient à chaque activité culturelle. En effet, de nombreux experts dans le domaine de la culture ne comprennent pas pourquoi le tissu Obom peine à se se faire admettre dans la cours des grandes étoffes comme c’est le cas du Ndop des régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest du pays.

L’Obom est une page de plusieurs siècles d’histoire dont le premier chapitre a été écrit par les ancêtres des Ekang, un peuple qui habite les régions du Centre, du Sud et de l’Est. Plusieurs anthropologues révèlent que pour préserver la pudeur, les populations de l’époque très ancienne mettaient des cache-sexes. Les Fangs-Bétis ou Ekangs utilisaient alors l’écorce d’un arbre qu’ils appelaient Obom. C’est grâce à cette ressource qu’ils réussissaient à se confectionner un cache-sexe plus solide et plus esthétique.

De génération à génération, les techniques d’extraction de cette écorce et de fabrication du tissu Obom ont été répandues parmi les populations, transformant ainsi les simples cache-sexes aux vêtements et à plusieurs autres objets.

Cette technique est actuellement maîtrisée par quelques personnes, notamment Francis Mvodo Meke, un artisan installé dans la région de l’Est. «Le plus difficile est de trouver l’arbre Obom. Une fois fait, j’en extrais l’écorce que je mets aussitôt au feu pour l’attendrir. L’écorce ramollie est par la suite bien pilée à l’aide d’un marteau en bois. Puis, je la trempe dans l’eau pendant près d’une semaine pour enlever toute la sève de l’arbre. Après cette étape, je lisse tout le produit sur une surface plate en forme d’un tissu que je sèche au soleil pour obtenir un tissu», a-t-il expliqué avant de conclure que la fabrication du tissu Obom exige beaucoup de patience et de précision.

Il a également reconnu qu’en utilisant les machines appropriées, la production de ce tissu serait plus rapide et demanderait moins de ressources humaines. C’est certainement cette difficulté à identifier l’arbre approprié, à extraire son écorce et enfin à fabriquer l’Obom, que ce tissu est rare sur le marché et plus onéreux que tous les autres fabriqués au Cameroun.

Par Jean-Paul Mbia (Yaounde, correspondance)
Le 25/02/2025 à 15h56