Étrangers du Sénégal: que reste-t-il de la Téranga de nos aïeux?

La Téranga résiste-t-elle aux mutations sociales ?

Le 25/10/2025 à 13h02

La Téranga, cette hospitalité légendaire qui fait la fierté du Sénégal, est souvent décrite comme un véritable art de vivre. Cependant, beaucoup se posent la question de savoir si les vicissitudes de la vie actuelle finiront par venir à bout de cette valeur ancestrale dans un pays qui compte de plus en plus d’étrangers.

Mary Siby, conseillère technique au ministère de l’Éducation nationale, en est convaincue. «Nous ne devons pas être accepter que la Téranga disparaisse. Nous devons au contraire apprendre à nos enfants ce que nos grands-parents, nos aïeux ont fait, et qui font du Sénégal aujourd’hui ce peuple uni, qui se respecte et qui veut aller ensemble de l’avant

Du côté religieux, Cheikh Tidiane Fall rappelle les fondements spirituels de cette valeur. «C’est le Prophète lui-même qui encourage cela. Il faut donner, à son prochain. Je crois que c’est une orientation que nous avons essayé de concrétiser ici au Sénégal, mais peut-être qu’on n’insiste pas assez sur la source

Pour certains observateurs, la Téranga sénégalaise résiste au changement, mais doit s’adapter aux réalités sociales et économiques d’aujourd’hui. Ndongo Sarr, acteur éducatif, partage cette analyse. «Je suis de ceux qui considèrent que cette Téranga est à l’œuvre quasiment partout dans notre société. Les Sénégalais sont très accueillants, chaque fois qu’ils reçoivent, ils se donnent au-delà de leurs moyens. Cette Téranga qui pousse les gens à faire au-delà de leurs moyens et à se retrouver en difficulté, ce n’est pas de la vraie Téranga. C’est une version biaisée, et nous la condamnons

Le débat s’élargit aussi à la place des étrangers au Sénégal. Si l’hospitalité reste une valeur forte, certains plaident pour une meilleure régulation dans les secteurs stratégiques.

Mary Siby précise «aujourd’hui, on ne distingue plus celui qui est du Sénégal de celui qui ne l’est pas. D’ailleurs, beaucoup de Sénégalais ont des parents venus d’ailleurs. Moi qui vous parle, mes racines sont gabonaises, et pourtant je suis Sénégalaise, je parle wolof, je parle soninké, et je me sens pleinement Sénégalaise.»

Ndongo Sarr complète: «Les étrangers ont le droit de venir s’installer chez nous et d’exercer, mais je crois qu’il faudrait éviter que des secteurs stratégiques soient confiés aux étrangers

Mythe ou réalité, la Téranga reste ce ciment qui unit les Sénégalais. Un trésor culturel et moral qui, malgré les secousses de la modernité, continue de faire battre le cœur du pays au rythme du partage, de la solidarité et du respect mutuel.

Par Mamadou Awa Ndiaye (Dakar, correspondance)
Le 25/10/2025 à 13h02