L’entrée en vigueur effective de l’interdiction faite aux minibus communément appelés «gbaka» d’entrer dans la commune d’Adjamé bien qu’a salutaire, mettra en difficulté aussi bien passagers que les transporteurs.
Depuis l’annonce de la mesure il y a quelques jours, la grogne monte chez les usagers. Cette décision, prise par les autorités pour fluidifier la circulation dans cette commune considérée comme le carrefour commercial d’Abidjan, va bouleverser les habitudes de milliers de travailleurs, commerçants et élèves qui dépendent de ce moyen de transport au quotidien.
«Les terminus et stations de la Liberté, Renault, En-bas-du-pont, etc, seront définitivement fermés et délocalisés sur le site de l’ancienne casse d’Adjamé pont ferraille. Cette réorganisation majeure vise à fluidifier la circulation au sein de la commune d’Adjamé, à réduire l’anarchie dans le secteur du transport et à lutter contre les embouteillages», justifie Cissé Bacongo, ministre gouverneur du district autonome d’Abidjan.
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Pour de nombreux usagers, cette mesure représente une dépense supplémentaire. Désormais, ceux qui arrivaient directement à Adjamé en gbaka sont contraints de prendre un second moyen de transport, augmentant ainsi leur budget quotidien. «Avant, avec 300 francs CFA, on pouvait venir d’Abobo, de Yopougon directement au centre d’Adjamé. Maintenant, et si on commence à appliquer la mesure, l’on devra désormais descendre à la ferraille, ancienne casse qui devient le nouveau site d’embarquement et de débarquement et payer encore un taxi ou un woro-woro pour 200 francs CFA de plus», se lamente Kaffo César, un employé de commerce.
Pour d’autres, c’est une perte de temps considérable. «Nous devons marcher de longues distances ou attendre longtemps un transport alternatif. C’est vrai que c’est une bonne décision, mais je pense plutôt qu’au lieu d’interdire aux gbaka de rentrer à Adjamé, on devrait plutôt leur créer des points d’arrêt minute de sorte qu’ils ne stationnent pas pour charger…», explique Ouattara Aboubakar, étudiant à l’Université Félix Houphouët-Boigny.
Les syndicats des transporteurs ne cachent pas non plus leur mécontentement quand bien même ils partagent l’initiative. Ils dénoncent cependant une décision prise sans concertation préalable, sans solutions palliatives, «normalement, la mesure devrait rentrer en vigueur le 6 mars, mais allez-y voir de vous-même à Adjamé. Il aurait été compréhensible si l’Etat avait mis à disposition la gare moderne promise au nouveau du nouveau site. Nous comprenons la volonté des autorités de désengorger et fluidifier Adjamé, mais il aurait fallu proposer des alternatives avant d’imposer une telle mesure», décrie Bayo Abou, président des chauffeurs de Masa de Yopougon.
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Cependant, la question de l’applicabilité de cette mesure reste entièrement posée. Car depuis l’annonce, les gbaka continuent de rentrer à Adjamé en attendant la mise en service du nouveau site.
En attendant, les usagers doivent s’apprêter à vivre une nouvelle réalité, entre coûts supplémentaires et perte de temps, tandis que les transporteurs tenteront tant bien que mal de maintenir leur activité. Une situation qui, sans ajustements, risque d’alimenter davantage les tensions dans un secteur déjà fragile.